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Alerte générale : oui, il est vraiment urgent de réformer le système des retraites
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Dans un entretien accordé au Parisien hier lundi 12 août, Julien Dray estime que "la réforme des retraites n'est pas urgente". Mais la France peut-elle encore se permettre d'attendre ?

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : Dans un entretien accordé au Parisien lundi 12 août, Julien Dray, représentant de l'aile gauche du PS, estime que "la réforme des retraites n'est pas urgente". Partagez-vous ce point de vue ? La France peut-elle encore se permettre d'attendre ?

Philippe Crevel : Julien Dray reprend la position retenue dans le cadre du projet du PS sur les retraites. Le déficit ne serait que purement conjoncturel, le retour de la croissance étant censé résoudre le problème. Ce n'est pas complètement faux. Il est certain que si la croissance était de 3  % et le taux de chômage ramené à 4,5 %, l'assurance-vieillesse dégagerait rapidement des excédents. Il n'en demeure pas moins que nous sommes loin d'obtenir de tels résultats et il n'est pas interdit de penser que nos déficits et nos dettes entravent notre économie. A défaut de plein emploi, d'ici 2020, le déficit des régimes de retraite atteindra 20 milliards d'euros. Depuis déjà plus de cinq ans, nous accumulons des pertes de plusieurs milliards d'euros ne faisant que s'ajouter aux déficits de l'assurance-maladie et de l'Etat. Les investisseurs qui permettent à la France de vivre à crédit n'attendront pas indéfiniment. 

Plutôt que s'attaquer au dossier des retraites, Julien Dray préconise de mettre l'accent sur la relance en "boostant la consommation des ménages". Au moment où pointe l'espoir d'une timide reprise, la réforme des retraites qui pourrait se traduire par une nouvelle hausse des cotisations, n'est-elle pas susceptible de plomber l'économie ?

Certes, il n'est pas faux de souligner que l'augmentation des cotisations ou de la CSG pourrait freiner la reprise de l'économie en réduisant le pouvoir d'achat des salariés. Néanmoins, la France souffre avant tout d'un problème d'offre. Il ne convient pas de booster la consommation mais contribuer à rendre plus compétitive l'offre. Or, nos entreprises sont handicapées par des taux de marge très faibles. La baisse de l'investissement constitue une sourde menace pour l'avenir. Booster la consommation revient à favoriser les importations et donc le déficit commercial. Or, la France se doit de réduire son déficit commercial afin de retrouver des marges de manœuvre financières. 

Les conséquences négatives d'une telle réforme, notamment en termes de chômeurs supplémentaires, pourraient-elles être finalement plus lourdes que ses éventuels effets positifs en termes de réduction du déficit ? Et si la croissance était le seul moyen d'espérer combler le déficit des retraites ?

Évidemment que la croissance résoudrait une grande partie de nos problèmes mais elle ne se décrète pas. La croissance se mérite, se construit, s'organise. Il nous faut améliorer notre compétitivité, développer de nouveaux secteurs d'activité, investir dans la recherche, dans l'innovation... Nous ne pouvons pas nous contenter d'espérer que le retour de la croissance dans le sud de l'Europe ou le plan de relance de la consommation en Allemagne permettront de gagner les deux points de croissance qui nous manque. Il faut cesser uniquement de compter sur les autres ; il faut  au contraire nous prendre en main.

A l'inverse, la réforme des retraites peut-elle être l'une des conditions nécessaires de cette croissance ? Comment ?

La réforme des retraites est une brique de la restauration de notre économie. La réforme devrait se fixer comme objectif le taux d'emploi des seniors. Or, une population active plus nombreuse contrairement aux idées malthusiennes qui ont la cote dans notre pays est une source de croissance. A ce titre, il conviendrait de jouer comme tous nos partenaires sur l'âge légal de départ à la retraite en le portant progressivement à 65 ans.

Il faudrait certainement au nom de l'équité et au nom de la transparence faire converger les différents régimes de retraite vers un régime unique par points en comptes notionnels. Enfin, la France devrait également réellement développer un étage par capitalisation. L'absence de fonds de pension français pénalise les entreprises françaises dans leurs quêtes de fonds propres. Elles sont contraintes de rechercher l'appui de fonds étrangers pour les plus grandes d'entre elles. La création d'un véritable étage d'épargne retraite permettrait d'irriguer notre économie en capitaux. A défaut de cet étage, le gouvernement a du instituer la BPI qui est en soi une véritable usine à gaz. La résolution du problème du financement des retraites serait une source de confiance. Les jeunes générations cesseraient de penser qu'ils sont victimes d'un transfert de charges de la part des générations des baby-boomers. 

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