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Racisme anti-Blanc : "le sondage qui dérange", France : haine à tous les étages, Dieudonné, cash machine "insolvable" : en digne héritier du "système"
©Reuters

Revue de presse des hebdos

Mais aussi “ Pourquoi les riches ont gagné ”, Manuel Valls, “ ministre de l’actualité ”, et, et, et… Régis Jauffret, l’écrivain qui en dit plus long sur l’affaire DSK que toute la presse réunie… Ah, y’a encore du biscuit — du salé, du lourd, mais aussi du fin — dans la RP !

Barbara Lambert

Barbara Lambert

Barbara Lambert a goûté à l'édition et enseigné la littérature anglaise et américaine avant de devenir journaliste à "Livres Hebdo". Elle est aujourd'hui responsable des rubriques société/idées d'Atlantico.fr.

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Hé bien, le moins qu’on puisse dire, c’est que ça ne s’arrange pas ! En pleine affaire Dieudonné, tandis que “ Le Nouvel Observateur ” nous invite à un “ Voyage dans une France xénophobe ”, voilà que “ Valeurs actuelles ” nous balance un sondage sur le "racisme anti-Blanc", phénomène sur lequel “ Télérama ” s’est aussi — hasard ? — penché cette semaine… Ah, elle va encore être coton, la revue de presse ! Accrochez-vous, ça tangue — et ça canarde — dans tous les sens, ce jeudi…

Alain Soral dans les pas de Dieudonné

Un petit point Dieudonné, pour commencer ? Pas de papier de fond ni d’enquête sur le sujet dans “ Le Point ”, seulement des extraits du livre “ Vol au-dessus d’un nid de fachos ” (Fayard) de Frédéric Haziza. Le journaliste de La Chaîne parlementaire y raconte notamment les insultes et menaces dont il est victime depuis qu’il a refusé de recevoir Alain Soral dans son émission en novembre 2012. “ Si les Allemands reviennent, pas sûr que je cacherai Haziza dans ma cave ”, lui aurait dit Soral — une phrase qui rappelle étrangement celle de Dieudonné à propos du journaliste de France Inter Patrick Cohen : “ Lui, si le vent tourne, je ne suis pas sûr qu’il ait le temps de faire sa valise. Quand je l’entends parler, Patrick Cohen, je me dis, tu vois, les chambres à gaz… Dommage ” ”. Parmi les commentaires qui circulent sur le Net à son sujet, Haziza a aussi trouvé celui-ci : “ Je pense avoir retrouvé votre grand-père mort à Auschwitz. En effet, un vide-grenier m’a permis d’acquérir une vieille lampe de chevet de marque allemande pourvue d’un abat-jour en cuir ” ”. Passé les bornes, il n’y a vraiment plus de limites.

Dieudonné, “ cash machine ” : les chiffres

Avançons — essayons, en tout cas. Dans le dossier de couverture qu’il consacre à l’antisémitisme et au racisme, “ Le Nouvel Obs ” se penche notamment sur la “ cash machine ” Dieudonné. “ Pour l’heure, note l’hebdo, la polémique favorise son titoir-caisse. Les Productions de la Plume, la société qui s’occupe de ses spectacles et est gérée par sa compagne, Noémie Montagne, affiche 1, 8 million d’euros de chiffre d’affaires et 230 300 euros de bénéfices en 2012. Selon son ancienne productrice, Chrystel Camus, la tournée en province de “ Foxtrot ”, son précédent spectacle (20 dates, 30 000 spectateurs), lui a rapporté 2 millions d’euros supplémentaires en 2013. Et l’invention du geste de la quenelle pourrait également s’avérer juteuse. Une nouvelle société, E-Quenelle, a été créée par Noémie Montagne en janvier 2012 (avec un chiffre d’affaires de 88 100 euros dès sa première année), et la marque, déposée à l’Inpi pour les boissons alcoolisées, non alcoolisées et les sites de communication ”. Il connaît pas la crise, on dirait, “ l’humoriste anti-système ”…

Insolvabilité et appels aux dons

“ Cela n’empêche pas Dieudonné, qui a organisé son insolvabilité, de faire appel aux dons de ses fans pour payer ses dettes, remarque “ L’Obs ”. Il ne se serait toujours pas acquitté des 65 000 euros d’amendes auxquelles il a été condamné depuis 2006, d’après “ Le Parisien ”. Il a aussi été épinglé par la justice pour une ardoise de 887 135 euros d’arriérés d’impôts fonciers et de contributions sociales et s’était fait saisir sa propriété de Saint-Lubin-de-la-Haye, en Eure-et-Loir. Les Productions de la Plume l’ont rachetée fin 2012 pour 551 000 euros, avec l’aide, a prétendu Dieudonné, des dons de son public. “ L’antisémitisme est devenu son fonds de commerce ”, résume Chrystel Camus ”.

