Contenus privés dévoilés sur Facebook : "S'il y a eu un bug, il va falloir le prouver"<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Certains utilisateurs du réseau social Facebook ont vu à la suite d'un bug informatique, leurs conversations privées rendues publiques.
Certains utilisateurs du réseau social Facebook ont vu à la suite d'un bug informatique, leurs conversations privées rendues publiques.
©Reuters

Poke

A la suite d'un bug informatique, le réseau social Facebook a divulgué des conversations privées de ses utilisateurs. Dos au mur, le géant américain a été écouté ce matin devant la CNIL (Commission National de l'Informatique et des Libertés).

Etienne  Drouard

Etienne Drouard

Etienne Drouard est avocat spécialisé en droit de l’informatique et des réseaux de communication électronique.

Ancien membre de la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés), ses activités portent sur l’ensemble des débats de régulation des réseaux et contenus numériques menés devant les institutions européennes, françaises et américaines.

Voir la bio »

Atlantico : Certains utilisateurs du réseau social Facebook ont vu à la suite d'un bug informatique, leurs conversations privées rendues publiques. Alors que le gouvernement a demandé à Facebook de s'expliquer devant la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (CNIL), est-ce la fin du réseau social ? 

Etienne Drouard :  Je ne crois pas, 26 millions de français sur quelques centaines d'utilisateurs "ce n'est pas la boutique" surtout si la faille de confidentialité qu'on nous annonce porte sur certains messages privés datant de 2007-2009 . Les questions de failles de sécurité sont néanmoins critiques pour la confiance des personnes et dépassent rapidement les frontières. Si l'information est avérée, Facebook risque de perdre un peu de son prestige.

On peut imaginer que cela va avoir un impact sur l'image de la société Facebook mais aussi sur le cours de la bourse de la société
qui était évalué à 19 dollars lundi (pour mémoire, lors de son introduction en bourse, l'action était  évaluée à 38 dollars).

Je ne crois pas envisageable une hémorragie massive du réseau social sur cette seule "affaire" pour deux raisons :

  • Pour l'instant, on n'a pas de confirmation, de preuve, de page écran qui montrent la responsabilité de Facebook par la diffusion sur internet de messages confidentiels. La communication du réseau social va pouvoir gérer et dévoiler la réalité du problème, si problème il y a.

  • Les utilisateurs pour l'instant n'ont pas d'autres services ayant une renommée suffisante pour accueillir les déçus de Facebook. Le propre d'un réseau social, c'est de réunir une masse de personnes, réparties en communautés, en tribus, ça va créer une grande fidélité. Ce besoin de retrouver le plus grand nombre d'utilisateurs quand on se connecte crée une grande fidélité aux réseaux populaires.


Les réseaux sociaux ont tendance à exploser vite sur la toile et disparaitre encore plus rapidement, avez-vous des exemples de réseaux sociaux qui ont quasiment disparu ?

Je me souviens de services de chat  au début des années 2000, il en reste de beaux restes, notamment sur Skyrock, les skyblogs qui étaient le réseau social à la mode réunissant les jeunes autour de leurs musiques préférées, notamment.

La proportion des jeunes qui utilisaient les skyblogs en 2010 a considérablement baissé . Il y a eu certainement un report ou une duplication d'une partie d'entre eux vers Facebook grâce à toutes ses fonctionnalités déportées partout sur le web  (les boutons  " like" ou "connect" par exemple).

Les utilisateurs se sont sentis trahis par Facebook, la confidentialité est-elle possible sur les réseaux sociaux ?

Elle est possible, elle est dans les mains de l'utilisateur. Elle est régie par le contrat qui le lie à Facebook.

il y a trois grandes strates de confidentialité des contenus sur Facebook :

  • La correspondance privée, c'est à dire les messages qui s'adressent au "one to one".

  • Il y a un régime de diffusion à un public restreint déterminé par chaque utilisateur. Les contenus sont accessibles à vos amis. Ce n'est donc pas une communication publique, c'est le cercle de mes amis.

    • Enfin, il y a la communication en ligne publique qui suit approximativement le même régime juridique que la communication audiovisuelle (radio, télé). Cela consiste à publier aux amis des amis. Vous n'avez pas choisi qui était les amis de vos amis. Vous n'avez pas déterminé le cercle de personnes qui peut voir ce que vous publiez.. Ce type de diffusion n'a rien de privé, même si elle n'est pas "tous publics).

      En fonction des paramètres que vous choisissez pour votre compte Facebook qui sont de plus en plus diversifiés et précis, vous pouvez avoir un régime de confidentialité ou de publicité de vos messages.

Comment peut-on défendre la vie privée sur un réseau social ?

Il faut être conscient et éclairé en choisissant les paramètres de diffusion de vos diverses catégories de messages. C'est une manière à l'américaine de responsabilisation de l'utilisateur qui a tous les outils en main pour gérer sa sphère privée sur le réseau social en fonction des options qu'il détermine.

L'utilisateur a donc la nécessité de paramétrer ses réglages afin de mieux cacher sa vie privée, s'il le souhaite.

Le problème auquel vient d'être confronté Facebook est-elle un simple bug ou un complot ?

J'ai une opinion personnelle sur le sujet. Quand on voit Fleure Pellerin et Arnaud Montebourg convoquer Facebook à s'expliquer devant la CNIL, je me dis deux choses. Tout d'abord, il n'y a pas de fumée sans feu. Puis aucune preuve ni aucune accusation n'ont été rapportées à cette heure. Si des correspondances privées ont été publiées ou accessibles, il y a bien quelqu'un qui en a fait le constat.

Il s'est peut-être passé quelque chose, mais je pense qu'on n'en sait pas assez pour l'instant. Je suis très circonspect sur la réalité et la masse de ce prétendu phénomène.

S'il y a eu un bug, il va falloir le prouver. Cette tempête médiatique histoire peut satisfaire certains investisseurs qui veulent voir l'action Facebook à la baisse. Ou divertir l'opinion le jour où le président français s'adresse à la tribune des Nations-Unies sur des sujets de sécurité un peu plus sensible et réels.  

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !