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Emmanuel Macron, ce "Dom Juan asexué", qui séduit, utilise... puis jette
©PASCAL GUYOT / AFP

Bonnes feuilles

Depuis qu'il est enfant, Emmanuel Macron – ce candidat aux allures de Petit Prince virtuel – a toujours été désigné et reconnu comme le meilleur. Il a trouvé dans le regard des autres, et plus spécifiquement de ses aînés, l'admiration, l'encouragement, la bienveillance. Et il y a maintenant le regard des Français, qu'il entend séduire avec la même détermination, en bousculant les convenances et en leur déclarant qu'il les aime...Extrait de "Emmanuel Macron, un jeune homme si parfait" d'Anne Fulda, aux Editions Plon (1/2).

Anne Fulda

Anne Fulda

Anne Fulda est grand reporter et responsable de la rubrique Portraits au Figaro. Elle a publiéUn président très entouré (Grasset) et François Baroin, le faux discret (JC Lattès).

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Ce travers ne date pas d’hier  : depuis qu’il est petit, Macron veut toujours convaincre, plaire, « retourner » ceux qui, a  priori, ne l’aiment pas. Comme cette professeur de piano qui lui avait fait rater son concours au conservatoire d’Amiens et avec laquelle il avait expressément demandé de repasser l’année suivante. Pour, cette fois, réussir l’épreuve.

Le besoin d’être admiré, de recueillir l’assentiment de ceux qu’il côtoie, et plus particulièrement de ses aînés, de ceux qui détiennent un pouvoir qu’il n’a pas le pouvoir du savoir. Le pouvoir intellectuel, puis économique et politique. Il veut tous les conquérir, les embrasser. Pour être reconnu, adulé, admiré. Pour obtenir cette petite dose d’adrénaline que l’on trouve, en politique mais aussi en banque d’affaires – « reconnaît-il, il y a des moments de conquête, de chasse, mais différents de ceux de la politique ». En fait, Emmanuel Macron est comme un Dom Juan asexué. Ou, plus exactement, un Dom Juan aux yeux duquel la conquête, la séduction ne sont pas sexuées, ni liées à l’accumulation de conquêtes féminines, mais correspondent plutôt à une sorte de réassurance narcissique perpétuelle. À un besoin pathologique de séduire. De convaincre. De renouveler sans cesse les commencements exaltants. C’est le sentiment qu’exprime Dom Juan, pour qui «les inclinations naissantes, après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l’amour est dans le changement».

À se demander si Emmanuel Macron ne fait pas tout pour retrouver, toujours et encore, le regard de Manette, sa grand-mère adorée. Ce regard qui l’a porté, l’a approuvé, et émancipé.

Un regard qu’au fil des ans l’étudiant retrouvera chez des personnes souvent plus âgées que lui. Des aînés, des « sachants », des puissants. Les seuls qu’il reconnaît. Les seuls qui le reconnaissent aussi, apprécient sa culture, son intelligence, son esprit de synthèse, sa maturité... sans tomber dans le rapport inévitable de compétition, de rivalité, qui peut exister chez ses contemporains, ceux de son âge qui, au fond, ne l’intéressent pas vraiment, car pas de la même planète.

La liste des aînés subjugués par «le petit Macron» –  avant d’avoir, parfois, l’impression de  « s’être fait détrousser comme des petites vieilles » – est longue. Et s’est constituée tôt.

Avec, d’abord, toute une kyrielle de professeurs enamourés. À La Providence, où cet élève singulier qui semble déjà tout savoir charme ses profs auxquels il s’adresse d’égal à égal et avec lesquels il discute après les cours. Il est tellement doué et apprécié, «Manu », que l’un de ses anciens enseignants, Léonard Ternoy, professeur de lettres interrogé par Vanity Fair en février 2017, raconte que sa fille a souffert de son admiration pour Emmanuel. «Elle avait un an de plus. Elle préparait son bac français et je parlais à table du  jeune Macron si exceptionnel», raconte-t-il à Claude Askolovitch. Sans revenir, évidemment, sur le charme exercé sur sa prof de théâtre..., ce n’est que le début d’une longue série, les prémices d’un éternel recommencement.

À Sciences-Po, antichambre de l’ENA où il est entré après son échec à Normale – s’inscrivant en parallèle en philo à Nanterre  –, son professeur, l’historien François Dosse, auteur d’une biographie sur Paul Ricœur, le repère vite. «Il intervenait très brillamment et facilement [...] et avait notamment la capacité de faire la synthèse entre les différents enseignements », dit-il . C’est lui qui lui présente le philosophe Paul Ricœur, à l’époque en quête d’un étudiant capable de classer ses archives. Une rencontre fondatrice, selon Macron, qui en parle avec les termes exaltés du disciple au maître : «Nous ne nous sommes plus quittés. Je lui dois quelque chose d’immense  : la confiance. J’avais 21 ans, je ne savais rien et un homme de plus de 80 ans, monument de la philosophie, acceptait que je le relise, répondait à mes arguments et me jugeait digne d’avoir avec lui un dialogue intellectuel permanent», explique-t-il dans une interview à L’Obs . Et d’ajouter : «Quand je suis avec vous, me disait-il, j’ai l’impression d’être avec un contemporain. C’est inoubliable.» Inoubliable et révélateur de l’effet qu’a souvent provoqué Emmanuel Macron, avec son physique et son enthousiasme juvéniles, sur des personnes plus âgées que lui. Est-ce l’impression de remonter le temps, de parler avec un petit jeune comme si celui-ci était de la même génération?

Celui que Julien Dray surnomma en riant «le dragueur de vieux» a, visiblement, un talent particulier pour charmer ses aînés. Emmanuel, témoigne un ami de l’ENA, «s’est toujours appuyé sur des gens de générations au-dessus. Il se produit quelque chose du registre de la cure de jouvence pour eux. Ils aiment être courtisés par un jeune ambitieux. C’est un processus de séduction assez impressionnant. Emmanuel a besoin qu’autour de lui l’œil frétille, s’allume. Lui séduit, utilise puis jette. Il a d’ailleurs très peu d’amis en dehors de Marc Ferracci». Que ce soit volontaire ou non, naturel ou calculé, Emmanuel a indéniablement «un truc extra, qui fait crac boum hue », comme chantait Dutronc. Il possède l’incroyable capacité de donner l’impression d’être proche de son interlocuteur. Il nimbe toutes ses relations professionnelles d’une chaleur, d’une attention à l’autre bien peu communes dans les sphères du pouvoir.

À l’ENA, à Strasbourg – où il fait partie d’une bande issue de la désormais fameuse promotion Senghor, qui rassemble de futurs espoirs de gauche et de droite comme Boris Vallaud, plus tard secrétaire général adjoint de l’Élysée de François Hollande, Sébastien Veil, le petit-fils de  Simone Veil, dont la future femme, Sybille, également à l’ENA, travaillera pour Nicolas Sarkozy, Sébastien Proto, qui œuvrera également pour Sarko à l’Élysée et est aujourd’hui banquier chez Rothschild, Mathias Vicherat...  –, il avait ainsi coutume de claquer la bise sans compter et de serrer la main à tout-va. À la concierge, aux appariteurs, à tout le monde, « comme s’il était en campagne ». Il s’exclamait même «Bonjour ma poule !» rappellent certains... en précisant que c’était une proximité de façade.

À l’époque, le jeune homme aimait plaisanter mais faisait tout de même sentir que, à vingt-cinq ans, sa vie était ailleurs. Qu’il avait des responsabilités, des beaux-enfants, des petits-enfants, même. Tout en donnant des cours de théâtre! Il ne restait jamais le week-end sur place et gardait toujours une espèce de distance envers sa bande de copains, plutôt amateurs de blagues potaches et de soirées entre karaoké et Académie de la bière. Preuve qu’ils n’étaient pas dupes, un jour, ses camarades de promo piratèrent sa boîte mail et envoyèrent un message signé de lui avec comme texte : «Chers tous, vous me voyez tous les matins, je vous fais la bise, je vous souris mais, au fond de moi, je vous méprise profondément.» Macron avait ri... jaune.

Extrait de "Emmanuel Macron, un jeune homme si parfait" d'Anne Fulda, aux Editions Plon

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