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Pour les classes moyennes, 
la lutte des classes est de retour !
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Les classes moyennes & la rigueur

Un panel de 120 Français des classes moyennes amené à converser sur la plateforme collaborative FreeThinking. L'étude s'est déroulée du 10 au 19 novembre. Objectif : mieux comprendre leur perception de la crise des dettes souveraines, du plan de rigueur Fillon II et des proposition du B20 et du patronat Français. (Épisode 2/3)

Véronique  Langlois et Xavier Charpentier

Véronique Langlois et Xavier Charpentier

Véronique Langlois et Xavier Charpentier ont créé en mars 2007 FreeThinking, laboratoire de recherche consommateur 2.0 de Publicis Groupe.

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Comme nous l'indiquions dans la première partie de cette étude, avec la crise, les classes moyennes semblent tentées par l'extrême gauche. Mais si l'émergence des partis de la gauche radicale est encore un signal faible, la radicalisation des esprits et des positions n'en est pas un, elle. Jamais depuis 2007 la conflictualité n'avait été aussi forte et évidente sur ce blog. Avec des fractures multiples, il faut noter l'apparition d'un imaginaire et d'un vocabulaire de lutte des classes très explicites et l'émergence d'un débat dur sur ce qui menace la démocratie en Europe et en France.

Une France aux multiples fractures...

Les fonctionnaires contre les autres 

Pour citer les propos de certains membres de notre panel :

"Vivent les fonctionnaires qui commencent à rogner parce qu'un bruit court que l'on va mettre un jour de carence quand ils seront en congé maladie... LES PAUVRES !!! dans le secteur privé c'est 3 jours ! Il ne faut toucher à rien ! Faire comme la Grèce...

- Non, non, non, je ne peux vous laisser écrire ce que vous écrivez sans réagir.... Les salaires des fonctionnaires, ils sont scandaleux tellement ils sont bas... Alors nos acquis oui nous voulons les garder, car nous nous sommes battus pour les avoir..."

"Arrêtez de tailler les fonctionnaires vous n'y connaissez rien ; j'ai appris dans la vie que quand on parle de quelque chose, c'est qu'on connaît le sujet, apparemment c’est pas votre cas !"

Les Français "de souche" contre les étrangers, qu'ils soient Grecs ou travailleurs immigrés

"Nous savons que notre pays est dans cette merde depuis des années, le gel ou presque des salaires, la part sociale de la France envers les étrangers, et ceux qui ne foutent rien ! La France, un pays de terre d'asile pour tout peuple qui ne sait pas quoi faire. Bientôt nous allons voir arriver en masse des Grecs dans la merde. Qui va payer pour ça ? "

Les PME contre les grandes entreprises

"Toute initiative pour relancer la croissance est bonne à étudier  mais quand je vois les grands groupes qui habituellement se livrent une guerre sans merci s'entendre comme larrons en foire j'ai bien peur qu'ils n'aient trouvé une solution pour s'en mettre plein les poches sur le dos des consommateurs et des PME... "


Un nouveau langage : celui de la lutte des classes

Deuxième point : la façon de parler, les mots utilisés sont différents. A la traditionnelle mesure dont font preuve ces Français moyens sur le fond, même quand ils expriment leur mécontentement ou leurs critiques avec virulence dans la forme, se substitue sur ce blog un discours et un imaginaire qui sont ceux du combat "classe contre classe".

"Vivement que ça pète et qu'il y ait une révolution !... Qu'on applique des principes simples, prendre la richesse là où elle est pour la redistribuer plus bas. On arrête pas de se serrer la ceinture sur tout, on ne vit plus on essaye de survivre dans ce pays ! Ras le bol !"

"La classe politique dans son ensemble se comporte comme des gestionnaires de crise. au profit bien entendu des classes qu'ils représentent... Le système libéral vit de ces crises et en profite à chaque fois pour rogner un peu plus les droits obtenus par la lutte ou des libertés dangereuses pour lui... IL faut changer de vision, de système, il faut se réveiller sinon nous allons dans le mur."

