Budget : Bruno Le Maire sauve sa logique d'offre, mais s'attaque à deux totems : le rachat d'actions et le crédit d'impôt recherche<!-- --> | Atlantico.fr
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Bruno Le Maire -- LUDOVIC MARIN / AFP
Bruno Le Maire -- LUDOVIC MARIN / AFP
©LUDOVIC MARIN / AFP

Atlantico Business

Bruno Le Maire a présenté aux députés un projet de loi de finances qui répond au cap qu'il s'était fixé, toutefois avec deux mesures qui vont faire grogner les chefs d'entreprise : il touche au rachat d'actions, au crédit d'impôt, et sans doute aux allégements de charges. Les patrons vont grogner… mais le cap est sauvé.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les patrons ne pourront pas s'empêcher de grogner, et même pour certains, de crier quand ils vont décrypter le projet de loi de finances qui a été présenté au parlement mardi soir. Pourquoi ? Tout simplement parce que pour trouver quelques économies supplémentaires et répondre aux critiques qui viennent du Modem (plus d'un milliard), le ministre de l'Economie va toucher à deux totems de la fiscalité française qui touchent les entreprises et étaient d'ailleurs dans le collimateur de l'opposition de gauche.

Le premier totem : le rachat d'actions. Un exercice qui est très pratiqué par les entreprises et qui revient à racheter son propre capital pour maintenir ou accroître la valorisation boursière. Un peu difficile à comprendre, cette pratique n'avait pas bonne presse, surtout dans les milieux de gauche qui voyaient là un moyen de favoriser et d'enrichir les actionnaires. Bruno Le Maire ne changera pas la fiscalité, les rachats d'actions sont imposés comme des dividendes, en revanche, il va conditionner les autorisations de rachat d'actions à la réouverture du pacte d'intéressement. De ce fait, l'entreprise ne pourra pas détruire la totalité des actions rachetées, mais elle devra ouvrir une négociation pour les redistribuer au personnel. C'est donc d'une certaine façon une augmentation des revenus des salariés.

Le deuxième totem est encore plus sacralisé. Il s'agit de réduire le crédit d'impôt recherche, dispositif miracle qui a fait de la France un paradis fiscal pour la recherche, mais aussi de réduire une partie des allégements de charges, sans doute sur les hauts salaires. Cette disposition avait été organisée pour favoriser l'emploi et la situation de l'emploi est telle aujourd'hui qu'elle mérite qu'on l'accompagne, mais sans doute pas par des exonérations de charges, surtout pour les cadres dans les secteurs en tension.

Il est évident que les organisations patronales vont crier, mais en réalité, les deux mesures sont supportables, d'autant qu'elles vont s'appliquer aux grandes entreprises qui sont particulièrement en forme avec des profits généreux. Alors, plutôt que de taxer les surprofits, comme beaucoup de députés le réclamaient, ce qui aurait donné un très mauvais signal au marché, Bruno Le Maire a choisi de passer sur le côté des documents comptables, en réduisant d'une part la dépense fiscale et en permettant de faire un geste pour les salariés. L'impact sera faible puisqu'il n'affectera principalement que les grandes entreprises.

Le ministre de l'Economie ne s'en sort pas mal, compte tenu de l'actualité et du climat à l'Assemblée nationale. Il était évident qu'il ne pouvait pas risquer d'ouvrir une discussion interminable, puisque plus de 5 000 amendements ont déjà été déposés, plus du double de l'année dernière. Personne n'avait intérêt à ce jeu de dupes, puisque ces amendements n'ouvraient en rien à la construction d'une majorité. Le gouvernement a donc choisi d'emblée la procédure du 49.3, après avoir intégré les revendications acceptables et qui ne dénaturent pas la stratégie du texte.

La loi de finances répond donc de façon pragmatique aux contraintes de la conjoncture et aux enjeux de la mutation climatique, avec une obligation de rester "crédible". 

La France est endettée. C’est son talon d’Achille . Elle doit emprunter sur les marchés. Elle doit s'organiser pour soutenir cette dette à un moment où les marchés financiers regardent avec suspicion des grands équilibres. L'Italie, la Grèce, l'Espagne sont quasiment sous surveillance, avec des spreads très élevés, c'est-à-dire que leurs taux d'intérêt sont beaucoup plus élevés que la moyenne européenne, largement dominée par les taux allemands (2,5 % pour les 10 ans). Le spread est un marqueur de risque pris par les marchés. Ce qui pose des problèmes aux dirigeants italiens, grecs et espagnols. La France échappe à cette surveillance, avec des taux qui sont dans les clous et des objectifs qui correspondent, actuellement, aux règles de Maastricht.

Si 2024 ne subit pas une fracture conjoncturelle (sur les énergies par exemple) et si la croissance très modérée tient alors que l'Allemagne est en récession, la dette sera « soutenue ».

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