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Didier Maïsto : « J’étais aux côtés de Jérôme Rodrigues lorsqu’il a été blessé. Ce qui s’est passé est incompréhensible »
©Zakaria ABDELKAFI / AFP

Violences policières

Jérôme Rodrigues, figure du mouvement des Gilets Jaunes, a été blessé à l’oeil par les forces de police alors qu’il filmait la manifestation du 26 janvier, place de la Bastille à Paris.

Didier Maïsto

Didier Maïsto

Didier Maïsto est le président de Fiducial Médias et de Sud Radio.

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Atlantico : Jérôme Rodrigues, figure du mouvement des Gilets Jaunes, a été blessé à l’oeil par les forces de police alors qu’il filmait la manifestation de cet après-midi Place de la Bastille. Que s’est-il passé exactement ?

Didier Maïsto : Tout au long de la journée, la manifestation a été extrêmement pacifique (ndlr : place de la Bastilles samedi des échauffourées entre certains GJ et les forces de l'ordre ont eu lieu durant deux heures, le groupe dont faisait parti Jérôme Rodrigues était quant à lui pacifique et il ne participait à aucun débordement lorsqu'il a été blessé). Au fil de mes Facebook Live, je n’ai cessé de dire que, par rapport à l’acte X, la police avait changé de stratégie. Les ordres avaient été mieux donnés, les forces de police étaient présentes mais se faisaient discrètes. Bien entendu, certaines rues étaient bloqués pour des questions de sécurité, mais tout se déroulait parfaitement bien.

Lorsque le cortège et moi-même sommes arrivés à la Place la Bastille, c’était légèrement plus tendu probablement en raison des black bloc déjà présents sur place. Ces derniers, contrairement aux Gilets Jaunes, étaient là pour en découdre, “casser du flic”, et s’en étaient déjà pris au mobilier urbain. Tous habillés en noirs et sans rapport aucun avec le reste des manifestants, ils avaient d'ores et déjà été maîtrisés par les policiers.

Au moment où l’incident est arrivé, j’étais à une dizaine de mètres de Jérôme Rodrigues. Nous étions tous les deux en train de filmer la manifestation. La police a soudainement lancé des grenades de désencerclement et des bombes lacrymogènes. J’ai vu une quinzaine de CRS courir et armer leurs flash-ball. D’un coup j’ai entendu un bruit sourd et j’ai vu Jérôme Rodrigues tomber à terre. Le samu est arrivé, et il a été amené à l’hôpital.

Il s’agit là d’une figure phare du mouvement, et qui plus est quelqu’un de très pacifique. Il défendait régulièrement la police, rappelant le nombre de suicides policiers et le fait qu’ils étaient, eux aussi, à bout. En quelques mots : il appelait à rester calme. Ainsi, tout le monde a été très choqué, peut être encore plus parce que tout le monde le connaissait.

L’attitude des CRS, alors que les black block étaient pourtant déjà arrêtés est donc incompréhensible, c’est une grave erreur.

Quelle était l’atmosphère de la manifestation ? Pourquoi les forces de l’ordre ont fait usage de lanceurs de balles de défense et de bombes lacrymogènes ?

Comme je l’ai dit précédemment, pendant la totalité de la manifestation -avant l’arrivée Place de la Bastille- tout se déroulait parfaitement. Nous n’avons presque pas vu de policiers.

Même dans les endroits propices aux débordements, rue du Faubourg Saint Honoré ou Place Vendôme, par exemple, tout avait lieu dans le plus grand calme. Idem, avec les cortèges syndicaux : tout s’est bien passé alors que l’on pouvait craindre que Gilets Jaunes et syndicalistes ne se mélangent pas. Et pourtant si, et le tout avec mot d’ordre : la grève générale du 5 février prochain.

Tout était très bon enfant, ce qui une fois encore rend l’acte Place de la Bastille absolument incompréhensible. Il est fort probable que le policier responsable du tir était mal entraîné.

Quels étaient , selon vous, les ordres qui avaient été donnés aux policiers et CRS ?

Je n’ai pas eu d’informations particulières quant aux ordres qui avaient été donnés aux forces de l’ordre, mais de ce que j’ai vu, il ont complètement changé entre le début et la fin de la manifestation.

L’exécutif avaient probablement demandé aux policiers d’être discrets, de maintenir l’ordre sans faire de vague. Quand il y avait des individus un peu problématiques, ils les mettaient gentiment de côté. De ce fait, le contraste entre la manifestation et le tir qui a blessé Jérôme Rodrigues est frappant. D’autant plus, qu’avec la force du tir, son bruit, on aurait pu croire qu’il s’agissait d’un tir de sniper.

La brutalité du geste a frappé. Jérôme Rodrigues était adoré, donc il faut s’attendre à un vive réaction de la part des Gilets Jaunes. Il va probablement falloir les raisonner, faire en sorte qu’ils ne se radicalisent pas après l’extrême brutalité d’aujourd’hui. D’autant plus qu’ils ont l’impression d’être constamment accusés à tort de tout et de rien : fascisme, violence…

Il va ainsi falloir leur fournir des explications. L’enquête de l’IGPN est ouverte mais l’exécutif va également devoir fournir des réponses valables ou des excuses. Il n’est plus question de minimiser quoi que ce soit, d’autant plus qu’ils ont fait Jérôme Rodrigues un martyre.

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