Et le vilain petit secret des athlètes des épreuves d'ultra-endurance n'est pas de savoir mieux supporter la douleur<!-- --> | Atlantico.fr
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©EZRA SHAW / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

N'ayez plus honte d'être des petites natures…

Une université norvégienne a mené des travaux et des recherches sur la douleur des sportifs. Quelles sont les conclusions de ces recherches ? Quelles activités sportives tolèrent davantage la douleur ?

Jean-Pierre de Mondenard

Jean-Pierre de Mondenard

Jean-Pierre de Mondenard est un médecin du sport français. 

Il a exercé à l'Institut national des sports de 1974 à 1979 et suivi en tant que médecin la plupart des grandes épreuves cyclistes, notamment le Tour de France à trois reprises de 1973 à 1975 où il était en charge des contrôles anti-dopage.

Il est l'auteur d'une quarantaine d'ouvrages de médecine du sport dont six sur le dopage sportif. Il est l'auteur du livre : Tour de France : tous dopé ? (Editions Hugo doc, 2011) ainsi que de "Dopage dans le football, la loi du silence", éd. Gawsewitch, 2010, "33 vainqueurs du Tour de France face au dopage", éd. Hugo-Sport, 2011, "Histoires extraordinaires des géants de la route", éd. Hugo-Sport, 2012, "Les Grandes Premières du Tour de France", éd. Hugo-Sport, 2013

 

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Atlantico.fr : L’Université norvégienne de Tromsø a réalisé 3 tests de douleur avec des joueurs de football de niveau national, des athlètes d’endurance d’élite, et des personnes non sportives. En quoi consiste cette expérience, et que peut-on en conclure sur la douleur des sportifs ?

Jean-Pierre de Mondenard : Dans la première étude, les sujets trempent la main dans de l’eau quasiment glacée. Les athlètes d’endurance tiennent plus longtemps que les footballeurs et les sédentaires. Donc les différences, c’est que les athlètes arrivent à tenir pour la majorité 3 minutes alors que les footballeurs sont moins bons que les sédentaires. L’adaptation au froid et à la thermorégulation est beaucoup plus développé chez les coureurs de fonds que chez les footballeurs et les gens qui n’ont pas une activité physique régulière, soutenue. Donc c’est concordant avec ce que l’on sait. Faire une course de fond, ça dure beaucoup plus longtemps qu’un match. Ils courent quelques heures, alors qu’un match, cela ne dure que 90 minutes. Donc la vascularisation  des extrémités est beaucoup plus développée chez les coureurs de fonds que chez les footballeurs et les sédentaires. Donc, il n’y a rien de surprenant dans ce résultat.

Ensuite pour le second test, ils ont testé la douleur et les températures élevées, donc l’inverse du premier test. Là aussi, ceux qui résistent le mieux, ce sont les footballeurs et les coureurs de fonds. Donc le fait de s’entraîner, de dépenser de l’énergie, cela augmente la chaleur du corps. Donc votre corps est très adapté à subir des températures extrêmes. Il y a la vascularisation cutanée qui est beaucoup plus développée chez les sportifs et notamment les sportifs de fonds. Les sujets devaient appliqué une thermode en aluminium sur leur avant-bras puis appuyer sur un bouton pour augmenter la chaleur. Cela commençait à 90 degrés et cela pouvait monter jusqu'à 126 degrés. Les footballeurs sont assez haut (117.7 degrés), mais les athlètes le sont un peu plus (118.2 degrés), alors que les sédentaires n'ont tenu que jusqu'à 115.8 degrés. Et la thermorégulation d’un corps à l’effort est beaucoup plus pointue que ceux qui ne font pas d’efforts. Les athlètes sont confrontés à des températures extrêmes, ils sont donc plus adaptés à lutter contre ces températures extrêmes.

Concernant la troisième étude, ils ont mit une électrode chauffante pendant 30 secondes à 117.5 degrés. Donc ils devaient répondre sur la douleur qu'ils ressentaient sur une échelle de 0 à 100. Donc le ressenti est aléatoire car la perception de la douleur est différente selon les individus. Là, c’est une interprétation. Le score moyen pour les athlètes est de 45 sur 100. Les joueurs de foot étaient à 51.9, alors que les non-athlètes étaient à 59.9. Donc, c'est toujours la même histoire. Quand vous avez déjà vécu l’événement, vous avez une appréciation différente, et le deuxième test, ils ont des scores inférieurs en disant que la douleur était moins forte. Donc aller plus loin par rapport à l'étude, c'est compliqué. En résumé, les 3 études sont concordantes au niveau des résultats pour les 3 types de personnes testées. C'est normal que les coureurs de fonds soient moins sensibles à la douleur que les footballeurs et les sédentaires.

Quels sports tolèrent davantage la douleur ? Quels sports en tolèrent le moins ?

Plus vous allez vers les sports de hauts niveau, et plus vous vous adaptés à la douleur. Dans les sports de fonds, c'est celui qui résiste le plus à la douleur qui est gagnant. Et il faut masquer les stigmates de la douleur pour pas que notre adversaire s'imagine que nous sommes prêts à lâcher. Il faut donc toujours avoir un comportement de gagnant. Les grands champions, ce sont eux qui vont plus loin que les autres dans la douleur . Donc, c'est l'aspect mental qui fait la différence. D'ailleurs, il y a un médecin qui disait que l’entraînement, c'est 90 % le physique, et 10 % le mental, alors que la compétition, c'est 90 % de mental et 10 % le physique. Donc, avec le mental, il faut savoir souffrir plus que les autres, donc c'est aussi un apprentissage. Et ces sports-là, ce sont les sports de combat avec la boxe par exemple. Dans tous les sports et notamment de haut niveau, le mental joue un rôle déterminant car ces sportifs s’entraînent tous à fond et de plus en plus. Donc le mental joue un rôle fondamental car c'est la résistance à la douleur qui est l'élément majeur.

Dans les sports qui tolèrent moins la douleur, il y a notamment le curling, le tir, le tennis de table... Ceux qui gagnent, ce sont ceux qui vont plus loin dans la douleur. Ces personnes là n 'ont pas les mêmes douleurs que ceux qui courent des marathons ou une étape du Tour de France.

Sur le rapport à la douleur, est-ce que c’est inné ou est-ce qu’on l’obtient en pratiquant un sport en particulier (un sport violent par exemple) ?

Si nous sommes dans un sport où on prend des coups, le fait de pratiquer un sport de combat, ça va nous aider à mieux gérer la douleur. En revanche, si nous faisons du marathon, je ne suis pas sûr que ça va nous aider beaucoup. Mais en même temps, c'est également vrai que la boxe, on boxe avec les bras, et en courant, on boxe avec les pieds. Donc la multitude de coups que l'on a lors d'un marathon, ça se compte en milliers. Ces coups interviennent aussi dans la sécrétion des endorphines.

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