“ Le racisme, doxa des temps nouveaux ” en France

Mais venons-en à l’étrange et surprenant “ voyage dans la France raciste ” auquel nous convie “ L’Obs ” ce jeudi… “ Le brouet est amer, mais il faut le digérer : le racisme n’est plus “ politiquement incorrect ”, affirme le mag, il est devenu la doxa des temps nouveaux ”. Hue, c’est à ce point ? Sérieux, on en est là, vraiment ? A lire les neuf pages que le journal consacre au sujet, il le semble, oui. Car ce qu’il en ressort, c’est que tout le monde, en France, aujourd’hui — qu’il soit “ black, blanc, beur ou asiate ” — semble haïr son voisin… Carrément ? Carrément, oui.

Xénophobie à Angers : l’arbre de la Laïcité décapité

Le papier commence par une illustration du racisme des blancs à l’encontre des étrangers. Pour leur enquête, Doan Bui et Isabelle Monnin se sont notamment rendus à Angers, qui “ s’est retrouvée au centre du “ scandale Taubira ”, puisque c’est dans cette ville qu’ “ une gamine aux nattes serrées, d’une famille bien comme il faut du centre-ville, (a hurlé) à la garde des Sceaux : “ Une banane pour la guenon ! ” ”. Depuis, racontent les journalistes, “ les militants ont multiplié les actions commando, les sit-in silencieux — spécialité des “ veilleurs ” —, voire les dégradations : planté en décembre 2012, l’arbre de la Laïcité a été abattu, dans la foulée du scandale Taubira. “ Le climat est nauséabond ”, dit Frédéric Béatse, le maire d’Angers. le 8 décembre, l’arbre a été replanté. Pour être décapité la nuit même. Avec, sur le tronc, un panneau où était écrit : “ Arbre à quenelles ” ”. Décidément, on n’en sort pas.

L’avocate de Leonarda menacée

Poursuivant leur démonstration, les journalistes enchaînent avec les lettres de menace reçues par l’avocate de Leonarda Dibrani, Brigitte Bertin : “ “ Au début, j’ai eu des critiques, au téléphone, mais des menaces, c’est une première ”, dit l’avocate de Besançon. Défendre Leonarda ? Dans le Doubs, relève l’hebdo, beaucoup se sont scandalisés des manifestations parisiennes de lycéens et de tous ces politiques s’émouvant du sort de la jeune fille. Dehors, les Dibrani, et bon débarras ! s’agaçait-on. A Besançon, pourtant, on avait lancé une pétition de soutien, pour éviter l’expulsion d’un jeune vendeur de roses du centre-ville. Mais le garçon était pakistanais. Pas rom ”. Ah ? Et ça fait toute la différence ?

“ L’union sacrée ” des “ blacks, blancs, beurs, asiates ” contre les Roms

Visiblement. “ De Villeneuve-d’Ascq, où les riverains placardent des affiches anti-Roms et veulent se faire justice eux-mêmes, à Marseille, où dans les quartiers Nord les habitants de la cité des Créneaux — en majorité d’origine maghrébine — ont expulsé des Roms manu militari en 2012, en passant par ce bus parisien, où, alors que deux jeunes femmes en jupe colorée valident leur ticket, on entend le chauffeur faire une annonce par haut-parleur : “ Mesdames et messieurs, faites attention à votre portefeuille ”, une fièvre anti-Roms embrase la France. Blacks, blancs, beurs, asiates, c’est l’union sacrée contre le nouveau bouc-émissaire (la minorité ne représente pourtant que 20 000 personnes) ”.

