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Et si la France était génétiquement allergique à la croissance ?
©REUTERS/Ralph Orlowski

Réformes

Quand le monde des syndicats s’oppose au chèque syndical, quand les acteurs de la santé refusent le privé, quand l’Education nationale se ferme à l’innovation, c’est la totalité du système français qui se protège et lutte contre le réformisme.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Si la France est aussi difficile à réformer, ça n’est pas parce qu’elle est hostile à l’adaptation et au changement, c’est parce qu’elle s’oppose au principal outil de transformation, de progrès et de changement : la concurrence. Les français sont sans le savoir parfois profondément allergique à la concurrence. Viscéralement, culturellement.

1e exemple, une caricature. Quand l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon, apôtre de la liberté, de la démocratie et de la transgression en vient à publiquement s’opposer au chèque syndical, elle se trahit. Il ne s’agit pas de protéger le monde du travail, il s’agit de protéger les appareils syndicaux les plus réactionnaires. Le chèque syndical, c’est le moyen donné à tous les salariés de s’inscrire au syndicat de leur choix et de payer leur cotisation. Mais si on institue le chèque syndical, on donne certes aux syndicats, des moyens financiers clairs pour fonctionner, mais on encourage aussi, la concurrence entre les marques syndicales.

Les syndicats seront obligés d’afficher leurs particularités et leurs services. Les syndicats seront obligés de se comparer pour toucher le maximum d’adhérents. Ils seront donc obligés d’être bons et utiles.

Alors qu’aujourd’hui, les syndicats profitent d’une concurrence de connivence. « Ils s’arrangent pour se partager le marché des grandes entreprises. Je te donne le comité d’entreprise de la SNCF mais tu me laisses tranquille à l’EDF. A moi l’UNEDIC, à toi, l’assurance maladie, à nous les caisses de retraites ».

Tout le monde se sert. Tout le monde est content et défend un système paritaire au nom des valeurs de la résistance qui sont sur ce terrain-là très dépassées.

2e exemple, le plus sensible. Les acteurs du système de santé, dont on sait bien qu’il est au bord de la faillite, sont prêts à se lever, vent debout contre toutes réformes qui viendraient accroitre la concurrence avec le système privé, alors que la concurrence entre les différents producteurs de santé sont évidemment facteurs de progrès. Quand, il y a moins de 20 ans sous la pression de Simone Veil, le ministère de la Santé a laissé publier les performances comparées des différents établissements de santé, tout le monde était contre. Pas question de dresser des hit-parade de médecins !  Aujourd’hui, personne ne peut nier que ces publications aient été néfastes au fonctionnement. Au contraire. La concurrence stimule et crée le progrès.

3e exemple, le plus explosif. L’Education nationale profondément centralisée commence à reconnaître l’intérêt de mesurer l’efficacité de ses principaux acteurs. En Bretagne, par exemple, région de France la plus équipée en établissement privés à caractère religieux, le secteur public est tellement minoritaire qu’il se défend par la qualité. En Bretagne, ça n’est pas le secteur privé qui porte l’excellence, c’est le secteur public, l’enseignement laïc et républicain.

On pourrait ainsi multiplier les exemples : introduction de la concurrence dans un secteur qui s’endort sur un monopole et on stimule l’ensemble de l’activité.

Seulement voilà, quand on introduit de la concurrence quelque part, on bouge les lignes de privilèges, on supprime des monopoles, on menace des positions acquises, et par conséquent on bouleverse des acteurs installés avant que le progrès de la concurrence ne se diffuse au plus grand nombre. Alors les élites, les appareils se rebiffent, se défendent, se carapatent. Les appareils syndicaux ont peur du changement, les systèmes de santé se jalousent et les appareils éducatifs tournent le dos à l’innovation. Les chiens protègent les niches. Les mammouths administratifs ne se bougent pas et occupent le terrain.

Cette opposition à la concurrence est culturelle, historique, presque générique. Toute l’histoire de France est faite de remparts, de forteresses et de murs contre les envahisseurs et d’une façon générale contre les autres. Les philosophes du 18e siècle ont conceptualisé la liberté individuelle, mais ils ont utilisé le centralisme étatique, administratif et souverainiste pour protéger cette liberté. Du coup, ils ont créé un système tellement protecteur sur le terrain économique et social, qu’ils ont accouché d’un autre réseau de rentes et de privilèges

C’est ce système qui a tellement retardé la France dans son adaptation a la mondialisation, au digital ou à l’Union européenne.

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