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2024 : inflation par les profits… ou par les prix administrés par l’Etat ?
©INA FASSBENDER / AFP

Spécificité française

Longtemps, les projecteurs - non sans raison mais peut-être de manière disproportionnée - ont été braqués sur l'inflation par les profits. Peu à peu, une autre inflation commence à faire son apparition : l'inflation des prix administrés.

Alexandre Lohmann

Alexandre Lohmann

Alexandre Lohmann est chef économiste dans un fonds d'investissement brésilien.

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Dans ses indices spéciaux, Eurostat classe les prix en deux catégories : ceux qui répondent à une logique d'économie de marché (ci-après « prix libres ») et les prix administrés qui sont régulés en grande partie ou complètement par les pouvoirs publics.

En février 2024, les prix administrés représentent environ 14.89% de l'indice d'inflation en France (plus que dans la plupart des pays européens – la moyenne de la zone euro étant de 11,50%) et ils concernent principalement les prix des différents services publics (santé, éducation, transports en communs), les prix de l’Energie (gaz, électricité) et ceux du tabac.  

L'analyse détaillée de l'évolution des prix libres et administrés permet de voir un mouvement de divergence entre ces deux types d'inflation, comme nous pouvons le voir sur le graphique 1. 

Les deux inflations ont évolué de manière similaire jusqu'à la mi-2023. Depuis les prix des prix libres ont connu une forte décélération tandis que nous assistons à une ré-accélération soutenue de l'inflation des prix administrés.

Ainsi, en février 2024, malgré le fait que les prix administrés représentaient uniquement 14% de l'indice d'inflation, ils étaient responsables de 37,89% du taux en glissement annuel.

Graphique 1. Inflation des prix administrés et des prix libres en glissement annuel (France)

Cette divergence est en bonne partie due aux prix de l’énergie notamment de la hausse de l'électricité et du gaz avec le débouclage du bouclier tarifaire. Toutefois, même sans les prix de l’énergie, le diagnostic d'une accélération des prix administrés à contresens du reste de l'inflation demeure (Graphique 3) à mesure que les difficultés budgétaires de l'Etat incite à l'augmentation de certains autres prix administrés qui avaient été « réprimés » par le passé. Par exemple, l'inflation annuelle de l´item « soin dentaires » est passée de -0,8% en septembre 2023 à 5,4% en février 2024 à la suite de la hausse du ticket modérateur en octobre (graphique 4). Un mouvement similaire doit être attendu sur les produits pharmaceutiques en mars avec le doublement de la franchise.

Graphique 2. Inflation des prix des services hospitaliers en glissement annuel (France)

Graphique 3. Inflation des prix administrés ex-énergie et des prix libres en glissement annuel (France)

Comme nous pouvons le voir avec le graphique 5, cette divergence est une spécificité de l'inflation française et ne se retrouve pas au niveau de la zone euro où prix libres et administrés ralentissement de concert.

Graphique 4. Exemple de forte augmentation des prix administrés – les soins dentaires à partir d'octobre 2023.

Graphique 5. Inflation des prix administrés et des prix libres en glissement annuel (Zone Euro) 

Les prix administrés ont beaucoup plus augmenté en France que dans le reste de la zone euro. Ainsi, depuis 2020, la France se classait 6ème pays – sur les 20 pays de l'Union européenne – qui connaissait la pire inflation des prix administrés – (Attention cependant, car ces indices ne sont pas strictement comparables, étant composés de paniers sensiblement différents selon les pays). 

Nous sommes donc une phase où les prix administrés par l'Etat/le secteur public sont l'un des drivers essentiels de l'inflation et il s'agit d´une « spécificité française ». Comme nous l'avons fait remarquer, les difficultés budgétaires de l'Etat devraient nourrir cette inflation dans les mois/années à venir dans la mesure où l´augmentation de l´inflation administrée permettrait de limiter le déficit de l´Etat sans recourir à des hausses d´impôts. 

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