Quand le racisme s’exprime entre les communautés

A partir de là, l’article du “ Nouvel Obs ” détaille et illustre des cas de racisme “ contre des Noirs ”, contre les “ Chinois (qui ont tout pris), même les tabacs ” et contre les musulmans (“ La menace vient du ventre de leurs femmes ”). Fait notable : dans tous les cas, le magazine souligne que la violence à l’égard de l’autre ne s’exerce pas seulement entre les “ blancs ” et les “ étrangers ”, mais aussi entre les étrangers eux-mêmes. Deux exemples : Hicham, ambulancier au Mans, remonté contre les “ Noirs ” qui ont envahi “ le quartier Bellevue ”, ou encore cette conversation dans un taxi, à Paris, entre “ une passagère, d’origine vietnamienne ” et “ un chauffeur, d’origine algérienne. Tous deux français, précise “ L’Obs ”. Le chauffeur : “ Je dis pas ça pour vous, hein, les Chinois, quand même… Moi, j’habitais à Belleville, c’était que des Arabes, avant, mais les Chinois, ils nous ont chassés. (…) Ils ont plein d’argent, ils ont tout pris, les Chinois. Même les tabacs, ils les ont rachetés ! Mais, moi, on ne me la fait pas, j’ai un commerce, aussi, j’ai un flingue, donc, y’a pas intérêt à m’emmerder. Si les Chinois viennent me chercher, ils me trouveront ” ”. Boudiou ! C’est racisme à tous les étages, et dans tous les sens, en France, on dirait !

“ Dans l’antiracisme aussi, le vivre-ensemble est devenu caduc ”

Après un développement sur “ la solitude du militant antiraciste ” — “ Aujourd’hui, plus personne n’ose s’affirmer antiraciste ”, dit au magazine Alain Jakubowicz, de la Licra —, “ Le Nouvel Obs ” remarque symptomatiquement que “ les déclarations de SOS-Racisme, de la Licra et des autres (…), dans l’arène médiatique, ont laissé la place à d’autres organisations plus communautaires. (…) Les Noirs se tournent vers le Cran (Conseil représentatif des Associations noires), les Juifs vers le Crif (Conseil représentatif des Institutions juives de France), les musulmans vers le CCIF (Collectif contre l’Islamophobie en France)… Dans l’antiracisme aussi, conclut le journal, le vivre-ensemble, est devenu caduc ”. C’est sans doute cela le plus dur à avaler — et le plus perturbant, aussi. Sommes-nous à ce point désunis ?

Racisme anti-Blanc : “ le sondage qui dérange ”

Et voilà qu’au milieu de tout ça, “ Valeurs actuelles ” déboule avec un f… nouveau sondage sur “ le racisme anti-Blanc ” ! “ Pour 47 % des Français, gauche et droite confondues, “ le racisme anti-Blanc est un phénomène assez répandu en France ”, annonce l’hebdo de droite. (…) “ Si les électeurs de gauche se disent moins convaincus que ceux de droite, plus d’un quart d’entre eux (28 %) considère cependant ce phénomène comme “ assez répandu ”, ce qui est loin d’être négligeable ”, relève Jérôme Fourquet, directeur du département opinion de l’Ifop. Une proportion qui atteint même… 44 % chez les sympathisants du Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon — alors même que celui-ci est, sur cette question, dans le déni le plus total ”. En voilà une chose étonnante… un commentaire, Jean-Luc ? Non ? Bon, ben, y’a plus qu’à écouter l’analyse de “ Valeurs actuelles ”, alors… bah, c’est pas drôle du tout, ce jeu, z’en avez pas un autre ? Non : on fait avec ce qu’on a. Dommage, hein ?

