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En quoi l’arrivée des Verts va-t-elle changer la gestion des communes ?
©JEFF PACHOUD / AFP

Atlantico Business

Le résultat des élections municipales confirme la montée des écologistes qui vont devenir incontournables dans la gestion de beaucoup de municipalités. Mais les Verts ne vont pas bouleverser la politique municipale, qui répond davantage à des contraintes très pragmatiques qu’à des objectifs idéologiques.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les élus « Verts » sont devenus, sinon majoritaires, du moins incontournables dans beaucoup de conseils municipaux et principalement, dans la gouvernance des grandes métropoles. A Paris, ils étaient déjà omniprésents, ils vont le devenir à Bordeaux, Lyon, Marseille, Lille ou Strasbourg.

La montée des électeurs verts n’a surpris personne, notamment après leur score aux élections européennes. Ils sont partout. Leurs « influenceurs » comme Nicolas Hulot et leurs dirigeants comme Yannick Jadot sont devenus des stars, notamment chez les jeunes et les CSP+, gros utilisateurs de réseaux sociaux et de marché bio.

Cette progression en France correspond à l’air du temps qui souffle dans beaucoup de démocraties occidentales et notamment celles du Nord. Elle est principalement liée au risque probable du réchauffement climatique de la planète et à la conviction que ce phénomène serait du essentiellement à l’activité humaine. C’est l’activité de production dans tous les domaines et tous les secteurs qui engendrent des émissions de gaz carbonique dans une quantité supérieure à celle que la nature peut digérer.

Aucun de ces phénomènes n’a encore été prouvé scientifiquement mais il existe un consensus assez fort chez les experts pour le penser. Dont acte !

A partir de ce double phénomène se sont développés des courants de pensée pour mettre en œuvre des politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre, avec des considérations sociales pour lutter contre les inégalités engendrées par la croissance économique et la consommation.

Ces mouvements ont eu d’autant plus de succès que leur promesse touchait directement à l’amélioration de la qualité de vie quotidienne  (la qualité de l’air qu’on respire, la sécurité énergétique, le retour à la nature, simple et hygiénique), bref les mouvements écologistes ont laissé penser aussi que le bonheur personnel ne dépendait pas uniquement de la quantité des biens produits et consommés.

Ces mouvements ont été également portés sur le terrain électoral par l’effondrement des partis politiques traditionnels qui n’ont pas su apporter des réponses cohérentes aux problèmes ou aux enjeux de la modernité.

C’est ainsi qu’en France , les Verts ont siphonné les partis de gauche et on le voit clairement dans les résultats électoraux. La gauche a disparu ou elle s’est alliée. Tout comme la droite et le centre qui ont été siphonnés par un ovni du marché politique, Emmanuel Macron.

Maintenant, il ne faut pas croire que les Verts arrivent au pouvoir dans les grandes villes pour bouleverser les administrations, les gouvernances et les politiques. Il y a chez les écologistes et leurs électeurs un décalage d‘analyse et de préconisation.

Qu‘ils le reconnaissent ou pas, les écologistes ont une empreinte idéologique très forte. La majorité d’entre eux ont la conviction que les problèmes écologiques sont les résultats du fonctionnement du capitalisme et donc de la croissance économique. Les plus radicaux pensent qu‘il faut changer de système, interdire la concurrence dont ils ne reconnaissent pas les vertus pour produire du progrès, interdire la production d’énergies fossiles au profit du renouvelable et surtout réorienter la consommation individuelle. Bref, les outils préconisés par les écolo-radicaux conduisent les sociétés sur la voie de la décroissance et des injonctions liberticides le plus souvent.

La majorité de ceux qui votent écologistes ne souhaitent pas un changement aussi radical, ils souhaitent des régulations douces, ils souhaitent surtout préserver les potentiels de croissance parce que cette croissance leur apporte le progrès technologique et sanitaire.

Arrivés au pouvoir, les avocats de l’écologie savent très bien que les responsabilités que leur impose l’exercice du pouvoir, les obligent à limiter ou raboter leurs ambitions de réforme. La ville qu‘ils vont gérer doit être propre, avec des mobilités faciles, des écoles qui fonctionnent dans lesquelles les enfants doivent apprendre à lire, à écrire et à respecter les autres, et des hôpitaux qui répondent aux besoins.

Pendant toute la pandémie que l’Occident vient de traverser, on ne peut pas dire que les dirigeants écologistes ont débordé d’imagination et d’énergie pour lutter contre le covid. Ils n’ont pas apporté de solutions nouvelles. Ils ont même participé à la demande générale de trouver des masques, des traitements et des vaccins alors que beaucoup d’entre eux appartiennent à des associations qui défendent la médecine naturelle et s’opposent aux vaccins.

Devant le mur de la réalité des risques, les écolos ont eu peur comme les autres. Les plus audacieux ont simplement essayé d’expliquer que le covid était un pur produit de la mondialisation, sauf qu‘ils n’ont pas refusé les masques et les traitements fabriqués en Chine.

« L’exercice du pouvoir impose aux gouvernances la prise en compte des besoins réels des gouvernés, disait Machiavel et si cette prise en compte oblige à s’asseoir sur certaines de ses convictions, la gouvernance n’a que deux solutions, ou elle s’assoit ou elle s’en va. »

A Paris, à Lyon, à Bordeaux ou à Strasbourg... Les élus Ecologie-les Verts savent bien que concrètement leur ville doit être plus belle, plus respirable, plus vivable et cela pour le plus grand nombre. Ils savent aussi que la ville doit être attractive, désirable pour les habitants, les touristes et les investisseurs. Sans investisseurs, la ville n’est qu’un champ de ruine et de misère. Il suffit de relire Zola ou Dickens... Aucun écolo aujourd’hui, dans ses rêves les plus fous, ne voudrait d’une ville en ruine ou misérable.

Les écolos dans les villes ne changeront pas la ville. Ils se changeront eux-mêmes. En Allemagne, les mouvements verts pèsent très lourd dans la gouvernance locale ou fédérale. A leur arrivée au pouvoir il y a plus de dix ans, les écologistes avaient exigé et obtenu la fermeture des centrales nucléaires. Aujourd’hui, l’Allemagne est devenue le pays en Europe le plus émetteur de gaz carbonique puisqu’elle a dû rouvrir des centrales au charbon. En plus, l’Allemagne s’approvisionne en électricité en France parce que ses centrales ne suffisent pas. L’Allemagne gouvernée par des Verts dépend du nucléaire français et pollue le reste de l’Europe avec son charbon.

Angela Merkel, qui passe en Allemagne pour avoir particulièrement bien managé la lutte contre le coronavirus, vient d’obtenir de ses partenaires verts la possibilité de fermer progressivement les centrales au charbon et de recouvrir des centrales nucléaires. Il n’y a guère eu de communication de peur de ne vexer personne.  Comme quoi, la crise rend intelligent, parfois.

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