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"Il n’y a plus de respect" : Aïcha, Franco-Algérienne, vote FN pour défendre les "racines chrétiennes" de la France
©eelv.fr

Bonnes feuilles

Après avoir passé cinq ans dans les plus hautes sphères du pouvoir, et notamment à l’Élysée auprès de François Hollande, j’ai voulu comprendre ce qui poussait ces femmes et ces hommes à voter Marine Le Pen. Comme simple citoyen, sans pouvoir et sans préjugés, je suis parti sur les routes de France pour retrouver la réalité d’un monde éloigné des ors de la République. Extrait de "Ils votent Marine et ils vous emmerdent !" de Christophe Pierrel, aux éditions La Tengo.

Christophe Pierrel

Christophe Pierrel

Christophe Pierrel a été chef de cabinet adjoint de François Hollande à l'Elysée. Il a 33 ans et vit à Gap.

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Ma rencontre la plus surprenante de la matinée a lieu, finalement, avec Aïcha. Cette Franco-Algérienne, âgée d’une cinquantaine d’années — elle a obtenu la naturalisation française il y a vingt ans —, vit dans le même immeuble que Denis. Pour elle, la décision est prise, elle votera sans état d’âme pour Marine Le Pen à la prochaine élection présidentielle!

Soutenir le Front national, c’est pour elle d’abord se sentir fière d’être Française et vouloir se poser en défenseur des «racines chrétiennes» de la France. Se dire : «La France, soit tu l’aimes, soit tu la quittes.»

«Je suis Française, moi! s’enorgueillit-elle. Je n’ai rien à craindre. Je paie mes impôts, mes enfants ont grandi ici. Ils sont 100% Français. D’ailleurs, je leur ai interdit de prendre la double nationalité afin qu’ils ne soient pas considérés comme moins intégrés que les autres. La seule chose que je regrette, c’est de ne pas leur avoir donné des prénoms européens.»

C’est aussi exiger plus d’ordre et d’autorité.

«Il n’y a plus de respect. J’en ai marre de voir des p’tits cons mettre le bazar dans nos quartiers, voler nos personnes âgées. Ça commence à l’école. On ne veut pas que nos enfants y fassent du sport ou de la chanson. On veut qu’ils apprennent le français et les maths. C’est la seule chance pour nos jeunes de réussir dans la vie. On ne doit pas laisser aux parents toute l’éducation. La plupart des pères et mères travaillent beaucoup, ils n’ont pas le temps de s’occuper de leurs petits. Souvent, ils ne savent pas faire. Il faut redonner du pouvoir aux profs. À l’époque, ils pouvaient punir sans avoir les familles sur le dos. La seule qui peut remettre de l’ordre, c’est Marine Le Pen. Elle a de l’autorité, elle n’est pas raciste. Pas comme Jean-Marie Le Pen! Nous, les Maghrébins, on peut aussi voter pour elle.»

Malgré ses origines algériennes, Aïcha partage les propositions du FN en matière d’immigration : «Vous savez, quand on est arrivés en France, on a tout fait pour s’intégrer. On a travaillé dur. On n’a pas fait de bruit. On a accepté les logements qu’on nous donnait, parfois ceux que les “bons Français” ne voulaient plus. On n’a pas râlé. On nous a dit de nous installer dans le Cantal, on l’a fait. La nouvelle génération de migrants, elle veut tout et tout de suite, sans faire d’efforts. Comme si cela lui était dû. Je ne suis pas d’accord. Elle doit accepter de se battre, sinon elle ne vient pas! Il n’y a plus de place ici pour tout le monde.»

Pour elle, la France n’a plus les moyens de se montrer aussi solidaire et accueillante que dans le passé. La préférence nationale s’impose : «Les temps ont changé. Aujourd’hui, nous ne sommes plus un très grand pays. On ne peut plus tout se permettre. Au lieu de donner de quoi se loger à ceux qui viennent d’arriver, je préférerais qu’on rénove mon appartement. Cela fait quelques années que je demande qu’il soit mieux isolé, et l’office HLM refuse.»

Devenue égoïste par la crainte d’être déclassée dans une société en crise, Aïcha ne veut pas voir ce qu’elle a mis tant de temps à conquérir se réduire avec l’arrivée de nouveaux migrants. La France ne dispose que d’un «seul gâteau de la protection sociale», elle souhaite en conserver sa part.

Tous les partis politiques ont une grande responsabilité dans ce repli sur soi et ce rejet des autres : l’extrême droite par son discours de stigmatisation permanent, la gauche et la droite pour ne pas avoir assez défendu les valeurs de la République et avoir couru de manière démagogique, pour un supposé gain électoral, après les idées du Front national.

Nicolas Sarkozy a été l’un des principaux instigateurs de ce rapprochement idéologique avec les thèses de la droite «dure». Sur les conseils notamment de Patrick Buisson, il a repris à son compte dès 2007 des propositions du FN, afin de ramener à lui une partie de son électorat. Il accélérera ce glissement au cours de la campagne présidentielle de 2012, allant jusqu’à déclarer le 24 avril 2012 que «Marine Le Pen est compatible avec la République».

Extrait de "Ils votent Marine et ils vous emmerdent !" de Christophe Pierrel, aux éditions La Tengo

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