Pourquoi le “ racisme anti-Blanc ” se porte plus à droite qu’à gauche

“ Si les électeurs de gauche se montrent, dans l’ensemble, moins sensibles à ce sujet, c’est d’abord pour des raisons idéologiques, décrypte Jérôme Fourquet : le racisme anti-Blanc n’est pas un thème porté par les partis de gauche, tout au contraire ” ”. Autre explication, enchaîne “ V.A. ” : une surreprésentation, au sein de ce même électorat, des catégories de Français les moins réceptives à ce problème, notamment les plus jeunes (18-24 ans) et les plus aisés (professions libérales et cadres supérieurs), qui sont respectivement 65 et 58 % à juger ce phénomène “ assez marginal ”. A l’inverse, et comme ne manque pas de le souligner “ Valeurs actuelles ”, l’électorat de droite, qui estime, à 66 %, que le racisme anti-Blanc est “ assez répandu ”, est constitué, lui, par les “ catégories de la population se considérant comme les plus touchées par ce phénomène : artisans et commerçants (50 %), employés (51 %) et ouvriers (55 %) ”. Comme quoi, on se sent toujours plus concerné par ce qui nous touche de près… Est-ce là encore le signe de notre fâcheuse et croissante tendance à nous replier, nous recroqueviller sur nous-mêmes ? Cela ne fait pas grand doute. Reste le fond de l’affaire : au vu de ce sondage, peut-on, doit-on, continuer de considérer le “ racisme anti-Blanc ” comme un mythe, une vilaine projection de nos peurs et de notre incapacité à faire face à la réalité, à nous assumer tels que nous sommes ?

Le racisme anti-Blanc, sujet tabou, même à droite

Ah, que l’on aurait aimé que “ le Nouvel Obs ”, dans son enquête de 9 pages sur “ La France raciste ”, consacre un paragraphe, ou deux, à cette question ! Cela nous aurait donné des arguments, des pistes de réflexion face à ce “ sondage qui dérange ” tellement… Les politiques font-ils mieux ? A gauche, c’est le mutisme. Et à droite, ça n’est pas mieux… Même “ Valeurs Actuelles ” le dit : “ Ce débat apparaît (…) à haut risque pour l’UMP, le plus divisé des grands partis sur le sujet. “ La question du racisme anti-Blanc confirme l’existence de deux lignes opposées à l’UMP, avance le directeur du département opinion de l’Ifop : d’un côté, une “ droite décomplexée ”, dont les idées sont souvent proches de celles du FN ; de l’autre une aile plus modérée, de tradition chiraquienne ou centriste. Si Jean-François Copé décidait de faire campagne sur ce thème très porteur à droite, il risquerait de heurter la frange modérée de son parti, laquelle, bien que minoritaire, est importante ”. Marine Le Pen, ayant, elle, tout intérêt à s’en emparer : la question obtient une quasi-unanimité au FN tout en séduisant près de six électeurs UMP sur dix ”. Ah, ça actionne de drôles — et de dangereux — ressorts, cette histoire de “ racisme anti-Blanc ”… Question : pour désamorcer la bombe, la gauche n’aurait-elle pas intérêt à s’y coller vite fait — et tant qu’il en est encore temps — histoire de limiter les dégâts ?

La Licra et le Mrap reconnaissent le racisme anti-Blancs

Et la presse, elle pourrait pas un peu se pencher sur le sujet, hmmm ? Figurez-vous que “ Télérama ” — gloire à lui ! — l’a fait… bé oui. “ Le racisme anti-Blancs existerait donc, au même titre que le racisme anti-arabes, anti-Noirs ou anti-Juifs ? C’est en tout cas, note l’hebdo, ce que pense la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), qui a mis le feu aux poudres en se portant partie civile dans la seule affaire de racisme anti-Blancs portée devant les tribunaux, en avril 2013. Le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap) lui avait ouvert la voie en incluant aussi ce racisme dans les “ propositions d’orientation ” de son congrès de 2012. “ Ces associations font fausse route, déplore (le sociologue) Eric Fassin. En renvoyant dos à dos tous les racismes, elles font perdre son sens au phénomène raciste, qui sera toujours un rapport social de domination ” ”. Comment ça ?

Le racisme anti-Blancs, “ notion douteuse et glissante ”

“ Pour lui (…), explique le journal, le racisme ne peut en effet fonctionner que dans un sens : des dominants vers les dominés. Victimes des discriminations quotidiennes (à l’emploi, au logement, etc.), les minorités visibles ne sauraient être racistes. S’il peut exister, à la marge, des violences, des insultes dirigées contre les Blancs, celles-ci restent individuelles, contextuelles, réactives — jamais structurelles. Non seulement “ le racisme anti-Blancs ” est une notion douteuse, glissante, mais comparer le racisme du dominant et le “ racisme édenté ” (Albert Memmi) du dominé, sans force, sans pouvoir, est une venimeuse opération politique, destinée à opprimer davantage les victimes… ”. Si l’on comprend l’argument et la logique du sociologue, on ne peut s’empêcher de se demander si son indice de mesure — le rapport de dominant à dominé — est valable dans tous les cas… A l’heure d’aujourd’hui, qui, a fortiori chez les plus fragiles d’entre nous, est assuré de dominer quoi que ce soit ? Pas convaincu, non plus, “ Télérama ” enchaîne…

