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Cette cagnotte fiscale espérée par le gouvernement grâce au retour de la croissance : en marche pour une répétition des erreurs du quinquennat Hollande ?
©AFP

Et ça continue...

Le retour à la croissance de la France est un tournant du mandat d'Emmanuel Macron. L'occasion de voir si le néo-président a retenu les erreurs de son prédécesseur.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : Avec le retour de la croissance, le gouvernement dispose aujourd'hui d'une cagnotte. Peut-on craindre une répétition des erreurs de Hollande et donc un nouveau gâchis? 

Philippe Crevel : La dette publique de la France a atteint durant le premier trimestre 2017 98,7 % du PIB (statistique Eurostat). Le déficit public se situera cette année entre 2,7 et 2,9 % du PIB. L’année prochaine, la France devra emprunter sur les marchés 195 milliards d’euros, ce qui constituera un record historique. Depuis 2009, la France fait l’objet d’une procédure de déficit excessif de la part de la Commission de Bruxelles. Au sein de la zone euro, un seul autre État est soumis à cette même procédure, l’Espagne qui devrait en sortir dans les prochains mois. La France, depuis l’instauration officielle de l’euro, en 1999, a été plus d’une année sur deux soumis à la procédure de déficit excessif. Elle l’a été de 2002 à 2004 puis l’est sans discontinuité depuis le 27 avril 2009. Le Conseil européen avait alors demandé à la France de corriger la situation avant la fin de l’année 2013. Le 21 juin 2013, ce délai a été reporté en 2015. Le 10 mars 2015, un nouveau report a été décidé, l’échéance étant fixé en 2017. La France devrait donc bénéficier d’un nouveau répit. La trajectoire proposée par les pouvoirs publics prévoit un respect des textes européens pour 2020. La France est en retard par rapport à ses partenaires européens en matière d’assainissement de ses finances publiques. Le déficit moyen au sein de la zone euro est de 0,9 % du PIB. Au premier trimestre 2017, l’Allemagne dégageait un excédent public de 1,5 % du PIB et sa dette publique est de 66,7 % du PIB. La cagnotte, « c’est un piège à con ». Cette affaire a été inventé en 2000 par Jacques Chirac, alors président de la République, pour gêner son Premier ministre de cohabitation, Lionel Jospin. En demandant la redistribution des fruits de la croissance, le Président de la République tentait de contourner par la gauche son Premier Ministre, jugé trop timide. Pour autant, déjà à l’époque, malgré une croissance forte, la France était toujours en déficit. Depuis cette date, depuis que la croissance est supérieure aux prévisions, le mot « cagnotte » ressort. Mêmes causes, mêmes effets. Dans les années 2000, la France n’a pas assaini ses finances ce qui l’a placé en situation délicate au moment de la Grande Récession de 2008/2009. François Hollande en accumulant les mauvais taux de croissance n’eut guère de possibilité de ses constituer une fausse cagnotte ce qui ne l’empêcha pas de distribuer à tout va à la fin de son mandat dans l’espoir de retrouver une once de popularité.

Ne serait-il pas utile de garder cette cagnotte comme marge de manœuvre? Ne faudrait-il pas cultiver une certaine prudence économique?

Après quatre années de quasi-stagnation économique, la prudence devrait être de mise. Certes, au vu des résultats des trois premiers trimestres, la France devrait obtenir un taux de croissance de plus de 1,5 % en 2017. Nous pouvons légitimement espérer un taux de 1,8 %. Pour autant, il n’y a pas de quoi pavaner. Il serait condamnable d’engager de nouvelles dépenses récurrentes ou des baisses pérennes d’impôts non financées par des économies. La question n’est pas d’utiliser une pseudo cagnotte mais bien de diminuer le montant des dépenses et des prélèvements obligatoires.

Si pour le moment, le contexte économique est plutôt porteur, plusieurs menaces existent. Le pétrole pourrait rebondir fin 2018, début 2019 du fin dus sous-investissement dans le secteur des gisements pétroliers. Par ailleurs, il convient de suivre l’évolution de la politique monétaire américaine qui pourrait aboutir à une hausse des taux d’intérêt. Le Brexit et plus récemment les évènements en Catalogne prouvent que tout peut changer très vite sur le front économique. Il convient de ce fait de pouvoir conserver quelques réserves pour faire face à quelques imprévues.

Quelles sont selon vous, les tentations auxquelles le gouvernement devra le plus résister? 

Le Gouvernement est tenté d’utiliser le surcroît de recettes généré par celui de la croissance pour corriger la première mouture du projet de loi de finances et du projet de loi de financement pour la sécurité sociale pour 2018. Face aux attaques concentrées sur le caractère pro-riche du budget, le Gouvernement remet en cause certaines mesures comme sur le prêt à taux zéro. Il pourrait multiplier les gestes ciblés sur certaines populations. In fine, il dépensera l’argent qu’il n’a pas et ne corrigera pas son image… Le Gouvernement devrait prendre l’engagement que tous les gains issus du surcroît de croissance soient affectés à la réduction du déficit public. A défaut de faire acte de rigueur budgétaire, il pourrait décider de les affecter à des dépenses d’investissement afin de préparer l’avenir. Cela permettrait d’éviter le recours à la dette comme cela est prévu pour le grand plan d’investissement d’Emmanuel Macron. 

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