États-Unis, crime : tueries de masse, assassinat des Noirs, données réelles, chiffres officiels<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
Des policiers américains dans la ville de New-York mobilisés sur une scène de crime.
Des policiers américains dans la ville de New-York mobilisés sur une scène de crime.
©Drew Angerer / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Délinquance

La réalité du terrain aux Etats-Unis est très éloignée des poncifs sur la criminalité dans les villes américaines.

Xavier Raufer

Xavier Raufer

Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date:  La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers. 

Voir la bio »

On les croyait en guerre contre les "stéréotypes", "clichés" et autres "préjugés" : pas du tout ! En fait, s'agissant des États-Unis, les médias d'information rabâchent tant et plus deux poncifs criminels usés jusqu'à la corde :

- Les Noirs, surtout jeunes, meurent victimes d'une police raciste ;

- Et les tueries de masse s'expliquent uniquement par l'abondance (de fait, démen­te) des armes à feu dans ce pays.

Or la réalité du terrain ne corrobore presque rien de ces allégations :

• TUERIES DE MASSE ET ARMEMENT - La pléthore d'armes à feu aux États-Unis explique-t-elle directement les tueries ? Non : les États et villes avec le plus de citoyens armés ne sont pas ceux déplorant le plus d'homicides par balles : à Washington D.C., Chicago & Baltimore, ont des taux d'homicides très élevés, malgré des lois sévères enca­drant la possession d'armes à feu. Voici ce que révèle sur le sujet l'enquête de référence - cependant achevée avant le confine­ment-CO­VID, et donc, l'explosion des homicides et achats d'armes nouvelles de 2020-2022. En 2020 par exemple, 23 millions d'armes à feu neuves furent vendues aux États-Unis.

66% des foyers du Montana et du Wyoming ont au moins une arme légale, sans plus d'homicides par balle qu'au Massachusetts et New Jersey, eux, bien moins armés. Mon­tana, 1,5 homicide par balle pour 100 000 habitants (2019) ; Massachusetts, 1,25/100 000 (moyenne française). En Cali­fornie, 28% des ménages ont au moins une arme, pour 3 homicides par balle pour 100 000 hab. ; Au Ma­ryland, 30% de foyers armés, 7/100 000 homicides. De­laware, 34% de foyers armés, 4/100 000 homicides ; Dakota du sud et Idaho, 50%+ des foyers armés, moins de 1% d'ho­mi­cides/100 000, etc. Conclusion : la quantité d'armes légales et le nombre d'homicides par balle n'ont nulle corré­lation ; plus d'habitants armés dans un État n'égale pas plus d'homicides com­mis ; et sur tous les 50 États, on constate parfois l'inverse.

À Lire Aussi

Europe, France : stupéfiants - un décodage (un vrai)

• POPULATION NOIRE, HOMICIDES, JUSTICE- datant de 2020, la dernière grande étude du FBI concerne les ± 14 000 homicides de 2018, dont 6 576 donnent la race de la victime ; 47,5% du to­tal : l'échantillon est représentatif. En 2018 les États-Unis ont 328 millions d'habitants, dont ± 44 m. de "Noirs" (incluant là-bas les métis). Sur ces 6 576 homicides à race définie, 2 925 Noirs, dont 2 600 victimes d'autres Noirs et 325, d'"autres"). Homicides pour tous les autres, Blancs ou "in­connus" : 3 645 ; Blancs as­sassinés par des Blancs, 577 ; par des Noirs ou "autres", 3 068.

Noirs victimes : 66 homicides par 1 million d'Américains ; Blancs victimes, 13/1m. Un Noir risque cinq fois plus d'être assassiné qu'un Blanc. Noirs coupables d'homi­cides, 72/1 million ; Blanc, 12/1m. ; 6 fois plus d'assassins noirs que de blancs. En 2020, les Noirs sont 13% de la po­pulation américaine, avec ± 50% des assassins et ± 56% des victimes. En Californie, les Noirs sont 6% de la population, pour 31% des homicides. Prisons : (selon le New York Times, 2020) un sur 12 des hommes noirs (25-54 ans) est en pri­son ; pour toutes les autres ethnies, un sur 60.

Reste enfin la situation largement occultée, mais d'autant plus atterrante, dans laquelle stagne, depuis un siècle et plus, la population Afro-Améri­caine : là, bien au contraire, rien à nuancer ou relativi­ser : les faits sont affreux - qu'on en juge.

• AFRO-AMÉRICAINS : SÉGRÉGATION À PERPÉTUITÉ- Surtout par l'habitat : hors d'une mince couche (artistes, sportifs et bourgeoisie noire), cette sé­grégation augmente de­puis 30 ans (UC-Berkeley, Othering and Belonging Institute) : en 2019, 81% des métro­poles (200 000+ habitants) sont plus racialement "sépa­rées" par l'ha­bitat qu'en 1990 (Chicago, Milwaukee, Detroit, New York, Philadelphie, etc.). Ce, massivement et mal­gré toutes les lois et dispo­sitifs d'intégra­tion, les milliards dépensés ; le pire advenant au nord et nord-est du pays.

À Lire Aussi

Marseille, ses tueries, sa (pauvre) pré­fète

Dans les quartiers noirs sous ségrégation de facto : revenus plus bas... chômage pire... maisons de moindre valeur... peu d'accès aux soins et à l'éducation... po­lice brutale, etc. En 1968, la discri­mination des habitats est abolie par une loi fédérale [remarque : la guerre de Sécession a pris fin depuis 103 ans] ; en 1968 donc, 65% des Blancs possèdent leur logement et 38% des Noirs. (27% de plus pour les Blancs). En 2018, après un demi-siècle de Fair Housing Act, 72% des Blancs pos­sèdent leur logement, et 42% des Noirs ; différence, 30% pour les Blancs - pire qu'en 1968 ! En 2004, (avant la crise des subprimes) 49% des Noirs possédaient leur logement ; prévision pour 2040... 41% de Noirs pro­priétaires. Accession à la propriété : aux Etats-Unis, le progrès racial marche à reculons.

Revenus et pauvreté, Noirs et Blancs - De 1972 à 2020, d'innombrables programmes fédéraux vi­sent à restreindre, sinon abolir, le gouffre socioéconomique entre Blancs et Noirs ; plus des mil­liers de manifestations et luttes antiracistes - NUL effet sur ces inégalités : en 2020, l’écart est PIRE qu’en 1972. [Revenu moyen d’un foyer par race ou origine, calcul en dollars constants, ajus­tés 2020] En 1972, revenu moyen d’un foyer blanc : $ 58 000 ; noir, $ 32 000 ; écart, $ 26 000 ; en 2020, revenu moyen du foyer blanc : $ 75 000 ; noir, $ 46 000 ; écart, $ 29 000 ! Fortune compa­rée par origine : en 2021, quand un foyer blanc possède un dollar, un foyer latino a 21 cents et un foyer noir, 12 cents.

Enfin, cette différence qui inclut et résume tout : (National Urban League, « State of Black Ame­rica » 2021) : durée de vie moyenne d’un Noir, 74,4 ans, 4 ans de moins qu’un Blanc.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !