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Assassinat de Kennedy : mais quelles sont donc les raisons de sécurité qui pourraient encore ébranler l’Etat américain plus de 50 ans après ?
©Reuters

Ouverture-refermeture des archives

3.000 dossiers relatifs à l'assassinat de John F. Kennedy ont été divulgués, mais la publication de certains documents «sensibles» a été reportée à la demande de la CIA et du FBI.

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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Atlantico.fr : 3.000 dossiers relatifs à l'assassinat de John F. Kennedy ont été divulgués, mais la publication de certains documents "sensibles" a été reportée à la demande de la CIA et du FBI. Vous qui êtes l'auteur de "Kennedy, le temps de l'Amérique" (ed. Picollec), comment jugez vous cette ouverture d'archives ? Quel serait intérêt pour Donald Trump de ne pas dévoiler l'intégralité des documents relatifs à l'assassinat de Kennedy?

Gérald Olivier : Ces documents doivent être rendus publics parce que la loi le demande. En 1992, le Congrès avait voté pour que tous les documents liés à l’assassinat du président Kennedy soit rendus public au bout de vingt-cinq ans, soit 2017, au lieu de 2029 comme prévu initialement. Nous y sommes. Donald Trump avait, je pense,  l’intention de tout rendre public et c’est l’appareil de sécurité nationale qui l’en a dissuadé, concernant certains documents. En clair la CIA, le Pentagone, le FBI et d’autres services de l’administration, ont estimé qu’il n’était pas opportun de divulguer certains de ces documents aujourd’hui et Trump a agi selon leur recommandation. Preuve qu’il n’est ni aussi buté ou obtus que certains le disent. Ils resteront sous scellés six mois de plus, jusqu’en avril 2018. Le seul intérêt imaginable – ne connaissant pas évidemment la nature des documents non communiqués – est que ces documents touchent  à certains pays étrangers, partenaires ou alliés des Etats-Unis, et leurs gouvernements de l’époque et que pour n’embarrasser personne, Trump a préféré attendre. N’oublions pas que si ces documents sont tenus à l’écart du grand public, ils sont accessibles à certaines personnes autorisées qui les étudient en permanenceet peuvent éditer leur contenu en vue de leur divulgation. Il est probable que la CIA soit la première agence à vouloir protéger sa propre histoire et garder le secret sur certaines activités passées. Avant l'assassinat de Kennedy, la CIA avait participé à plusieurs opérations de déstabilisation du régime cubain et même des tentatives d’assassinats de Fidel Castro. C'est peut être ça dont il est question dans les documents.Il est tout à fait possible que les révélations touchent moins à l'affaire Kennedy elle-même qu'au contexte des Etats-Unis de l'époque, notamment ses relations vis-à-vis des pays d’Amérique centrale et latine, qui sont toujours ses voisins… 

De quelle nature pourrait être la menace pour l'état américain, cinquante ans après les faits?

La chose la plus spectaculaire serait bien sûr que ces documents contiennent le fameux "smoking gun". C’est-à-dire la preuve irréfutable qu’ Harvey Oswald n’a pas agi seul et qu’il y a bien eu un complot pour assassiner le président… un complot ourdi par le fameux complexe militaro-industriel que le président Eisenhower avait dénoncé dans son message d'adieu, et qui impliquerait à la fois le Pentagone, la CIA, des membres du Congrès, des multinationales de la Défense, peut être même la mafia et surtout Lyndon Johnson, le vice-président devenu président à la faveur de la mort de Kennedy... Personnellement je n’y crois pas. Je ne crois ni au complot. Ni à la possibilité que ce complot ait pu être gardé secret si longtemps. La seule théorie qui n'a jamais été invalidée reste celle du tireur unique. En 50 ans, un grand nombre de complots ont été évoqués, mais aucun n'a jamais été démontré. Les zones d’ombres entretiennent les doutes, mais entre ces doutes et l’existence avérée d’une conspiration il y aun énorme fossé.

Par contre si le moindre élément venait à confirmer ce complot, les répercussions sur le gouvernement américain, et la société américaine, seraient énormes. La confiance des Américains dans leurs institutions, qui n’est déjà pas bien forte en serait encore amoindrie. Jamais les Américains n’ont été aussi convaincus de la corruption de leurs élites. Et jamais les Américains ne se sont sentis aussi démunis pour lutter contre cette corruption. La personnalité d’Hillary Clinton est emblématique à ce sujet. Mais elle n’est pas la seule. Elle occupe le devant de la scène depuis trente ans, elle et son mari se sont considérablement enrichis depuis qu’ils sont arrivés au pouvoir alors que le pays s’est largement appauvri. Pas un jour ne passe sans de nouvelles révélations sur ses agissements suspects et pourtant elle est toujours là…

Si la thèse du complot dans l'assassinat du président Kennedy venait à être confirmée, on peut imaginer qu’un certain nombre de citoyens perdraient totalement confiance dans le gouvernement fédéral et qu’une vraie rupture sociale et politique pourrait s’en suivre.

Mais encore une fois tout cela relève de l’hypothèse et du fantasme… Rappelons que les premières raisons qui ont incité au secret concernant l’assassinat de Kennedy tenaient moins aux secrets d’Etat qu’aux secrets d’alcôves… A savoir que Jacky connaissait les innombrables infidélités de son mari et ne voulaient pas que l’Amérique les découvre à travers une enquête sur sa mort. Elle a préféré lui bâtir une légende et faire que cette légende devienne l’histoire vraie… 

Les relations entre Donald Trump, la CIA et le FBI sont tendues depuis les accusations d'ingérence de la Russie dans la campagne présidentielle. Si les dossiers contiennent des informations compromettantes sur ces deux institutions, ne serait-ce pas dans l'intérêt de Trump de les dévoiler?

Donald Trump mène une guerre contre les services de renseignement depuis plus de dix ans, car il estime qu'ils ont trompé les Américains dans le cadre de la guerre en Irak, que l'histoire des armes de destruction massive, n’était qu’une vaste fabrication pour justifier une guerre qui à l’arrivé a couté des milliers de vie et des milliers de milliards de dollars… Depuis son élection à la présidence il est entré en conflit avec l’ancien directeur du FBI, M. James Comey, et lui et son équipe de campagne sont sous le coup d’une enquête officielle menée par un autre ancien directeur du FBI, M. Robert Mueller. De plus il a maintes fois critiqué la CIA concernant la qualité des renseignements fournis et notamment les fameux « daily briefings » auxquels il a renoncés… Donald Trump n'a aucune raison de vouloir protéger ces services. Et il gagnerait même à ce qu’un grand ménage soit fait au sein de ces deux institutions… 

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