Le 12 février prochain, soit dix jours avant l’ouverture du Salon de l’agriculture 2014, sortira sur les écrans français un film d’animation intitulé Tante Hilda !, qui se présente comme une « fable écologique ». Il devrait susciter un certain émoi dans le secteur agroalimentaire et les milieux agricoles en donnant quelque peu l’impression aux agriculteurs et aux industriels d’être les héros malgré eux d’une sorte de remake de Moi, moche et méchant, autre film d’animation récent… L’histoire du film est, en effet, la suivante : « Tante Hilda, amoureuse de la nature, conserve dans son musée végétal des milliers de plantes du monde entier.
Beaucoup sont en voie de disparition. Parallèlement, une nouvelle céréale, Attilem, mise au point par des industriels, se cultive avec si peu d’eau, sans engrais, et produit des rendements si prodigieux, qu’elle apparaît comme la solution miracle pour enrayer la faim dans le monde et prendre le relais du pétrole dont les réserves s’épuisent. Mais la catastrophe n’est pas loin… ». Dans la note d’intention du réalisateur Jacques-Rémy Girerd, que l’on peut retrouver dans le dossier de presse du film, Tante Hilda est présentée comme l’« archétype de l’écolo-bobo : pull-over tricoté à la main, jupe longue et certitudes enflammées ». Elle s’oppose à sa sœur, la méchante Dolorès, décrite comme « PDG cruelle et cupide à la tête d’un groupe agro-alimentaire tentaculaire », qui s’appelle Dolo dans le film et dont l’activité principale consiste à fabriquer une plante génétiquement modifiée qui s’appelle NGO. Celle-ci fait bien entendu référence aux OGM.
Le réalisateur du film, Jacques-Rémy Girerd, se défend dans une interview pour Consom’action (n°73) d’être un « donneur de leçons » ou explique dans le dossier de presse ne pas avoir souhaité faire un « film à thèse » ou didactique. Il s’agit néanmoins d’un film ouvertement militant, qui tend à véhiculer trois types de critique écologiste somme toute assez classiques : une critique des dérives supposées de la science et du progrès, notamment à travers la question des OGM, de l’industrie agroalimentaire, et de l’agriculture intensive ou industrielle. Dans un entretien accordé début janvier à Agra presse, Jacques-Rémy Girerd dénonce ainsi une « science sans conscience » et une « fuite en avant » : « aujourd'hui on a l'impression que tout est possible. On invente une solution qui a une faille. Alors on invente quelque chose pour combler la faille. Et ainsi de suite. On est dans une fuite en avant où la science, la recherche, le génie humain doit tout résoudre. Alors qu'il faudrait parfois revenir un peu en arrière pour prendre une autre direction. »
Un point de vue militant
Le dossier de presse du film explique également que « le film milite contre le cynisme des grandes multinationales ». L’actrice Josiane Balasko, qui prête sa voix à Dolorès, explique de son côté que « la culture des OGM est une forme de diktat, et la situation ne fera qu’empirer à long terme. Je suis entièrement d’accord avec le combat d’Hilda. […] il est essentiel qu’on se mobilise contre l’obligation d’acheter des plants génétiquement modifiés. Les gens qui vont arracher les champs d’OGM, et qui risquent la prison, sont très courageux ; ils se sentent investis d’une mission pour protéger la diversité biologique et écologique ». Enfin, dans le même entretien accordé à Agra presse, Girerd expose sa vision de l’agriculture actuelle, qui est forcément critique : « Je n’ai pas une vision noire de l’agriculture, mais une vision critique de certains choix d’une agriculture qui a voulu être hyperproductive, et de ce que l’industrie agroalimentaire fait subir aux agriculteurs ». Il défend en toute logique un autre modèle agricole : « Alors comment je vois l’agriculture ? Je pense qu’il y a vraiment un modèle à revoir. Je vois qu’il faut rompre avec l’intensité extrême. Car ça va dans le mur : regardez la Bretagne ! Je pense que les grandes exploitations, ça na pas de sens, il faut revenir à une agriculture plus humaine. […] Avec l’agriculture industrielle tout devient abstrait. Et personne n’y trouve son compte, à part les intermédiaires et les financiers. Ce n’est pas normal. Il faut moraliser tout ça absolument ». Ces critiques sont bien entendu loin d’être nouvelles. Cependant, la particularité de ce film est qu’il s’adresse avant tout aux enfants.
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