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Bugatti Chiron, Lamborghini Centenario, Koeniggsegg Regera… pourquoi on pardonne tout aux stars du salon de l’auto de Genève (qui ne respectent par définition aucune norme)
©Reuters

2 millions d’euros pour 450 km/h

Voitures surpuissantes ou conceptuelles, les nouveautés ne manquent pas au salon automobile de Genève 2016 qui a ouvert ses portes au grand public ce jeudi 3 mars. Mais ces dernières ne respectent pas toujours les normes environnementales en vigueur.

Jean-Pierre Corniou

Jean-Pierre Corniou

Jean-Pierre Corniou est directeur général adjoint du cabinet de conseil Sia Partners. Il est l'auteur de "Liberté, égalité, mobilié" aux éditions Marie B et "1,2 milliards d’automobiles, 7 milliards de terriens, la cohabitation est-elle possible ?" (2012).

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Atlantico : Ce 86e salon de Genève promet "plus de 120 premières mondiales et européennes". Quels sont, selon vous, les modèles stars du salon automobile de Genève 2016 ?

Jean-Pierre Corniou : La Bugatti Chiron, la Lamborghini Centenario et la Koeniggsegg Regera sont les trois voitures phares de ce salon.

Ce sont ce qu'on appelle des "super cars", c'est-à-dire des voitures qui sont capables d'aller à des vitesses folles (450km/h), qui sont fabriquées avec des matériaux exceptionnels comme la fibre de carbone (qui leur permet à la fois d'être légère et extrêmement bien "désignées"), et qui sont équipées de tout ce que se fait de mieux en matière d'outils embarqués de confort ou d'aide à la conduite.

Ce sont également des voitures qui sont fabriquées à une très petite échelle (40 exemplaires pour la Centenario par exemple) et qui sont vendues à des prix extrêmement élevés (2 millions d’euros pour la Bugatti Chiron) à des personnes très riches, comme les traders de Londres par exemple, qui sont friands de ce genre d'acquisitions. 

Après, le salon expose aussi ce qu'on appelle des "concept car", qui ne sont pas des voitures destinées à la vente mais à faire la démonstration d'un savoir-faire technique très poussé. DS (groupe PSA) expose par exemple cette année un concept de coupé futuriste, l'E-tense électrique. C'est une voiture électrique coupée qui peut atteindre 250 km/h avec deux moteurs électriques. Citroën n'aura jamais les moyens de commercialiser cette voiture, mais de nombreux concepts techniques sont découverts par les grandes chaines de production automobile au cours de ce salon, qu'elles peuvent réutiliser dans leurs propres processus de fabrication par la suite.

Ce salon accueille chaque année une foule immense, composée de personnes issues de tous les milieux sociaux. Selon vous, quels sont les éléments qui font le plus rêver les badeauds dans ce salon d'exposition de voitures hors-norme et hors de prix?

C'est vrai qu'il est très frappant de voire la foule que ce salon attire chaque année, alors que pour la plupart des visiteurs, ce sont des voitures tout à fait hors de portée financière, et dont ils n'ont pas besoin au quotidien.

Cela s'explique d'abord par une très forte concentration de marques qui font partie de la légende automobile, je dirais même de la culture mondiale.

De plus, c'est tout bête, mais le salon de Genève est un lieu très agréable, où il est facile de se déplacer pour voir tous les modèles, dont la présentation est très "théâtralisée" (effets de lumière, de son, etc.).

Ensuite, je pense que ce succès relève aussi de la "peopolisation de la société", c'est-à-dire que ce sont des voitures utilisées par les gens dont on parle, par des stars qu'on voit dans tous les médias. Cela donne je pense envie de voir ces véhicules en chair en os, à défaut de les acheter. Les "James Bond" ont par exemple fait le succès de l'Aston Martin.

Enfin, je pense que les foules se déplacent car il y a toujours eu une dimension de grand luxe dans l'automobile, qui fait de ce produit encore un vrai marqueur social, plus qu'une montre ou de la joaillerie par exemple, car c'est à la fois un alliage de techniques de pointe et d'images d'exception. Le public est dans une logique très forte d'incarnation dans ce salon, le visiteur s'imagine au volant de ces voitures et donc qu'il est très, très riche, ce qui est très souvent associé au fait d'avoir réussi sa vie.

Comment ce salon de Genève arrive-t-il à conserver "un désir d'automobile" alors que le climat social est tout de même très hostile à l'utilisation des voitures, avec des événements comme le scandale Volkswagen, des phénomènes comme le développement de voitures partagées avec des sites comme BlaBlacar ou encore des normes écologiques toujours plus importantes ?

Le salon de Genève a en effet cette fonction très particulière de maintenir "un désir d'automobile", et ce en faisant fi de toutes normes environnementales (ces voitures se vendent si chères que les producteurs préfèrent payer des amendes plutôt que de respecter les normes environnementales).

D'abord parce que les véhicules qui y sont présentés sont de vrais bijoux, ils émanent d'un travail d'orfèvre. Plus que la vitesse ou les objets d'aide à la conduite, je pense que la beauté des produits fascine la foule.

Cela s'explique aussi par le fait que ce salon se déroule en Suisse, qui a un marché ultra solvable et pas de constructeur national. Sur ce salon, la concurrence joue donc à plein et concentre tous les producteurs mondiaux de voitures haut-de-gamme sur un même lieu. Avec 40% de 4X4 sur son territoire, la Suisse est ainsi le plus mauvais élève de l'Europe en termes d’émissions de CO2.

Le marché des voitures de luxe est un marché d’exception, qui concerne en réalité très peu de gens mais qui fait encore rêver tout le monde, ce qui, en ces temps de crise, n'a, si j'ose dire, pas de prix.


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