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Comment les effets secondaires du traité de Maastricht ont produit un système de santé français défaillant face au Coronavirus
©KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Effets secondaires

Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur le rôle de l’Europe et ont le sentiment d’une véritable carence. Cette situation pourrait s’expliquer, voire se justifier, par le fait que la santé n’est pas une compétence communautaire, et que rien ne justifie qu’elle le devienne.

Dov Zerah

Dov Zerah

Ancien élève de l’École nationale d’administration (ENA), Dov ZERAH a été directeur des Monnaies et médailles. Ancien directeur général de l'Agence française de développement (AFD), il a également été président de Proparco, filiale de l’AFD spécialisée dans le financement du secteur privé et censeur d'OSEO.

Auteur de sept livres et de très nombreux articles, Dov ZERAH a enseigné à l’Institut d’études politiques de Paris (Sciences Po), à l’ENA, ainsi qu’à l’École des hautes études commerciales de Paris (HEC). Conseiller municipal de Neuilly-sur-Seine de 2008 à 2014, et à nouveau depuis 2020. Administrateur du Consistoire de Paris de 1998 à 2006 et de 2010 à 2018, il en a été le président en 2010.

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Depuis de nombreuses années, toutes les institutions européennes ont un véritable problème de communication. Quoiqu’elles fassent, elles n’arrivent pas à convaincre, à susciter l’adhésion. Il en est de même avec la pandémie. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur le rôle de l’Europe et ont le sentiment d’une véritable carence. Cette situation pourrait s’expliquer, voire se justifier, par le fait que la santé n’est pas une compétence communautaire, et que rien ne justifie qu’elle le devienne.

Nonobstant cette incapacité juridique, la Commission européenne est intervenue, intervient tous azimuts.

  • Dans le domaine sanitaire,
  • Elle a engagé l’évaluation des stocks d’équipements de protection individuelle (EPI) disponibles dans l’Union, des capacités de production, des besoins… a commencé à constituer des stocks européens, a soumis les exportations de ces matériels à autorisation délivrée par les États-membres…
  • Elle examine avec des entreprises les possibilités de convertir des lignes de production pour produire ces équipements, masques, gants, lunettes de protection, écrans faciaux, masques chirurgicaux et combinaisons, respirateurs, kits de dépistage...
  • Elle assure le soutien logistique et financier du rapatriement de nombreux nationaux européens.
  • Elle a publié « des orientations invitant les États-membres à soutenir les opérations de fret aérien » pour permettre d’assurer la continuité des transports essentiels, « des lignes directrices sur les voies réservées » pour garantir la continuité et la rapidité de la circulation des marchandises sur tout le territoire de l’Union, ainsi que « des orientations pour aider les États-membres à filtrer les investissements directs étrangers et les acquisitions de contrôle ou d’influence » pour protéger les actifs européens stratégiques.
  • Elle a mobilisé 140 M€ pour financer des projets de recherche relatifs au virus.
  • Dans le domaine économique, elle a pris de nombreuses mesures dont deux sont susceptibles de modifier durablement le fonctionnement de l’Europe :
  • Une des décisions les plus importantes a été de déclencher la clause dérogatoire permettant aux États de s’affranchir du cadre budgétaire, des règles relatives notamment aux dettes déficits publics et de leur permettre de faire face à l’explosion des dépenses de santé et des mesures susceptibles de favoriser l’activité économique. Il n’est pas bon de maintenir des règles non respectées. Même cela peut paraître prématuré, les autorités de la zone euro doivent rapidement trouver de nouvelles règles crédibles et correspondant à une situation de déséquilibres qui risque de durer.
  • La Commission a adopté des règles temporaires en matière d’aides d’État pour permettre aux gouvernements d’injecter des liquidités dans l’économie, de soutenir les citoyens et les entreprises, et de préserver l’emploi dans l’Union. Institué par le Traité de Rome en 1959, le contrôle des aides est essentiel pour assurer la concurrence entre opérateurs économiques et permettre le bon fonctionnement du marché intérieur. Toute évolution constitue une notable inflexion des règles bruxelloises.

Sur proposition de la Commission, le Conseil européen a adopté un plan d’une exceptionnelle envergure pour faire face à la crise économique avec notamment :

  • La création d’un fonds de solidarité de 200 M€ pour aider les États-membres les plus touchés par le fléau.
  • Une dotation de 200 M€ pour le mécanisme européen de solidarité (MES) qui aide les États qui ont des problèmes de financement. Il a été mis en place en 2012 pour faire face à la crise des dettes souveraines européennes, et plus particulièrement à la dette grecque. Il a fallu moins de temps pour le créer que pour augmenter aujourd’hui sa dotation.
  • La création par la Banque européenne d’investissement (BEI) d’un fonds de 20 Md€ pour les PME ; de son côté, sa filiale, le fonds européen d’investissement (FEI) a obtenu de la Commission européenne une garantie de 1 Md€ pour accorder 8 Md€ aux PME. Nous retrouvons les mécanismes du Plan européen d’investissement (PIE), également dénommé « Plan Juncker » mis en place en 2014, six ans après la faillite de Lehman Brothers. On doit saluer la réactivité européenne d’autant que le « Plan Juncker » a été un véritable succès.
  • Le redéploiement de 37 Md€ de ressources budgétaires pour accompagner les États à faire face.

Enfin, n’oublions pas la Banque centrale européenne (BCE) qui, très vite, a mis en place près de 1000 Md€ pour l’acquisition de titres privés et publics pendant la crise et permettre aux États de se refinancer et de faire face à l’augmentation des dépenses et à la diminution des recettes.

Cette liste n’est pas exhaustive même si elle s’apparente à « un catalogue à la Prévert ». Elle démontre que l’Europe utilise tous les moyens à sa disposition, même si elle n’est pas allée au bout de la démarche des « euro bonds ». N’oublions pas que cette réponse collective européenne accompagne toutes les initiatives nationales évaluées à ce stade à plus de 1 000 Md€.

L’Europe doit maintenant se préoccuper de l’Afrique. Les installations hospitalières sont sujettes à caution, les centres de réanimation inexistants… Comme partout dans le Monde, les masques, les tests, les médicaments…manquent. Les pays d’Afrique sub-saharienne n’ont ni les ressources, ni les capacités hospitalières, ni les moyens humains pour combattre une telle pandémie.

Si nous voulons éviter une tragédie humanitaire, il convient au plus vite d’aider l’Afrique à

  • Combattre le fléau en apportant le maximum de ressources matérielles et humaines
  • Ralentir la crise économique en apportant les ressources nécessaires pour faire face à la diminution des ressources découlant de la baisse des prix des matières premières et hydrocarbures…Allons-nous assister à la résurgence des plans d’ajustement structurels ? Faudra-t-il procéder une nouvelle fois à un vaste plan d’annulation de dettes ? 

L’ONU a articulé le chiffre de 3 000 Md$. La proximité géographique et l’importance des liens imposent à l’Europe doit s’impliquer. C’est son intérêt ! Il est donc urgent de mobiliser le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale et tous les bailleurs multilatéraux et nationaux. Pour donner de nouvelles ressources à ces institutions à un moment où les budgets nationaux sont très sollicités il est urgent de créer très vite une nouvelle dotation de droits de tirage spéciaux (DTS), création monétaire ex nihilo même si sa valeur est basé sur celle d’un panier de devises internationales.

L’Europe a réussi sa mobilisation. Il faut maintenant qu’elle mobilise le Monde. Le COVID 19 peut lui permettre d’écrire à nouveau l’histoire.

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