“ Le Noir qui veut blanchir sa race est aussi malheureux que celui qui prêche la haine du Blanc ”

“ Le débat, lui, n’a en tout cas rien d’édenté, indique l’hebdo, mais risque, faute d’études sérieuses, de s’enliser dans des malentendus et des instrumentalisations idéologiques et de ne devenir finalement qu’un prétexte, un os à ronger. Ecoutons plutôt Frantz Fanon : “ Le Noir qui veut blanchir sa race est aussi malheureux que celui qui prêche la haine du Blanc ” ”. En voilà une parole sage… En attendant, et comme le souligne on ne peut plus justement “ Télérama ”, il y a urgence à étudier sérieusement la question avant qu’elle ne soit totalement instrumentalisée. Manuel, Christiane, François (Fillon), Nicolas… à bon entendeur…

“ Pourquoi les riches ont gagné ”

Mais changeons — enfin — de sujet. Souriez ! ? C’est encore Noël dans “ L’Express ” ! Pour son premier numéro de l’année, l’hebdomadaire (encore en vacances la semaine dernière) propose un dossier “ L’année 1914 ” et un spécial “ Les dernières folies des riches ” qu’on aurait plus vu dans un numéro d’été, ambiance Saint-Tropez, vous voyez… Il faut ici préciser que cette “ enquête ” spécial riches a surtout pour vocation d’accompagner les bonnes feuilles du livre “ Pourquoi les riches ont gagné ” (Albin Michel) de Jean-Louis Servan-Schreiber, frère de “ JJSS ”, fondateur de “ L’Express ”. D’après le magazine, ce livre “ part d’un constat : depuis six ans, en Occident, l’obsession politique et médiatique de “ la crise ” occulte le fait que nous assistons, depuis 2000, à une explosion de la richesse mondiale. La planète compterait désormais plus de 12 millions de millionnaires, dont 500 000 en France ! Et à l’autre extrémité du spectre, la pauvreté sur la planète, s’est aussi réduite plus vite que prévu. Pourtant, les inégalités s’accroissent et peuvent déstabiliser des sociétés obsédées par l’égalitarisme. Pour “ JLSS ”, conclut le journal, la réduction de cette fracture va devenir la question primordiale des vingt années à venir ”.

“ Il n’y a plus d’idéologies antiriches ”

Un petit extrait pour prendre la température du livre ? Comme c’est vous, on vous a gardé ce qui nous a semblé le plus intéressant… “ La misère recule enfin dans le monde, écrit Jean-Louis Servan-Schreiber. (…) Le ressentiment à l’encontre de la richesse s’atténue. En même temps, la demande d’égalité, si rituelle dans le discours républicain, n’est plus politiquement prioritaire. Dans les continents en forte croissance, on insiste plutôt sur l’égalité des chances que sur celle des revenus. (…) Dans les pays plus stagnants, la revendication sociale se porte sur le maintien des acquis (…). La pression sociale est plus réaliste et souvent résignée. Il n’y a plus d’idéologies antiriches, comme ce fut longtemps le cas entre la Révolution française et la dissolution du Parti communiste de l’Union soviétique en 1990. Il n’y a plus d’ennemis de classe, selon la formule léniniste. Les riches sont considérés par la gauche comme une force politique antagoniste et une cible encore privilégiée de contribuables. Mais ces derniers y sont habitués et ont appris à négocier en conséquence. Politiquement, les riches sont devenus des acteurs sociaux puissants et non plus une classe honnie ”. Faut-il le regretter ? 

Les riches, affranchis des codes de la morale ?

Oui, nous dit Jean-Louis Servan-Schreiber… et cela, beaucoup plus clairement dans un autre extrait de son livre, publié dans “ Challenges ” : “ Ni l’Eglise ni la politique n’ont les moyens de pourfendre les riches, écrit-il, car l’une comme l’autre ont besoin de leur argent. (…) A notre époque, morale et éthique ne découlent plus de codes inspirés de textes sacrés ni de “ commandements ”. On a beaucoup commenté le “ Si Dieu n’existe pas, tout est permis ” de Dostoïevski. Une affirmation déconnectée de la réalité, car moins Dieu est présent, plus nos semblables se font sentir autour de nous. Le besoin d’une morale, d’un code pour vivre ensemble paraît plus que jamais nécessaire. La morale ne définit-elle pas ainsi ce qui est acceptable, ou non, par ceux au milieu desquels nous vivons ? (…) Les normes morales actuelles de la richesse se concrétisent autour de trois critères principaux : sa source, son montant et son usage. Souvent un cocktail des trois, dont les proportions varient selon l’histoire personnelle de celui qui formule un jugement ”. Pas très rassurant, hein ?

Manuel Valls, “ ministre de l’actualité ”

Encore des bonnes feuilles dans “ L’Express ” ! — celles du livre de David Revault d’Allonnes et Laurent Borredon, “ Valls, à l’Intérieur ” (Robert Laffont), cette fois. Pas de grande découverte dans les extraits cités, mais quelques anecdotes et quelques formules… Ainsi, on apprend que Manuel Valls “ se vit comme le “ ministre de l’actualité ”. (…) Un impératif l’emporte : “ Mieux vaut surréagir inutilement plutôt que de passer à côté de quelque chose ”, glisse Sébastien Gros (son chef de cabinet) ”. C’est intéressant, ça… Le même Sébastien Gros le dit aussi, un peu plus loin : “ “ Il se plaint quand il ne bouge pas. Quand il a un week-end tranquille, ce qui est rarissime, il me dit : “ Viens, on fait un déplacement ! ” Il en veut toujours plus. Une heure à ne rien faire, pour lui, est une heure perdue ” ”. Bah, c’est pas très gentil pour Anne, ça…

Régis Jauffret, l’écrivain qui en dit plus long sur l’affaire DSK que toute la presse réunie

Ca ne nous emmène quand même pas très loin, tout ça — et encore, on vous a épargné le passage sur la garde-robe de Manuel, qui “ n’a pas très bon goût ”, paraît-il… Cela dit, on n’a pas lu le livre, peut-être que les extraits ne lui rendent pas justice… Après lecture de l’interview que Régis Jauffret donne aux “ Inrocks ” au sujet de son livre sur DSK, “ La ballade de Rikers Island ” (Seuil), une chose est sûre, en tout cas : il est des écrivains capables de faire mieux que des journalistes patentés — en matière d’information, comme d’analyse… Déjà auteur de deux livres consacrés à des faits divers (“ Sévère ” autour du meurtre d’Edouard Stern, et “ Claustria ” sur l’affaire Fritzl), Régis Jauffret le dit d’emblée : ce qui a été le plus difficile dans l’écriture de ce livre, a été de “ le nommer, lui. Son nom avait été trop dit. Ecrire “ DSK ” aujourd’hui, c’est vulgaire ”. L’écrivain, qui avoue avoir “ l’obsession de la réalité ”, le dit aussi : “ quand les médias accordent un poids particulier à un certain angle, on n’a pas accès à la véritable richesse de la réalité, mais seulement à l’impression d’une réalité. (…) Pour ce livre, en plus de voyages à New York et en Afrique, j’ai examiné tout ce qui a été dit sur le sujet et je me suis aperçu que tout le monde a dit la même chose, mais pas tout ”. Et qu’est-ce qui n’a pas été dit, hmmm ?

Jauffret journaliste

Passons sur les petits détails trash — mais frappés au coin du bon sens — que Jauffret révèle au sujet de l’épisode fellation. “ Le fait d’aller à New York, d’y occuper une suite au Sofitel même, raconte Jauffret, m’a permis de réaliser que ce que l’on avait dit des femmes de ménage qui vont toujours par deux dans les chambres — ce qui étonnamment n’a jamais été vérifié par un journaliste — est faux. J’ai vu de mes yeux qu’elles entrent seules dans les chambres. Donc Diallo n’était pas en faute. Ensuite, on a dit qu’elle avait fait ça pour se faire un peu d’argent en plus. Or elle gagnait 3000 dollars par mois : pourquoi aurait-elle accepté un pourboire de 50 ou 100 dollars pour une fellation ? On a dit ça parce qu’elle est noire, africaine, on n’aurait jamais dit ça d’une Blanche. Toute la réception de cette affaire a relevé d’un racisme inouï. Quant à la thèse du désir : 1) DSK n’est pas un Adonis. 2) Diallo est excisée, elle ne peut plus ressentir de plaisir ”. Ah, on voit plus les choses de la même façon, hein ?

