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Convention citoyenne pour le climat : voilà pourquoi les solutions à la Greta Thunberg n’en sont pas
©YOAN VALAT / POOL / AFP

Monde de demain

Les propositions d'Emmanuel Macron évoquées lors de la Convention citoyenne pour le climat sont-elles réalistes ? Les solutions proposées pour baisser les émissions de CO2 ne fonctionnent pas malheureusement. Les innovations technologiques devraient être la clé.

Philippe Charlez

Philippe Charlez

Philippe Charlez est ingénieur des Mines de l'École Polytechnique de Mons (Belgique) et Docteur en Physique de l'Institut de Physique du Globe de Paris.

Expert internationalement reconnu en énergie, Charlez est l'auteur de plusieurs ouvrages sur la transition énergétique dont « Croissance, énergie, climat. Dépasser la quadrature du cercle » paru en Octobre 2017 aux Editions De Boek supérieur et « L’utopie de la croissance verte. Les lois de la thermodynamique sociale » paru en octobre 2021 aux Editions JM Laffont.

Philippe Charlez enseigne à Science Po, Dauphine, l’INSEAD, Mines Paris Tech, l’ISSEP et le Centre International de Formation Européenne. Il est éditorialiste régulier pour Valeurs Actuelles, Contrepoints, Atlantico, Causeur et Opinion Internationale.

Il est l’expert en Questions Energétiques de l’Institut Sapiens.

Pour plus d'informations sur l’auteur consultez www.philippecharlez.com et https://www.youtube.com/energychallenge  

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Fabien Bouglé

Fabien Bouglé

Fabien Bouglé est un expert sur les questions énergétiques. Il est l'auteur de "Guerre de l’Energie au cœur du nouveau conflit mondial" (2023), "Nucléaire : les vérités cachées" (2021) et "Eoliennes : la face noire de la transition écologique" (2019), publiés aux éditions du Rocher.

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Atlantico.fr : Beaucoup d’opinions parfois divergentes sont émises concernant les solutions possibles pour réduire les émissions de gaz à effet de serre en France. Nombreux sont celles et ceux qui pensent que le principal levier est l’innovation technologique.

Le remplacement des énergies fossiles voire du nucléaire par des énergies vertes repose-t-il sur l’innovation technologique ?

Philippe Charlez : Quand on fait un peu d’histoire des sciences, on est très surpris de voir que la plupart des technologies vertes ont été trouvées durant la première moitié du XIXe siècle. Strating, un hollandais a construit la première voiture électrique en 1835 soit 30 ans avant l’invention du moteur à essence, l’électrolyse de l’eau et la pile à combustible bases de la voiture à hydrogène datent respectivement de 1803 et de 1839, l’allemand Hertz a trouvé l’effet photoélectrique base des panneaux solaires en 1888, Diesel et Ford on fait tourner leurs premières voitures avec des biocarburants (huile d’arachide et alcool). La plupart des technologies vertes sont donc matures et souvent antérieures aux technologies associées au charbon, au gaz at au pétrole. Bien entendu elles peuvent être optimisées mais fondamentalement le problème n’est pas technologique. Il s’agit d’un problème d’échelle. Remplacer des énergies aussi concentrées que le gaz, le pétrole ou le nucléaire par des énergies fortement diluées comme le vent ou le soleil demande de mettre en œuvre des quantités démesurées d’équipement. Ainsi, à production d’électricité équivalente, si l’on voulait remplacer les 60 réacteurs nucléaires français, il faudrait mettre en œuvre au choix 125000 éoliennes (ce qui au rythme de 600 éoliennes par an prendrait…200 ans) ou une surface de panneaux solaires égale à 5000 km2 soit la surface de la Haute Loire. Mieux, pour faire voler au solaire un Airbus A80 de 50 MW, il faudrait une surface d’ailes égale à 45 hectares soit…90 terrains de football. Il ne faut donc pas se donner l’illusion que la transition énergétique repose sur l’innovation  technologique. La technologie ne décidera jamais où et quand il y a du vent ou du soleil.

On parle du problème des effets d’échelles concernant la transition des énergies fossiles en énergie renouvelable, pourriez-vous m'en dire plus ?

Fabien Bouglé : La commission Aubert publiée le mardi 26 novembre 2019 par Julien Aubert et Marjolaine Meynier ont établi que les éoliennes n'étaient pas la réponse à la diminution des émissions des gaz à effet de serre. Les énergies renouvelables sont intermittentes. C'est-à-dire que quand elles ne fonctionnent pas (pas de vent, pas de soleil), on doit obligatoirement utiliser en back-up des centrales électriques d'origine fossile (gaz, pétrole ou charbon). 

Nous sommes obligés d'utiliser ces énergies fossiles car les énergies nucléaires ne sont pas pilotables (1 quantité d'Uranium doit être consommée entièrement dans une centrale nucléaire, elle ne peut pas être régulée). On ne peut donc pas coupler les énergies nucléaires et renouvelables. 

Par ailleurs, il existe une contradiction. En effet, plus on utilise de l'électricité d'origine éolienne ou photovoltaïque, plus on est obligé d'utiliser des usines qui fonctionnent et donc d’émettre des gaz à effet de serre. 

