DSK ou l’histoire d'un homme dont l’entourage a toujours eu plus d’ambition pour lui que lui-même<!-- --> | Atlantico.fr
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DSK a fait un retour remarqué sur Twitter.
DSK a fait un retour remarqué sur Twitter.
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"Jack is Back!" sur Twitter

En 2011, alors que DSK lançait à peine sa campagne, les proches de l’ancien patron du FMI semblaient plus motivés que lui. Dominique Strauss-Kahn ne paraissait alors pas prêt à faire les sacrifices nécessaires pour conquérir l’Elysée. Aujourd’hui, ils ont été recasés par François Hollande, laissant seul leur ancien mentor et obérant son retour en politique.

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand, journaliste politique à Atlantico, suit la vie politique française depuis 1999 pour le quotidien France-Soir, puis pour le magazine VSD, participant à de nombreux déplacements avec Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, François Bayrou ou encore Ségolène Royal.

Son dernier livre, Chronique d'une revanche annoncéeraconte de quelle manière Nicolas Sarkozy prépare son retour depuis 2012 (Editions Du Moment, 2014).

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C’est un tweet qui sonne comme une menace. Trois mots qui claquent, comme un coup d’épée dans l’air : Jack is back ! Mais qui est ce Jack ? DSK lui-même bien sûr mais encore ? Twittos et journalistes  ont passé la journée de lundi à émettre les propositions les plus érudites : serait-ce le Jack de la chanson Hit the Road Jack ? Un homme de mauvaise vie chassé par sa femme. Le Jack de Shinning  ou Jack Bauer de 24 heures chrono ?  A moins que ce ne soit Jack Sparrow, le héros de Pirates de Caraïbes. Le visage barbu de DSK façon vieux loup de mer qui illustre le tout nouveau compte de DSK pourrait accréditer cette thèse.

On l’imagine, en tous cas, derrière son ordinateur, souriant d’aise en lisant ces suppositions plus ou moins crédibles. Et observant le chiffre de ses followers gonfler sans cesse : 28 000 à 11h, 31 000 à 15h00, 34 000 à 18h00… Ce premier pas dans le monde depuis 2011 est un succès.  Le but recherché est atteint : créé l’envie en laissant planer le doute. Jack is back mais pour quoi faire ? De l’économie ? De la politique ? Revient-il pour régler ses comptes avec tous ceux qui ont oublié de le soutenir ? De quoi mettre en transe l’Elysée, Matignon jusqu’à la rue de Solférino où l’on se demande si l’ancien directeur du FMI n’aurait pas envie de livrer la bataille qui lui a été ravie un jour de mai 2011 ? Mais DSK a-t-il encore le gout du risque ? Rêve-t-il toujours de pouvoir. En a-t-il jamais rêvé ?

Déjà en 2011, la question était sur toutes les lèvres. La star des sondages avait-elle vraiment envie des ors de la République. Alors qu’une subtile campagne de teasing est lancée lui ne dit rien de ses ambitions. Certes, on l’aperçoit, au détour d’un documentaire d’auto promo, revêtu d’un tee-shirt barré du slogan Yes We Kahn, mais ces images donnent surtout la mesure de l’ambition du petit groupe qui est alors à l’œuvre autour de l’ancien patron du FMI. On les appelle la firme, à l’instar du groupe qui entourait Nicolas Sarkozy en 2007 : Stéphane Fouks, patron de l'agence Euro RSCG, Gilles Finchelstein, ancienne plume de DSK à Bercy et collaborateur d'Euro RSCG, Anne Hommel, attachée de presse de DSK, collaboratrice elle aussi d'Euro RSCG, et Ramzi Khiroun, porte-parole du groupe Lagardère. Ils sont plus que de simples exécutants ce sont des amis du couple Strauss-Kahn-Sinclair, partageant notamment des vacances dans leur riad de Marrakech. Ils s’apprêtent à tout donner pour battre Sarkozy et installer DSK à l’Elysée.  Anne Sinclair, dit-on alors, est aussi à la manœuvre. Elle rêve d’un destin de première dame. Stéphane Fouks, lui, voit ainsi le moyen d’assoir son influence et celle de son agence. Une sorte de donnant donnant de bonne guerre.

Dans les salons parisiens, le monde politique s’agite aussi, beaucoup ont flairé la poule aux œufs d’or. Pierre Moscovici vante les mérites de celui dont il espère devenir le premier ministre. Jean-Christophe Cambadelis et Jean-Marie le Guen n’épargnent, eux non plus, pas leur pleine. Un poste de ministre les attend au bout du chemin. Tous expliquent, avec conviction, que leur poulain est habité par l’envie de gouverner, qu’il rêve de l’Elysée et de ses conseils des ministres. Ils l’expliquent tellement haut et tellement fort qu’ils semblent vouloir cacher un doute. Celui-ci explosera à la face du monde lorsque sera annoncée l’arrestation de DSK à New-York. Comment un homme habité par l’envie de présider un pays, de gagner une campagne qui s’annonce rude, peut-il prendre de tels risques ?

Avait-il tellement envie de cette bataille ? Etait-il prêt aux sacrifices nécessaires, à mouiller la chemise de meeting en meeting ? Ses proches, la Firme, Anne Sinclair et tous ceux qui avait politiquement beaucoup à y gagner ne rêvaient-il pas tout haut à la place de leur mentor ? Et qu’en est-il aujourd’hui ? Après tant d’épreuves, l’ancien président du FMI imagine-t-il seulement un retour en politique alors que ces amis, eux, ont aujourd’hui d’autres intérêts car ils ont bénéficié à plein de la générosité d’un François Hollande pas totalement désintéressé ? Jean-Christophe Cambadelis, vient d’être élu premier secrétaire du PS.  Julien Dray, qui avait été chassé de l’entourage de François Hollande par Valérie Trierweiler furieuse de sa proximité avec DSK, est lui aussi de retour pour préparer la future campagne présidentielle. Pierre Moscovici officie à la Commission Européenne et semble en être ravi. Jean-Marie le Guen a été nommé ministre. Quant à Stéphane Fouks, très proche de Manuel Valls, il bénéficie désormais d’une oreille attentive en très haut lieu. Jack is back mais les Strausskahniens ne l’ont pas attendu. Reste à savoir quel sera l’accueil qu’ils vont lui réserver. Et plus largement comment va l’accueillir la grande famille socialiste ?

François Rebsamen, qui en 2011, hésitait entre Hollande et DSK soulignait en mai dernier le «talent d'économiste incroyable» de l'ancien patron du FMI. Plus récemment Jack Lang affirmait : « si lui-même souhaite entreprendre un nouveau combat politique, il sera le bienvenu. C'est un homme d'une grande compétence, un homme brillant, intelligent, qui a une connaissance en particulier de l'économie mondiale ». Les autres, les plus proches, en revanche, sont restés silencieux. Car au fond, ceux qui l’ont soutenu en 2011, qui ont parfois rêvé à sa place, savent qu’aujourd’hui le retour du grand homme semble bien improbable. Les sondages ne sont pas bons car son image personnelle est extrêmement dégradée. Les français reconnaissent sa compétence, son intelligence mais il apparaît comme un homme immoral et misogyne.  Mais surtout, l’absence de primaire à gauche prive l’ex favori des sondages de porte d’entrée. S’il revient en politique, son retour se fera par la petite porte, pas les coulisses même. En 2012, il a déjà joué les conseillers occultes à la demande de François Hollande. Il avait alors rencontré Angela Merkel,  Martin Schulz et Jean-Claude Juncker à qui il aurait vendu «un bon deal», ménageant les intérêts allemands comme les projets des socialistes français. Reste à savoir s’il a encore envie d’œuvrer pour un camp qui l’a bien peu soutenu dans l’épreuve.

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