Un vocabulaire, un imaginaire qui sont même ceux de la menace, pour certains participants qui ne sont pas majoritaires mais ne représentent pas non plus quantité négligeable sur le blog. Le rapport de force (le rapport de classes ?) devant trouver une issue soit dans les urnes, soit dans la rue.

"Ça ne pétera pas ... Je pense tant que les minima sociaux ne sont pas amoindris ; je suis sûr que si toutes classes moyennes et les plus défavorisés se serraient dans les rangs, ça ferait du monde dans la rue !! Les échéances électorales approchent ; les "hautes sphères" devraient prendre garde."

"Comme disait mon grand-père il faut une bonne guerre tous les 30 ans afin de relancer l'économie. Mais contre qui se battre désormais ? Nos dirigeants !"

"Je pense que la "paix" est préservée tant qu'on ne touche pas au minima sociaux ; si c'était le cas, je crois qu'il y aurait du monde dans la rue et que ces gens-là, votant aussi, seraient peut-être craints."


Le nouveau débat : la démocratie menacée ?

C'est que derrière cet imaginaire "classe contre classe", une autre "lutte finale" fait irruption dans le débat : quel avenir pour la démocratie en France et en Europe ? Un débat qui n'a rien de théorique ou d'idéologique pour ces Français moyens qui voient l'évolution de la situation en Grèce et en Italie d'un oeil effaré parce que  très conscients du danger :

"Si la Grèce tombe, l'Italie et l'Espagne tomberont, et la France aussi par effet domino."

Ce combat entre "eux" et "nous" (les citoyens), c'est un combat contre des forces hostiles de deux ordres, dans leur discours.

Une force abstraite : les marchés, les lobbies... Ils ont aujourd'hui pris le pouvoir pour beaucoup de participants. Pour d'autres, ils pourraient le faire très bientôt... Bref, ils représentent un danger qui n'est pas incarné mais très présent dans leurs représentations du monde économique. D'autant plus présents que les politiques sont dépassés, débordés, dépossédés, voire manipulés et les citoyens avec eux :

"Ce plan de rigueur est comme les autres un plan "pipo" qui ne réglera rien car il ne s'attaque pas aux racines du mal. Il a pour but essentiel de détruire petit à petit tout ce qui a été créé par le Conseil National de la Résistance. C'est actuellement les marchés financiers qui gouvernent au détriment des peuples. Tout cela pour toujours plus de profit à leur avantage au détriment des peuples."

"Quant à la dette elle a été créée volontairement par les gouvernements successifs qui ont accepté d'emprunter à des banques privées au lieu de leurs banques centrales à des taux excessifs. Ces mêmes gouvernements se sont soumis aux marchés financiers qui ont mis en place les agences de notation gérés par eux. "

"On voit bien que c'est la finance qui dirige le monde. Les politiques ne contrôlent plus rien."

Une force plus incarnée surgit, même si aucun nom n'est pour l'instant cité en dehors de la sphère politique : ceux que l'on pourrait appeler les nouveaux oligarques globalisés. Des "puissants" qui cumulent goût effréné du luxe et de l'argent et obsession du pouvoir, au mépris de toute règle démocratique et de tout respect des autres, et font passer le fonctionnement de l’économie mondialisée et la création de richesse avant les préoccupations des citoyens de base. 

"Et voilà que maintenant ce ne sont plus les peuples qui décident ni les urnes, non ce sont une poignée de politiciens, d’économiste ou d’anciens banquiers qui vont décider à notre place. Ce n’est pour moi ni plus ni moins qu’un retour au fascisme. »

Feuilleton "Les classes moyennes & la rigueur"

Épisode 1 : La crise pousse les classes moyennes vers les solutions politiques radicales.

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