L'exemple type est l'Allemagne. Le pays a dépensé 500 milliards d'euros dans sa transition écologique. En 2019, la cour fédérale d'Allemagne a expliqué que malgré ce budget mis en place, l'émission des gaz à effet de serre n'a pas baissé. Elle aussi, est obligée de mettre en route leurs usines au charbon.

Les éoliennes sont une ineptie lorsque l'on dit qu'elles vont remplacer les énergies fossiles. Pour moi, cette information est une fake news pour vendre ces appareils. 

Pour vous, que devrait dire Emmanuel Macron lors de la convention citoyenne se déroulant ce soir ?

Philippe Charlez : L’exercice est périlleux car il faut pouvoir parler vrai sans pour autant donner une impression négative ni entrer dans un discours convenu véhiculant la pensée unique. Je pense tout d’abord que le Président se doit de positiver la situation actuelle de la France qui grâce notamment à son nucléaire possède l’un des mix énergétique les moins carbonés du monde. Rappelons que le citoyen français émet en moyenne deux fois moins que son confrère allemand et trois fois moins que l’américain. Il devrait insister sur le fait que le nucléaire est « le meilleur ami des renouvelables » car il permet de venir en aide aux éoliennes et aux panneaux solaires quand il n’y a ni soleil ni vent et ce sans émettre de CO2. Il doit aussi insister sur le fait que la transition électrique ne représente que le tiers du problème. Parallèlement il faut rapidement lancer deux chantiers majeurs : la rénovation de l’habitat et la transformation des transports. Au risque de froisser les Verts, il se doit aussi d’être prudent en termes d’objectifs long terme. Tous les scénarios sérieux prédisent que le mix mondial contiendra encore une proportion significative d’énergies fossiles en 2040. L’objectif européen de neutralité carbone à cet horizon est un leurre. Il se doit aussi (mais je le pense convaincu sur ce sujet) d’insister sur le fait que, seule, la France ne pourra pas grand-chose. L'Europe est le véritable espace naturel dans lequel peut s'inscrire la transition énergétique. Homogénéisation de la fiscalité, mutualisation des émissions de GES, interconnexion des réseaux de gaz et d'électricité, communautarisation de la R&D sur les renouvelables, le stockage de l'énergie et la captation/stockage du carbone sont autant de thématiques structurantes qu’il faut développer au niveau européen. Enfin il ne doit pas occulter que la transition énergétique aura pour la France comme pour tout autre nation un coût élevé. Les citoyens devront la supporter, chacun suivant ses moyens.

Fabien Bouglé : On ne peut pas, au nom de la transition énergétique ou écologique, détruire le cadre de vie paisible des concitoyens français. Emmanuel Macron doit mettre en avant les innovations technologiques. Celles-ci doivent être subventionnées car elles sont l'avenir et la solution aux problèmes liés à ces émissions de gaz à effet de serre. 

Le président doit d'ailleurs annoncer l'arrêt des éoliennes. La transition écologique ne peut se faire qu'en arrêtant l'éolien car par l’intermittence des éoliennes, on a quand même des émissions de gaz à effet de serre. C'est l'effet inverse de ce que le gouvernement recherche, n'est-ce pas ?

Selon vous, quelles sont les solutions plausibles, probantes et intéressantes à faire valoir et à mettre en avant dans les années à venir afin de réduire les émissions françaises de gaz à effet de serre?

Philippe Charlez : Comme je le disais dans la réponse précédente, il faut arrêter de cibler tous les investissements sur les renouvelables. La France c’est 75% de nucléaire et 12% d’hydroélectricité. Mettre en œuvre des éoliennes et des panneaux solaires, c’est remplacer zéro carbone par zéro carbone, ça ne sert à rien. Il faut surtout investir dans les transports notamment dans les réseaux de distribution (électricité, gaz naturel et à plus long terme hydrogène) mais aussi et surtout rénover les passoires énergétiques (logement D/E/F/G). La nouvelle loi habitat va dans le bon sens. Mais, en dehors des technologies, il est aussi indispensable de faire beaucoup de pédagogie car bien des choses fausses sont véhiculées sur la transition énergétique et le climat. Ils sont très souvent instrumentalisés pour servir d’autres causes politiques, idéologiques ou économiques. Dans ce sens l’Institut Sapiens vient de terminer une étude détaillée des nouveaux programmes de secondaire suite à la réforme Blanquer. La transition énergétique y occupe une part significative. Les conclusions seront publiées début février.

Fabien Bouglé : Il faut faire de la recherche fondamentale dés à présent. Le gouvernement devrait subventionner ces recherches car elles sont la solution à ces problèmes d'émissions de gaz à effet de serre. 

Les 160 milliards d'euros consacrés à la création des éoliennes et aux raccordements des éoliennes au réseau central devrait s’arrêter. On devrait plutôt subventionner les recherches liées à l'hydrogène, au nucléaire propre. Je peux citer Gerard Mourou ( reçu le prix Nobel de physique) qui a trouvé une solution afin de supprimer la radioactivité des déchets nucléaires en les faisant passer d' 1 million d'années à 30 minutes. L'Etat doit financer ces travaux, c'est une priorité. 

Enfin, les Français doivent aussi apprendre à économiser l’énergie qu'ils utilisent au quotidien. L'électricité qu'on ne produit pas est celle que l'on ne consomme pas. Il ne faut pas consommer cette énergie de façon excessive.

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