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Burgers made in labos : pourquoi la viande de synthèse ne pourra pas nourrir le monde
©Sebastian Gollnow / dpa / AFP

Fausse bonne idée

La production de viande est un immense gaspillage de ressources et tous les substituts sue l’on peut trouver à l’élevage sont bons à prendre. Mais la viande en laboratoire est encore loin d'être un substitut massif à la viande "traditionnelle".

Jean-Daniel Lalau

Jean-Daniel Lalau

Jean-Daniel Lalau est médecin, professeur de nutrition au CHU d'Amiens, docteur en sciences et en philosophie.

Il est l'auteur des livres En finir avec les régimes (éditions François Bourin) et Hospitalité - Je crie ton nom (éditions Chronique sociale). 

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Atlantico : Selon vous, la viande in vitro pourrait-elle devenir une alternative fiable à la consommation de viande traditionnelle ?

Jean-Daniel Lalau : Honnêtement, je ne pense pas qu’elle puisse devenir une alternative, au sens premier d’un remplacement : il y aura toujours des « amoureux » de la côte à l’os, de la viande persillée, de la viande du Limousin (franchement, le projet d’une viande de synthèse à partir d’une imprimante 3D avec de l'encre biologique, ce n’est pas gagné avec la culture culinaire française !) ; et ce surtout dans le contexte actuel où la nouvelle classification des aliments selon le degré de transformation – la classification NOVA – met en lien un degré élevé de transformation et un surcroît des grands fléaux de santé (obésité, diabète, maladies cardiovasculaires, cancer).

D’un autre côté, il y a des défenseurs de la cause animale, dont les arguments sont plus que respectables.

Il y a des défenseurs aussi de l’écologie, des produits équitables enfin : en l’état actuel donner à un animal 10 kg de protéines végétales pour en retirer 1 kg de protéine animale est choquant.

Donc, remplacement, certainement pas ; mais limitation, ce serait souhaitable. Mais pour peu que le produit soit goûteux et nutritionnellement correct !

Ceci dit, il y a déjà une ouverture (je ne dis plus « alternative ») avec les insectes, qui comment à être prisés dans certaines contrées du monde.

Comment est fabriquée la viande in vitro ? Est-elle entièrement compatible avec un régime végétarien ? Certains articles de presse font notamment état d'une utilisation de fœtus bovins...

Il est déjà possible d’avoir un régime végétarien, sans faire appel à la viande. Mais en faisant appel à des connaissances ! Il faut savoir combiner, en effet, les sources végétales ; savoir quelle légumineuse peut venir compenser le manque en acides aminés de tel autre végétal. Mais il suffit de regarder les plats traditionnels dans le monde : à travers l’histoire, sans le savoir, les peuplades  ont adopté le mode alimentaire qui assurait la survie (semoule/pois chiche ici, riz/soja là, mil/arachide encore, maïs/haricot rouge, etc.). Des Messieurs Jourdain de la physiologie !

Cette viande entièrement conçue en laboratoire peut faire peur, tout comme les OGM : sait-on si elle présente des risques sanitaires particuliers ?

Tout dépend du cahier des charges. Confère actuellement la charcuterie, et je reviens à mon propos sur les aliments ultra-transformés : ce cahier des charges est beaucoup plus stringent en France que, par exemple, en Nord-Amérique. Les normes n’ont pas que du mauvais !

Tout dépend aussi de la méthodologie utilisée pour montrer le risque/l’absence de risque. Il faudrait pour cela faire des études dites d’intervention, où l’on changerait ce facteur et seulement ce facteur qu’est la viande in vitro. Or, nul doute que ce type de consommateur ne mange pas à côté ce que mangent M.Me. Toutlemonde !

N'est-ce pas une nouvelle rupture dans le rapport de l'homme à la planète ? Les filières d'élevage traditionnelles maintiennent un rapport intime entre l'éleveur et la viande...

Excellente question ! Quasi philosophique ! Sauf que nous sommes dans une urgence sanitaire… pour la planète. Il faut sauver le soldat planète ! La population croît rapidement ; plus encore, au moins globalement, le niveau socio-économique croît également, et donc avec de nouveaux appétits, des consommations nouvelles de viande. Même chez nous, il n’y a pas encore bien loin dans le temps, la viande c’était – je cite un nom d’enseigne – « Au hasard de la fourchette » ! Et s’il y a un peu plus de richesse, qui peut se payer pour autant l’agneau des prés salés ?

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