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Bourses européennes en chute libre et BCE en retrait : mais quelle partition joue donc la Bundesbank ?
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Über alles

Face aux bulles spéculatives qui se forment actuellement dans la zone euro et tiennent grâce aux largesses de la BCE, le président de la Bundesbank prône des mesures d'austérité drastiques. Car la sortie de crise ne constitue pas nécessairement sa motivation première...

Comme dans un dessin animé de Tex Avery, les marchés financiers ont dépassé la falaise et attendent d'en prendre conscience pour tomber. Sans l'annonce de Benoît Coeuré et de Jose Manuel Gonzalez Paramo, les taux des emprunts espagnols, italiens et français auraient renoué avec la tendance haussière interrompue lorsque Mario Draghi a commencé à jeter des liasses de billets par l'hélicoptère. Cette image est empruntée à l'explication de plusieurs commentateurs pour décrire la politique d'Alan Greenspan, ancien président de la FED, depuis 1992, qui a mené à la succession de bulles spéculatives que les Américains paient aujourd'hui au prix fort (indice de la misère en hausse, baisse de la tendance de croissance à long terme, etc.).

Sans la peur de la mise en place d'une troisième vague d'argent peu cher, qui viendrait compenser les pressions vendeuses, les marchés auraient commencé à corriger depuis longtemps l'aberration des conditions de financement actuelles et les bulles spéculatives qui se construisent (notamment avec un taux de financement de la France à moins de 3% ou avec un CAC40 à près de 3300 points).

La majorité des opérateurs financiers s'accordent (officiellement ou officieusement) sur le constat : les marchés expérimentent une bulle spéculative (définition d'une déconnexion durable entre la valeur de marché d'un bien et sa valeur fondamentale) qui ne tient que par les largesses des banques centrales et notamment de la BCE. Personne n'ose "crever" cette bulle spéculative de peur de la contre-offensive que pourrait mettre en œuvre la Banque centrale à travers l'injection de liquidités encore plus importantes pour soutenir le statut quo.

Cependant, Jens Weiderman, Président de la Bundesbank, joue le trouble-fête puisqu'il sait que les bulles finissent toujours par exploser dans un scénario déflationniste décrit par Irving Fisher au lendemain de la crise de 1929. Le président de la Bundesbank exige la mise en œuvre de plans d'austérité drastiques, quel que soit le coût en terme de récession ou en termes de baisse des salaires dans les pays du sud (pour rétablir les déséquilibres budgétaires et de compétitivité cumulés depuis la création de la zone euro). En effet, il semble, aux dires de M. Weiderman, que celui-ci soit insensible aux conclusions des nouvelles recherches économiques qui prouvent qu'une baisse de 1% du déficit budgétaire se traduirait par une réduction de 2% à 4% de croissance du PIB. 

Mais il ne faut pas se tromper sur l'objectif du Président de la Bundesbank. Son action est loin d'être motivée par la sortie de la crise. Celle-ci cherche d'abord à sécuriser les prêts que l'Allemagne a octroyé aux autres membres de la zone. D'ailleurs, nous avons commenté ici même les demandes "extravagantes" de M. Weidman pour obtenir des garanties sur l'or détenu par les banques centrales nationales des pays membres de la zone euro en contrepartie des prêts de la banque centrale allemande aux banques centrales des pays du sud.

Entre la politique de l'autruche menée par les "colombes" (qui souhaitent que la BCE poursuive le gonflement de la bulle financière) et la politique de la rigueur portée par l'Allemagne, ni la BCE ni les gouvernements de la zone euro ne semblent s'occuper des vrais problèmes : déficits commerciaux, déficits budgétaires, inadéquation des économies aux nouveaux enjeux, etc. Pendant ce temps, les gouvernements se félicitent d'avancer vers la sortie de la crise même si l'histoire des 12 derniers mois a montré que toutes les solutions mises en œuvre se sont soldées par des échecs cuisants des mois plus tard.

Deux remarques sont importantes à souligner dans la situation actuelle :

  • La politique et la démocratie sont reléguées aux oubliettes puisque les banquiers centraux agissent sans aucun contrôle des Etats (et des contribuables qui devront in fine payer la facture des erreurs de gestion)
  • L'histoire de la capitulation de la Banque d'Angleterre (le 16 septembre 1992) face à George Soros (qui l'a poussée dans ses retranchements pour reconnaître l'inadéquation de sa monnaie) montre qu'un jour viendra où la BCE sera obligée de reconnaître l'inadéquation de sa politique monétaire. 

En conclusion, nous ne pouvons qu'espérer que la capitulation de la BCE - que celle-ci soit sous la pression de la finance ou la pression des politiques - se fera rapidement avant que les gouvernants de la BCE aient utilisé tous les moyens à leur disposition. Sans une correction rapide de la trajectoire, les problèmes fondamentaux de la zone euro ne pourront pas être résolus, même en mettant en place le fédéralisme européen. 

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