Face au "trou de la Sécurité sociale", le Sénat va relancer cette semaine la question du financement du modèle social. Ça promet !<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour Jean-Marc Sylvestre, "le trou de la Sécu n'intéresse personne". Or il faut s'en préoccuper urgemment.
Pour Jean-Marc Sylvestre, "le trou de la Sécu n'intéresse personne". Or il faut s'en préoccuper urgemment.
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Atlantico Business

À côté du déficit budgétaire, les sénateurs de droite et du centre sont bien décidés à tirer la sonnette d'alarme sur le déficit de la Sécurité sociale, car, malgré les réformes de l'assurance chômage ou des retraites, "le trou de la Sécu n'a pas disparu pour autant".

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le trou de la Sécurité sociale n'intéresse personne, or il est autrement plus préoccupant que le déficit du budget de l'État, car on ne peut guère compter sur les marchés financiers internationaux ou sur les banques centrales pour financer à long terme, un déficit.

Par ailleurs, on pressent clairement que du côté du social, il y a peu de variables d'ajustement, alors même que la collectivité a choisi de ne pas toucher au fonctionnement du modèle social. En 2020, la crise du Covid a creusé dans des proportions considérables le déficit général de la Sécurité sociale : plus de 40 milliards d'euros, parce que le système a dû financer des dépenses exceptionnelles (chômage partiel, assurance maladie, système de santé) en perdant beaucoup de ses recettes figées par le confinement. Deux ans plus tard, le système a un peu redressé les comptes, grâce à la reprise de l'activité, mais le système restera cette année encore déficitaire de près de 9 milliards d'euros, avec sans doute une nouvelle aggravation à partir de 2024. Les sénateurs vont avoir à examiner un budget Sécu en déficit de 11,2 milliards qui se creusera encore davantage vers les 20 milliards d'euros dans les années 2027/2030.

Ce qui est effrayant dans ces chiffres, c'est l'accumulation au cours des années d'une dette qu'on stocke depuis plus de trente ans maintenant dans une caisse spéciale d'amortissement, la Cades, laquelle est financée par le CSG et la CRDS. C'est-à-dire par des impôts qui ne disent pas leur nom, mais qui pèsent chaque année aussi lourde que la TVA. Ce qui est effrayant, c'est que le gouvernement n'a pas de trajectoire de redressement.

Ce qui est effrayant aussi, c'est que les parlementaires n'ont pas de solutions alternatives. Le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif se contentent de réformer à la marge le fonctionnement du système social (chômage, retraite), qui n'ont d'autre intérêt que de reculer la date où il faudra regarder la vérité en face. Dans la situation politique actuelle, personne n'a évidemment les moyens de modifier le modèle social et se contente donc de petits aménagements, en particulier de prolonger la durée de vie de la Cades qui devrait disparaître en 2033, mais qu'il faudra prolonger. En attendant, l'Urssaf, qui gère les déficits, doit trouver des financements à court terme sur les marchés. L'Urssaf les trouve au prix d'un risque de rupture de liquidité sur l'assurance maladie ou sur la retraite, mais le système finira par se fracturer. Les hommes politiques sont tous les mêmes, ils cherchent des expédients en espérant que la fracture sera provoquée plus tard, c'est-à-dire avec la prochaine génération. Celle de nos enfants  ou petits enfant . Autrement dit "Courage fuyons !"

Les responsables politiques les plus idéologiques proposent d'augmenter les ressources par une majoration des cotisations, ou une fiscalisation, mais ça ne marche pas. Sauf à nationaliser complètement le modèle social et par conséquent d'abandonner sa particularité d'être un système paritaire mis en place à la libération par le général De Gaulle.

D'autres responsables politiques plus courageux suggèrent de diminuer les prestations, mais on voit bien qu'ils se heurtent aux oppositions politiques. Le débat cette semaine tournera autour d'un recours possible au niveau des cotisations patronales (ce qui fâchera le Medef), d'un rabotage de certaines prestations ou, plus sensible, sur l'idée de puiser dans certaines caisses de retraite bien gérées comme l'Agirc-Arrco.

La seule vérité qu'il faudrait respecter relève du fonctionnement paritaire. C'est au paritarisme de fixer l'équilibre entre les ressources et les dépenses. C'est au système paritaire de faire respecter les logiques assurantielles, c'est-à-dire d'imposer systématiquement l'équilibre entre les dépenses et les recettes. Cela nécessite d'avoir des syndicats beaucoup plus représentatifs qu'ils ne le sont actuellement, cela nécessite de faire jouer la concurrence entre les prestataires sociaux, ce que commencent à faire les mutuelles complémentaires, et cela nécessite surtout de séparer la sphère sociale, ce qui relève de la solidarité (sous la responsabilité de l'État) et ce qui relève de l'équité, géré sous la logique assurantielle.

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