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Depuis maintenant 3 ans, le monde est touché par une crise sanitaire.
Depuis maintenant 3 ans, le monde est touché par une crise sanitaire.
©ODD ANDERSEN / AFP

La fin des pandémies ?

C’est en tout cas l’hypothèse formulée par quelques médecins américains au regard des progrès de la médecine et de nos capacités d’organisation sanitaire.

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Atlantico : L’histoire humaine a été traversée de pandémies qui appartiennent maintenant au passé, certaines des maladies responsables ont été éradiquées (ou presque). A quel point avons-nous, en partie, triomphé des pandémies ? Le Covid a-t-il fait figure d’exception dans l’histoire récente ?

Antoine Flahault : Le Covid-19 est en effet la pire pandémie que le monde ait connu depuis plus de cent ans. La grippe espagnole avait été une faucheuse redoutable en 1919, mais à cette époque, où l’on ne savait pas encore ce qu’était un virus, les estimations de la mortalité étaient encore plus imprécises qu’aujourd’hui. Les estimations actuelles convergent pour penser que le Covid-19 a tué directement ou indirectement au moins vingt millions de personnes en trois ans. Il a été calculé qu’au moins vingt millions de vies supplémentaires ont été sauvées par la vaccination et le nombre de décès épargnés par les confinements, les quarantaines, et les autres mesures sanitaires n’est pas encore chiffré avec précision mais est aussi considérable. A cela s’ajoute toutes les souffrances subies par les personnes qui ont été hospitalisées parfois en réanimation, celles souffrant de séquelles persistantes et de Covid longs, et puis toutes les victimes collatérales, sanitaires et économiques, liées à cette crise aux multiples facettes dont on n’a pas encore tiré toutes les conséquences. Il est vrai que l’on avait l’impression d’avoir plutôt réussi jusque là sinon à éliminer du moins à limiter fortement l’impact des maladies infectieuses qui avaient dans le passé décimé la population. La variole, la peste, le choléra, la tuberculose, la poliomyélite, la diphtérie, le paludisme, la fièvre jaune et même plus récemment le sida, toutes ces maladies et beaucoup d’autres continuent certes à circuler sur la planète mais sont devenues essentiellement des maladies de la grande pauvreté et du sous-développement. On pouvait  croire que l’on avait enfin triomphé de tous ces virus, parasites et bactéries mortifères, mais le Covid-19 nous a tristement rappelé à la réalité et aussi faire preuve de plus d’humilité face à ces menaces infectieuses.

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Avec les bonnes technologies, et la bonne mise en place de ces dernières, pourrions nous faire en sorte que des pandémies issus de virus se transmettant par voie respiratoires, comme le Covid, disparaissent également ?

Jusqu’au dix-neuvième siècle boire un verre d’eau ou ingérer de la nourriture représentait des risques mortels renouvelés plusieurs fois par jour. Il ne vient à l’esprit de personne aujourd’hui, dans nos pays développés, de penser en buvant ou en mangeant que cela ait pu représenter le risque autrefois non négligeable de contracter le choléra ou la dysenterie. Eh bien, aujourd’hui entrer dans un local fermé recevant du public, dans un wagon où dans un bus représente le risque potentiellement mortel, de contracter le Covid-19, la grippe, le VRS, la tuberculose, la varicelle, la rougeole ou encore de nombreux autres agents pathogènes respiratoires. Ce n’est plus trois fois par jour, mais douze fois par minute, c’est-à-dire au rythme de notre respiration, que nous exposons à ce risque parfois mortel nos enfants dans les écoles, nos anciens dans les Ehpad, nos malades dans les hôpitaux, et chacun de nous au travail ou dans les transports publics. Bien sûr, on ne meurt pas à chaque fois que l’on contracte l’un de ces germes, pas plus qu’autrefois nous mourrions à chaque fois que nous buvions de l’eau contaminée, et donc nous nous accoutumons au risque, nous finissons par tolérer cet état d’insalubrité publique. Dans quelques années ou dizaines d’années nos enfants seront probablement profondément choqués de la complaisance généralisée de notre génération alors que nous savions, que nous étions parfaitement au courant. Votre question est d’ailleurs très bien formulée, nous disposons aujourd’hui de toutes les « bonnes technologies » pour pouvoir réduire presque totalement le risque de transmission de ces virus respiratoires, il nous manque juste la volonté politique de les mettre en place. C’est exactement la même raison, le manque de volonté politique qui explique les cas de choléra qui surviennent encore aujourd’hui dans les parties les plus déshéritées du globe, alors que l’on disposerait de toutes les « bonnes technologies » pour les éviter.

Où les efforts devraient-ils être mis pour cela ? Sont-ils suffisamment présents pour l’instant ?

Au-dessous d’une concentration de CO2 de 600ppm dans une pièce, il n’y a quasiment aucun risque de contaminations par le bacille de la tuberculose, le virus de la grippe ou le coronavirus. Il suffit donc que tout endroit clos recevant du public affiche des concentrations de CO2 inférieures à 600ppm pour éliminer la circulation de tous les agents pathogènes respiratoires. Pour cela il suffit de disposer d’une ventilation appropriée, renouvelant l’air de façon efficace. Il existe aussi des purificateurs d’air que l’on peut associer pour réduire encore plus le risque de transmission. Ces techniques ont un coût, tout comme celles qui acheminent l’eau potable jusqu’aux robinets de nos logements.

Si les pandémies liées à des virus respiratoires finissaient par ne plus être une menace, pourrait-on imaginer un monde sans pandémie ?

Il y a différents modes de transmission des agents pathogènes. Les virus respiratoires sont responsables d’un grand nombre de maladies très transmissibles qui causent une mortalité très élevée et évitables dans tous les pays de la planète. On pourrait en effet quasiment éliminer aujourd’hui toutes les conséquences sanitaires et économiques liées à ces virus, par un air intérieur de bonne qualité. Mais la pandémie du sida est due au VIH qui se transmet par voies sexuelle et sanguine. La maladie de Creutzfeld-Jakob, encore appelée maladie de la vache folle est due à un prion qui se transmet par voie digestive. La dengue ou le chikungunya sont dus à des virus qui se transmettent par des moustiques. Il existe donc différents modes de transmission qui représentent autant de possibilités de voir déferler de nouvelles pandémies sur la population. À chaque fois, les modalités de riposte doivent d’abord considérer les mécanismes de transmission de l’agent pathogène en cause pour chercher à lutter efficacement contre lui.

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