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A quoi faut-il s’attendre de l’ouverture des archives sur JFK décidée par Trump contre l’avis des agences gouvernementales ?
©Reuters

La vérité est ailleurs... ou pas

Donald Trump a décidé de ne pas entraver la divulgation de la fin du dossier sur l'assassinat de Kennedy survenu le 23 novembre 1963 malgré l'opposition de certaines agences gouvernementales.

François Durpaire

François Durpaire

François Durpaire est historien et écrivain, spécialisé dans les questions relatives à la diversité culturelle aux Etats-Unis et en France. Il est également maître de conférences à l'université de Cergy-Pontoise.

Il est président du mouvement pluricitoyen : "Nous sommes la France" et s'occupe du blog Durpaire.com

Il est également l'auteur de Nous sommes tous la France : essai sur la nouvelle identité française (Editions Philippe Rey, 2012) et de Les Etats-Unis pour les nuls aux côtés de Thomas Snégaroff (First, 2012)

 


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Atlantico: Quelle est l'histoire controversée de l'affaire de l'assassinat de Kennedy et du silence suspect des administrations successives sur l'enquête ?

François Durpaire : En 1992, une loi prévoit l'ouverture d'un certain nombre de documents et on est au terme aujourd'hui de ce processus. Il y a deux thèses qui s'opposent. L'une considère que l'on a gardé le meilleur pour la fin, que l'on va avoir des révélations qui donneront enfin la vérité parce que l'administration a retenu dans ce dossier les données les plus sensibles tout au long des années. L'autre consiste à dire que l'on connaît déjà la vérité depuis 50 ans : il y a un seul tireur, Lee Harvey Oswald. La course à la transparence a déjà fait accoucher une très grande partie des 5 millions de pages existantes. Cette hypothèse n'est pas acceptée par une majorité d'américain (plus d'un américain sur deux croit à l'idée d'un complot monté ou par les cubains, ou par les castristes, anticastristes, ou encore l'URSS mais aussi par le FBI, la CIA ou la mafia de Chicago). Et même si ces documents n'apportent pas de révélation, ceux qui ne croient pas en la culpabilité unique de Lee Harvey continueront à croire en un complot parce qu'il y a des documents qui ont été détruit en 1995 et l'on pourra toujours dire que la vérité se cachaient dans ces documents.

Un représentant du Conseil de sécurité nationale a déclaré au Washington post que certaines agences gouvernementales avaient récemment demandé au président de retenir certains documents. À quoi peut-on s'attendre et qui peut être embarrassé encore par le dossier Kennedy un demi-siècle après ?

Dans la loi de 1992, le président peut s'opposer à la déclassification d'un certain nombre de dossier pour une raison qui tient au "trouble à l'ordre public" : ce trouble peut être de deux nature, intérieur ou extérieur. Intérieur parce qu'il y a un certain nombre d'agent du FBI, de la CIA ou des service secrets sont toujours en vie et donc peuvent avoir une responsabilité engagée. Extérieur parce que la nature des révélations pourrait avoir un impact sur la géopolitique mondiale, pas tant dans les relations avec la Russie (la guerre froide est terminée) mais plutôt sur le processus de normalisation actuel des relations avec Cuba.
Au sujet des thèses complotistes, il y a un certain nombre de questions qui se posent et qui résistent toujours, même à la vérification. Trois exemples. D'abord on effectuer des tirs pour montrer que 3 balles en l'espace de 6 secondes, c'est possible. Deuxièmement on a montré avec le shooting reconstruction, qu'une balle a pu toucher à la fois Kennedy et le gouverneur du Texas, Connally, ce qui invalide les questions autour d'une balle magique. Troisièmement il y a cette question de la tête de Kennedy qui part en arrière : on a dit alors qu'il aurait eu un autre tireur, situé donc devant, sur la fameuse butte herbeuse. On a montré ici encore que la destruction du cerveau peut entrainer un mouvement de la tête vers l'arrière. Malgré toutes ces preuves scientifiques avancées, ceux qui sont partisans du complot continuent à voir quelque chose de louche. Pourquoi ? Dans l'heure qui suit l'assassinat, c'est la sidération : le chef de la première puissance du monde est assassiné en pleine guerre froide. Va-t-on dans une 3ème guerre mondiale ? est-ce que ce sont les russes ? les cubains ? Peut-être a-t-on voulu cacher la vérité pour éviter une réaction américaine qui aurait entrainé une guerre catastrophique. 
On pose aussi la question de la responsabilité de la CIA et du FBI: Lee Harvey était l'équivalent d'un fichier S, une personne très bien connue des services de sécurité et qui participait même, à certain moment, à des opérations qui menées par le FBI. Pourquoi, connaissant les projets d'assassinat qu'il avait contre Kennedy, rien a été fait ? On reproche à la CIA et au FBI d'avoir voulu couvrir des erreurs, des failles ou peut-être même des complicités volontaires. Il faut rappeler enfin que Allen Dellus, ancien directeur de la CIA, que Kennedy avait fait démissionner, était lui-même membre de la commission Warren, donc juge et parti puisque qu'à la fois ancien directeur de la CIA et co-responsable de l'enquête. La dernière chose, la plus importante peut-être, qui renforce le mystère, c'est le deuxième assassinat, celui du tueur, qui fait disparaitre les possibilités de savoir les motivations de Lee Harvey (sachant que lui-même parlait de son innocence avant de pouvoir s'expliquer plus longuement).

Que nous apprend la décision de Trump, de ne pas intervenir (comme la loi lui en donnait le possibilité) dans l'application de la loi, sur son action politique ?

Il faut rappeler que Donald Trump fait partie de ces américains qui ne croient pas en la version unique du tueur et qui croient à la théorie du complot. Il est un des plus célèbres partisans des thèses complotistes. On se souvient notamment qu'il a mis en question la responsabilité du père d'un de ses opposants républicains, Ted Cruz, en le soupçonnant, à propos de photo sur lesquelles il apparait avec Lee Harvey, d'avoir eu des liens avec l'assassinat !
Trump a toujours été l'un des défenseurs de la transparence. Il dénonce aux institutions et à l'état fédéral de "cacher des choses". Il est même l'un des pères d'un certain nombre d'idées complotistes. Cette décision est conforme à sa personnalité. Mais cela correspond aussi à un désir des américains puisqu'encore un américain sur deux ne croient pas en la thèse d'un tireur d'élite et attend des révélations supplémentaires. Le président va dans le sens de l'opinion. C'est aussi une manière de pour lui de dire qu'il est président et ne couvre aucun agissement des agences fédérales américaines. Mais il ne faut pas attendre LA vérité. LA vérité, on la connait en fait peut-être depuis 50 ans et on refuse de la voir.  

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