Benoît Rayski : “Nous sommes tous des sales Français”<!-- --> | Atlantico.fr
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"Pour les bien-pensants, il y a là-bas une jeunesse certes un peu turbulente mais tellement vivante"
"Pour les bien-pensants, il y a là-bas une jeunesse certes un peu turbulente mais tellement vivante"
©Reuters

Epreuve de vérité

Dans un livre vengeur et douloureux Benoît Rayski revisite la France et ses blessures. Il s'en explique.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Atlantico : Le titre de vitre ouvrage "Comment je suis devenu un sale Français !" vous l'avez choisi par provocation ?

Benoît Rayski : Si j'avais voulu choisir un titre provoquant j'aurai pris "Comment je suis devenu un sale souchien". J'y ai renoncé. Car Houria Bouteldja, l'hystérique haineuse des Indigènes de la République aurait été capable de me demander des droits d'auteur ! Alors je me suis contenté de "sale Français". Et je considère ça comme un honneur.

Lire aussi les bonnes feuilles : Comment je suis devenu un sale Français ? Le jour où j'ai entendu qu'on criait dans la rue : "Juif, la France n’est pas à toi !

Pourtant dans les premières lignes de votre livre vous écrivez : "Longtemps j'ai été juif et que juif". Vous ne l'êtes plus ?

Ô que si. J'avais choisi d'être juif pour interdire aux autres, à certains antisémites, de me désigner comme tel. C'était à moi, et à moi seul de choisir ce que j'étais et ce que je voulais être. Les mots "sale Français" me sont venus plus tard. Après les émeutes antijuives (et prétendument pro palestiniennes) de juillet 2014. Un jour mon fils m'a appelé. J'habite en Normandie et lui à Paris avec sa mère. Il était troublé, remué, par les cris de "mort aux juifs" qu'il avait entendu dans les rues de Paris. Il n'est pas blindé comme moi. Je suis allé le voir. Et par pur automatisme je lui ai dit : "Tu es un sale Juif et tu le resteras. Mais pour ceux qui t'insultent tu es aussi un sale Français et une face de craie". Je lui ai dit : "Rentre dans la défroque du sale Français et de la face de craie. Et tu mets le juif à l'intérieur". Car je pense vraiment que nous sommes tous des sales Français.

Et comment a-t-il réagit ?

Il était à moitié convaincu. Je lui ai expliqué aussi que les haineux qu'il avait entendus et vus devaient être traités par le plus grand des mépris. Des racailles qui avaient regagné après les manifs leurs cages, leurs égouts, dans la banlieue parisienne. Je lui ai dit aussi qu'il pouvait et qu'il devait se sentir supérieur à eux. Je suis rentré chez moi, j'ai pris une feuille de papier. J'ai écrit "sale Juif, sale Français, face de craie". Et puis j'ai réfléchi et puis j'ai mis sale Français en premier. Mais je garde bien, sûr le sale Juif.

Vous parlez beaucoup de la France. Et la France c'est quoi pour vous ?

La France c'est Rocamadour, Brocéliande, des églises, le Panthéon avec ses héros républicains, le Mur des Fédérés au Père Lachaise avec ses communards fusillés. Cette France là a été en quelque sorte engloutie. Les noms de la Courneuve, du Mirail, de Trappes, ont pris toute la place. Comme si la France était devenue l'Atlantide. Et je suis allé à sa recherche. En bien ou en mal, cela fait des années que l'on ne parle que des banlieues. Pour les bien-pensants, il y a là-bas une jeunesse certes un peu turbulente mais tellement vivante. Pour les autres là-bas c'est racailles, kalachnikovs, drogues. Et j'ai balayé tout ça.

A vous lire on pourrait avoir l'impression qu'il y a sur notre territoire des gens que vous ne considérez pas comme français ?

Loin de moi cette idée. Bien sûr qu'ils sont français. Mais vous savez, j'ai encore le droit de choisir qui j'aime dans ce pays et qui je n'aime pas. Je ne crois pas que la banlieue soit l'avenir de la France et que les mosquées devraient un jour prendre la place des églises. Et la personne qui vous parle n'est pas catholique.

Vous semblez très pessimiste sur l'avenir de notre pays ?

J'utiliserai un autre mot : "angoisse". Je crains que face à des gens qui se conduisent comme des conquérants auxquels tout est permis se dressent d'autres gens qui ne veulent pas qu'on leur en,lève leur pays. Des gens qui n'ont pas lu Houellebecq mais qui savent ce que le mot "soumission" veut dire. Je crains la haine et je crains aussi la haine qui répond à la haine. J'aimerais beaucoup qu'on se contente de la colère et du mépris. Mais je ne suis pas sûr que c'est comme ça que les choses se passeront.

"Comment je suis devenu un sale Français", Benoît Rayski, Editions du Rocher, 2015.

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