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Et pour vous Chantal Delsol, s'il n'y avait qu'une idée à retenir de 2014, ce serait laquelle ?
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Sociétal mon amour

Pour la philosophe Chantal Delsol, l'année 2014 marque l'aboutissement du processus de désengagement des domaines économique et social par les socialistes. Place, désormais, au tout sociétal.

Chantal Delsol

Chantal Delsol

Chantal Delsol est journaliste, philosophe,  écrivain, et historienne des idées politiques.

 

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En 2014, sans qu’il se produise aucun événement marquant, le paysage politique et social français se caractérise par la transformation du socialisme. Celui-ci cesse de s’occuper de l’économie et du social pour fonder ses rêves, ses prétentions, ses espoirs, et sa propagande, sur ce qu’on appelle dorénavant le sociétal.

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On avait pu croire depuis 1984, année décisive, que le socialisme français deviendrait une social-démocratie aussi bourgeoise qu’hypocrite, mais néanmoins capable de gouverner un grand pays sans produire à chaque occasion les désastres économiques que le socialisme engendre toujours. Mais ce n’est pas le cas. Avec François Hollande, nous sommes décidemment abonnés à un système sottement égalitariste, qui tout naturellement produit des inégalités terribles. Voyant ces inégalités, les Français crient au libéralisme extrême, car ils croient le socialisme innocent par nature (c’est français !) et incapable de produire par sottise ce qu’il déteste. Les citoyens méritants s’exilent à l’étranger – ainsi le socialisme atteint-il son but qui est de supprimer le mérite, inégalitaire. Tant que tous les pays ne seront pas socialistes, nos citoyens continueront à s’exiler – c’était ce que Trotsky appelait le socialisme dans tous les pays.

Le résultat : l’économie décline, le chômage progresse, l’éducation s’effondre, la pauvreté explose. Rien d’extraordinaire : regardez Cuba et vous aurez un système socialiste en vitesse de croisière, regardez la Corée du Nord et vous aurez un système socialiste en bout de course. Ajoutez à tout cela ce qu’Elie Halévy appelait l’organisation de l’enthousiasme : les discours enflammés de Belkacem sur les réformettes scolaires censées tout révolutionner. Et vous aurez la version française, en voie de désastre.

Cependant il s’y ajoute, et c’est la nouveauté, la trouvaille de nos idéologues contemporains pour faire oublier leur propension historique à la banqueroute : le sociétal ! Il est impossible de faire reculer le chômage, et même d’empêcher qu’il augmente, avec des recettes socialistes du genre emplois fictifs (appelés emplois d’avenir). Mais il est très facile de passer des heures et des pages à disserter sur le statut du beau-parent, le mariage entre couples du même sexe ou l’euthanasie. Cela ne coûte pas un rond. Cela embête les bourgeois. C’est snob. Cela plait à la jeunesse. C’est tendance. C’est progressiste. Tout bénéfice. Ainsi le socialisme s’est-il recyclé. Nous  avons vu cette année l’épanouissement de cet avatar.

Certains groupes de gauche s’inquiètent de cette transformation. Il craignent que les socialistes n’oublient la justice sociale pour s’occuper exclusivement des mœurs. Ils ont raison. C’est bien ce qui se passe. Les socialistes pensent qu’ils feront oublier la pauvreté et l’illettrisme en libérant tout à fait les mœurs : après tout, il s’agit toujours d’émancipation. Mais il n’est pas sûr que le chômeur de très longue durée sera tout à fait consolé de pouvoir bientôt coucher avec sa mère et manger son père, comme dit le poète. Il est probable aussi que cette décision de "faire sauter tous les tabous" (cette fois je cite la vulgate médiatique) aura des conséquences désastreuses en terme de société, tout autant que le pitoyable programme économique des socialistes. Mais cela mettra plus longtemps à se voir, parce qu’un chômeur qui dort dehors se voit tout de suite, tandis que les catastrophes induites par Sodome et Gomorrhe se comptent en termes de perte d’âme (espèce nuageuse, inaccessible, et qu’on peut dire fictive) – et cela pourrait permettre à des gouvernants désastreux d’habiter encore les palais pendant longtemps.

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