“ En peul, le mot “ viol ” n’existe pas ”

“ Faire le voyage en Afrique, poursuit Jauffret, m’a permis de voir que (l’innocence totale, comme on parle de l’innocence d’une andouille), ça existe encore aujourd’hui : les femmes n’y ont aucun statut. Si elles se font violer, c’est de leur faute, et on les rejette parce qu’elles portent le déshonneur. Voilà d’où vient Diallo. Elle est peule, et en peul, le mot “ viol ” n’existe même pas. Quand un mot n’existe pas, ça veut dire que pour un peuple, l’acte en tant que tel est nié. Les filles travaillent dès l’enfance, elles sont maintenues dans un état d’analphabétisme, parce que c’est plus pratique. Diallo est analphabète ”.

“ C’est une histoire colonialiste ”

“ Qu’est-ce qui vous indigne le plus (dans cette histoire) ? ”, demandent “ Les Inrocks ” à l’écrivain. “ —Je suis épouvanté par cette façon raciste avec laquelle on a considéré toute cette histoire, répond-il. En plus, comme par hasard, Diallo vient de Guinée, une ancienne colonie française. Elle vient d’un pays où, pour une histoire comme ça, elle se serait pris une balle dans la tête par les gens de son pays. C’est une histoire colonialiste. Si on n’a pas, alors, examiné les détails dont je parle, c’est parce que nous venons du colonialisme, qu’il est encore en nous. Les éléments étaient là, mais on les a mal interprétés à cause de notre vision colonialiste ”. Etrange comme la question raciste, qui enflamme si fort aujourd’hui les esprits — et les unes des hebdos —, fait retour, via DSK… avec un différé de trois ans, notez.

L’affaire DSK ou la mort du mariage

—“ Qu’est-ce que cette histoire reflète de notre époque ? ” l’interrogent “ Les Inrocks ” en conclusion. —“ On dit que les hommes ne veulent pas se marier, mais ils ont tort, répond Jauffret : visiblement, le mariage n’engage en rien. A notre époque, les serments d’amour ne valent rien et le mariage n’empêche pas de tromper sa femme ou son mari publiquement ”. Ah, il y en avait des angles, des ressorts et des leçons inexplorés, dans cette affaire-là… On peut en penser ce que l’on veut, être ou ne pas être d’accord avec l’analyse de Jauffret — qui, faut-il le rappeler ?, reste un écrivain, et le revendique ! —, il n’en demeure pas moins regrettable que ces pistes de recherche et de réflexion n’aient pas été exploitées plus tôt. En même temps — soyons positifs ! —, il est assez revigorant de constater qu’il est des écrivains qui savent scruter, explorer et éclairer l’actualité… Allez, sur ce, bonne semaine, les biquets !

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Jean-Luc Mélenchon, Antisémitisme, DSK, Jean-François Copé, UMP, François Fillon, Nicolas Sarkozy, Racisme, Marine Le Pen, Eglise, FN, pauvreté, Editions Fayard, Marseille, antiracisme, mariage, droite, gauche, Front de gauche, Manuel Valls, inégalités, riches, Mrap, CRAN, Christiane Taubira, Albin Michel, Nafissatou Diallo, Dieudonné, Besançon, Alain Soral, colonialisme, David Revault d'Allonnes, morale, Patrick Cohen, CRIF, roms, Angers, IFOP, Jerôme Fourquet, Auschwitz, Robert Laffont, Belleville, racisme anti-blanc, Le Mans, plume, quenelle, Léonarda, Noémie Montagne, lisa angell, Licra, Sébastien Gros, Isabelle Monnin, Frédéric Haziza, cité des Créneaux, arbre de la Laïcité, Doan Bui, Brigitte Bertin, xénophobe, E-Quenelle, Pourquoi les riches ont gagné, JJSS, Eric Fassin, Frantz Fanon, Régis Jauffret, Laurent Borredon, Jean-Louis Servan-Schreiber, Albert Memmi, Vol au-dessus d'un nid de fachos, LCP, Frédéric Béatse, CCIF, Villeneuve d'Ascq

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