Dérèglement climatique : mais pourquoi sommes-nous incapables de voir que nous sommes de bons élèves en matière de réduction de CO2 ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Dérèglement climatique : mais pourquoi sommes-nous incapables de voir que nous sommes de bons élèves en matière de réduction de CO2 ?
©PHILIPPE DESMAZES / AFP

Masochisme politique

Les alternatives crédibles pour réduire les émissions de Co2 doivent s'adapter à la situation des pays. En France, remplacer des centrales nucléaires par des énergies vertes à moins de sens que de tenter de réduire la consommation électrique.

Jean-Paul Maréchal

Jean-Paul Maréchal

Jean-Paul Maréchal est Maître de conférences en Science économique à lUniversité Paris Sud. Il est l'auteur de l'ouvrage Chine/USA. Le climat en jeu, Paris, Choiseul, 2011, 116 p.

Voir la bio »

Atlantico : Dans quelle mesure la question de la "transition énergétique" en France passe-t-elle à côté des réels problèmes de la question des gaz à effet de serre ? Quelles sont les priorités, aussi bien géographiquement, que concernant la nature des sources d'émission ?

Jean-Paul Maréchal : Le fait de s'axer sur la question de l'électricité comme on le fait est une façon d'aborder la question qui doit être remise en cause. Dans la mesure où, en France, l'électricité est à hauteur de 95% produite par des énergies qui n'émettent pas de co2. Le nucléaire 75%, ensuite 12% par l'hydroélectricité, 5.6% liés aux panneaux solaires éoliennes, etc… Il nous reste 4% produit par des centrales à charbon. Dans ce contexte, si l'on veut réduire les émissions de gaz à effet de serre, ce n'est pas du côté de la production d'électricité qu'il faut se tourner.

On peut être étonné de voir qu'on a toujours tendance à connecter la question de la production d'électricité en France avec celle de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ce n'est pas pertinent. Dans la mesure où si l'on produit de l'électricité avec des panneaux photos voltaïques et que l'on ferme une centrale atomique, on remplace une source qui n'émet pas de Co2 par une autre qui n'en émet pas non plus. Donc à l'arrivé, la réduction d'émission de Co2 est égal à 0.

Ce raisonnement n'est pas valable dans tous les domaines cela dit. On peut agir sur l'isolation des bâtiments, sur la consommation des voitures ou là, ce sont des dispositifs qui utilisent des énergies fossiles.

Le groupe de recherche CoalSwarn a identifié la construction de centrales au charbon en Chine, contrairement aux engagements du pays. En quoi cette information peut-elle rendre vaine nos réflexions concernant nos habitudes de consommation ?

Effectivement le rapport montre que les Chinois construisent des centrales à charbon alors que l'idée était de plafonner les émissions de Co2 autour de 2030. Ça ne veut pas forcément dire que ça ne va pas être fait. Mais on sait qu'elle exporte des centrales à charbon le long de la nouvelle route de la soie. Là, même si la Chine n'émet pas directement du Co2 sur son territoire elle le fait en exportant. Donc s'il s'avérait que la Chine mette en service autant de centrales à charbon qu'indique le rapport, il est clair que cela poserait un problème pour réaliser les objectifs des accords de Paris.

La Chine aujourd'hui, c'est un peu plus de dix milliards de tonnes d'émission de Co2 rejeté par l'utilisation de combustibles fossiles, (on ne tient pas compte de l'agriculture). Voilà ce que ça représente. Il s'agit d'à peu près un peu moins de 30% en 2015 des émissions totales de Co2 dans le monde.

Tout ça, il faut le confirmer mais il faut comprendre que nous avons un effet d'échelle. La Chine, son mix énergétique, c'est à 66% fondé sur le charbon. Ce pourcentage est resté le même au court des 40 dernières années sauf que la Chine consomme et produit beaucoup plus d'énergie aujourd'hui qu'en 1970. En 1990 c'était 2 milliards de tonnes de Co2 au total. Aujourd'hui, c'est 10 milliards. Soit cinq fois plus en l'espace d'un quart de siècle. En comparaison, la France émet 333 millions de tonnes. 5 milliards pour les Etats-Unis. L'inde 2 milliards, la Russie 1.7.

Au regard de la réalité de ces enjeux, quelles sont aujourd’hui les alternatives crédibles en termes énergétiques ?

Pour être efficace, il faut partir de la situation de chaque pays. Qui n'est pas la même. Le programme qui va être mis en œuvre doit s'adapter. Concernant la Chine, il est évident que pour réduire les émissions de Co2, le fait de recourir à des énergies vertes types éoliennes et électricité nucléaire est une bonne idée. Car à ce moment-là, vous remplacez une source qui rejette du Co2, par une autre qui n'en rejette pas.

En revanche quand vous êtes dans la situation de la France, l'effort ne peut pas être porté là-dessus. Il faut plutôt tenter de moins consommer, c’est-à-dire faire en sorte que les dispositifs qui utilisent de l'essence en utilisent moins, avoir des voitures plus économes, des bâtiments chauffés au fuel qui soient mieux isolés, (double vitrage…). Il faut agir là où on utilise des énergies fossiles.

Si on décide de développer les énergies non fossiles, il faut imaginer des plans qui permettent de mettre en œuvre ce type d'énergie là où elles seront les plus performantes. C'est à dire dans des pays où il y a du soleil, ou l'on a un problème de production d'électricité. Il est plus efficace de mettre des panneaux solaires dans des pays ensoleillés avec une faible production d'électricité que dans des pays comme la France ou l'effet sera quasiment nul.

Après, on peut souhaiter mettre en œuvre ces technologies parce que l'on considère que le nucléaire est risqué. C'est une autre problématique. Ce n'est pas la même réflexion.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !