Certains d’entre nous ont plus d’ADN issu des hommes de Néandertal que d’autres et les scientifiques comprennent désormais pourquoi<!-- --> | Atlantico.fr
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La plupart des humains vivants aujourd'hui peuvent faire remonter un très faible pourcentage de leur ADN aux Néandertaliens.
La plupart des humains vivants aujourd'hui peuvent faire remonter un très faible pourcentage de leur ADN aux Néandertaliens.
©PIERRE ANDRIEU / AFP

Héritage

Une nouvelle analyse des génomes anciens a permis à des scientifiques de mieux comprendre l'ADN de Néandertal qui s'est transmis aux populations d'Europe et d'Asie.

Laurent Alexandre

Laurent Alexandre

Chirurgien de formation, également diplômé de Science Po, d'Hec et de l'Ena, Laurent Alexandre a fondé dans les années 1990 le site d’information Doctissimo. Il le revend en 2008 et développe DNA Vision, entreprise spécialisée dans le séquençage ADN. Auteur de La mort de la mort paru en 2011, Laurent Alexandre est un expert des bouleversements que va connaître l'humanité grâce aux progrès de la biotechnologie. 

Vous pouvez suivre Laurent Alexandre sur son compe Twitter : @dr_l_alexandre

 
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Atlantico : La plupart des humains vivants aujourd'hui peuvent faire remonter un très faible pourcentage de leur ADN aux Néandertaliens. Comment va se créer tout simplement cet héritage ?

Laurent Alexandre : Quand l'Homo sapiens est sorti d'Afrique entre -60 000 et -50 000 ans, il s'est métissé avec des Néandertaliens au Proche-Orient. Il y a eu d'autres métissages avec l'homme de Néandertal en Europe, mais une partie importante de ces populations qui ont été métissées avec le Néandertalien en Europe n'ont pas de descendants. Les Eurasiens actuels sont les descendants du dernier métissage entre Homo sapiens et Néandertal à la sortie d'Afrique.

Cette population qui a été métissée avec l'homme de Néandertal et qui a laissé des descendants jusqu'à aujourd'hui a colonisé toute l'Eurasie, puis l'Amérique, ainsi que l'Australie autour -45 000 par rapport à aujourd'hui. La totalité des populations hors Afrique sont issues de ce métissage entre Néandertal et Homo sapiens à la sortie d'Afrique entre -60 000 et -40 000 avant JC. En Afrique, il y a beaucoup moins d'ADN néandertalien dans les populations. Récemment, on a retrouvé une petite quantité d'ADN néandertalien dans une assez large partie d'Afrique, ce qui laisse à penser qu'il y a des homo sapiens métissés avec des Néandertaliens qui sont retournés en Afrique et qui ont apporté ces variants génétiques ultérieurement.

Pourquoi certains groupes de personnes ont-ils aujourd'hui plus d'ADN néandertaliens que d'autres ?

Pour deux raisons. Il y a des gens qui ont récupéré des morceaux d'ADN néandertaliens qui étaient soumis à une pression de sélection négative, c'est-à-dire qui avaient des conséquences médicales ou intellectuelles ou physiques défavorables. Les gens qui étaient porteurs de ces morceaux d'ADN néandertaliens non favorables n'ont pas laissé de descendants. Les morceaux d'ADN néandertaliens sur le chromosome Y ont entrainé très probablement une baisse de la fécondité. Les gens qui en étaient porteurs avaient moins de bébés, moins de descendants que ceux qui n'en n'étaient pas porteurs. Par ailleurs, il y a eu des métissages des populations issues de ce métissage entre homo sapiens et Néandertal avec d'autres populations qui étaient porteuses d'une faible quantité d'ADN néandertalien, notamment des populations nord-européennes et de l'ouest de l'Europe. C'étaient des chasseurs-cueilleurs, qui étaient porteurs d'une petite quantité d'ADN. Ils ont été mélangés avec les populations issues du Proche-Orient et ont diminué la proportion d'ADN néandertalien. En Asie, il n'y a pas eu ce même type de métissage avec des populations qui avaient peu d'ADN néandertalien. On peut ajouter que notre compréhension des métissages entre les différentes espèces d'hommes varie énormément et qu'on va sans doute avoir de nouvelles surprises dans les années qui viennent. 

On a découvert plusieurs métissages entre homo sapiens et d'autres espèces humaines, notamment avec l'homme de Denisova en Asie et en Afrique avec une espèce d'homme qui était peut- être de l'homo erectus ou un descendant de l'homo erectus il y a 40 000 ans. Plus nous creusons l'analyse de la vie à l'ancien et plus nous étudions l'analyse des humains qui vivent aujourd'hui sur Terre. Nous découvrons des métissages très complexes et multiples entre homo sapiens et les autres espèces d'hommes qui ont peuplé la tête.

La répartition de l'ADN néandertalien actuel ressemble-t-elle à ce qu'elle était au début ?

Non. Des métissages ont eu lieu entre des populations qui avaient plus ou moins d'ADN néandertalien et d'autre part, il y a certains variants néandertaliens qui ont été négativement sélectionnés.

Aujourd'hui encore, il y a des pressions de sélection contre des variants néandertaliens quand ils ne sont pas favorables. Donc La proportion d'ADN néandertalien dans notre ADN peut encore bouger, notamment quand il y a des variants néandertaliens qui sont très favorables pour la fécondité.

Et quelles conséquences chez un humain qui a davantage d'ADN néandertalien aujourd'hui ? Sur la santé ou autre ?

Il y a des prédispositions à certaines maladies endocriniennes. Il y a une plus grande sensibilité à certains virus. On a même accusé les variants néandertaliens de favoriser le Covid-19.

L'analyse de l'ADN ancien et celle de l'ADN moderne ne font que commencer. Nous sommes aujourd'hui capables de reconstruire des familles entières en analysant l'ADN qui est contenu dans le sol des grottes. Récemment, on a reconstitué le portrait d'une famille qui vivait dans une grotte en Asie. On a réussi à reconstituer les différents groupes d'hommes qui y existaient, sans avoir d'ossements, uniquement en étudiant et en séquençant l'ADN présent dans le sol. De la même manière, on a reconstitué au sud de Paris, à partir de l'ADN cette fois-ci d'ossements, le portrait-robot des gens qui habitaient dans un village ancien avec leurs visages, leurs caractéristiques médicales et physiques. La très grande facilité aujourd'hui à la séquence de l’ADN moderne et ancien va nous donner une idée de plus en plus précise de qui étaient nos ancêtres, comment ils se sont mélangés et quelles étaient leurs caractéristiques.

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