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Mme Prévost-Desprez ne comprend pas qu'il n'y a pas de justice sans respect de la procédure
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Séparation des pouvoirs

Les "révélations" de la juge Prévost-Desprez parue dans un livre de deux journalistes du "Monde" sèment le trouble, notamment dans le monde juridique. Réaction de Maître Morain, avocat au barreau de Paris.

Eric Morain

Eric Morain

Eric Morain est avocat au barreau de Paris.

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Il y a forcément quelque chose de gênant, pour ne pas dire plus, dans les « révélations » de la juge Madame Prévost-Desprez au travers d’un livre écrit par deux journalistes et dont Libération et l’Express se font l’écho cette semaine.

Indépendance

En ces temps difficiles pour l’institution judiciaire parfois malmenée ou incomprise, la seule et véritable arme des acteurs de justice, qu’ils soient juges ou avocats, restent la déontologie dont le socle est l’indépendance.
C’est l’indépendance qui force le respect, qui fait incliner les puissants après leur avoir tenu tête et qui équilibre la balance de nos salles d’audience.
C’est l’indépendance - pas seulement le mot, mais aussi la chose - qui donne ou rend la confiance et qui rassure. C’est le seul combat, et il est parfois de taille, qui honore.

Nos robes de justice ne sont pas des battle-dress d’un combat politique mais les habits d’un même culte que nous partageons avec les autres desservants.
Les confidences reçues hors procès-verbal ne sont pas des avatars de justice, ni même des caricatures, mais un non-sens, ontologiquement un véritable opposé de la justice qui a pour sœur jumelle la procédure, gardienne des libertés, et qui forme cœur avec elle. Si toutes les paroles se valent alors plus aucun mot n’a de valeur. La parole d’un juge ne vaut que dans sa décision rendue au nom du peuple français, elle fait sens, elle est à ce titre performative : ce qui est dit se fait et se réalise.

Apostat

La parole d’un témoin ne prend sens qu’avec son serment, son approbation et sa signature. Et se renier ou ne pas tout dire est un parjure.
Tout le reste ne fait que brouiller, embrouiller, surfant sur un effet d’aubaine ou un règlement de compte qu’on ne peut s’empêcher de croire politique ou instrumentalisé… ou les deux.

Pour un juge en exercice, porter des allégations dans un livre, dans un article, dans une émission de télévision sur une affaire dont il a lui-même eu la charge dans un temps non encore prescrit est une route de traverse qui fait craindre le dérapage vers des enjeux qui n’ont rien à voir avec la justice.
Il y a des lieux de justice, il y a un temps de la justice, il y a des acteurs de justice, il faut les respecter tous trois coûte que coûte sinon qui nous gardera de nos juges ?

Comme il y a ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas, il y a ceux qui croient en la justice et les autres. Je crains que Madame Prévost-Desprez ne soit devenue apostat.

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