Boston : cette peur panique de l'amalgame sur les musulmans qui empêche de voir la réalité de la haine islamiste envers l'Occident judéo-chrétien<!-- --> | Atlantico.fr
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Un Américain de 19 ans d'origine tchétchène est soupçonné d'être l'auteur avec son frère aîné des deux attentats à la bombe.
Un Américain de 19 ans d'origine tchétchène est soupçonné d'être l'auteur avec son frère aîné des deux attentats à la bombe.
©Reuters

La semaine Goldnadel

Cette semaine, Gilles-William Goldnadel s’étonne que les mêmes personnalités promptes à s’indigner des amalgames faits entre islamistes et musulmans suite aux attentats de Boston ne relèvent pas ceux faits entre homophobes et militants anti-mariage gay.

Gilles-William Goldnadel

Gilles-William Goldnadel

Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Il a notamment écrit en 2024 "Journal de guerre : C'est l'Occident qu'on assassine" (éditions Fayard) et en 2021 "Manuel de résistance au fascisme d'extrême-gauche" (Les Nouvelles éditions de Passy). 

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"Putain, je suis dégoûté !". On se souvient peut-être que tel fut le cri du cœur, twitté par un folliculaire du Nouvel Observateur en apprenant l'identité musulmane du tueur de Toulouse qu'il aurait tellement préféré conforme à sa détestation anti-occidentale. Pour un peu, on aurait davantage compati à sa douleur qu'à celle des victimes de Mohamed Merah.

Nul doute, que le même journaliste au dégoût si facile aura à nouveau, quoique sans doute plus discrètement, beaucoup souffert en apprenant l'identité des auteurs de l'attentat de Boston. Il faut dire que pour apaiser sa douleur, la presse dans son ensemble n'aura pas insisté lourdement sur l'islamisme des deux tchétchènes exaltés. Pas plus que sur celui des preneurs d'otages de la famille française libérée au Cameroun.

Une innovation, sans doute de nature prophylactique, aura été cependant constatée : l'avertissement, par avance, de ne pas commettre d'amalgames fautifs. Dès le 17 septembre, autrement dit deux jours avant la découverte de l'identité des terroristes, Mme Hélène Sallon, du journal Le Monde, attirait l'attention de ses lecteurs sur le risque de rapprochements abusifs entre musulmans et islamistes.

Dans le même temps pourtant, une partie des commentateurs, faisant manifestement fi de la cruauté statistique, privilégiaient, une nouvelle fois, la piste de l'extrême droite intérieure, dans ce qui semblait tenir davantage du vœu que de la prévision, en mettant en avant qui l'endroit, qui le moment de l'attentat. Cette peur panique de l'amalgame, que l'on constate à chaque tuerie, et qui peut se comprendre, l'emporte sur tout le reste : qu'il s'agisse de la description de la réalité du danger islamiste comme de l’attention première due aux victimes.

Pour expliquer le soubassement inconsciemment très xénophile de ce comportement paradoxal, j'ai souvent eu l'occasion d'expliquer que l'identité ethnico-religieuse du bourreau l'emportait sur celle de sa victime. Quoi qu'il en soit, il se vérifie une nouvelle fois que l'explication causale du terrorisme par la pauvreté est battue en brèche. Il existe aujourd'hui une haine islamiste pour l'Occident judéo-chrétien que la raison est impuissante à décrire. Je recommande à ce sujet la lecture de "l'islam devant la démocratie" de Philippe d’Iribarne. (Gallimard).

J'ai longtemps été rétif à admettre cette différence de nature qui existe entre judaïsme et christianisme d'une part et l'islam d'autre part. Mais l'auteur montre bien un islam assoiffé de certitudes et tenant le débat comme une abomination criminelle. Le croyant est sommé de se soumettre et l'incroyant de mourir. Longtemps cette différence fondamentale ne faisait pas le jeu des fondamentalistes. Mais, dans la dernière décennie, l'unification de la Oumma, fulminée par les oulémas arabes, a détruit les syncrétismes africains ou asiatiques qui avaient produit un islam tolérant, donc possible.

Contrairement à ce qu'on pouvait espérer, l'acquisition technologique occidentale n'a en rien freiné l'arriération de la pensée de ceux qui la maîtrisent désormais parfaitement. Voilà pourquoi, au Caire comme à Gaza, à Islamabad comme à Tombouctou, à Paris comme à Boston, des salafistes informatisés sont sans état d'âme pour estropier les infidèles. Pour éviter de voir amalgamer à jamais islamistes et musulmans, et dans l'attente d'un improbable aggiornamento religieux, seul un nouveau kémalisme qui permettrait à ces derniers de célébrer paisiblement leur culte sans interférence avec l'État est à souhaiter dans l'urgence dans tous les pays de tradition islamique. La dérive à laquelle on assiste actuellement en Turquie où l'on emprisonne à tour de bras les journalistes, et où l'on punit les artistes iconoclastes (comme le pianiste Fazil Say), dans l'indifférence des jobards occidentaux montre que c'est bien l'idéologie des frères musulmans qui fait le lit de l'amalgame. Serait-ce Le Monde de Mme Sallon qui prévoyait il n'y a pas six mois que "l'islamisme allait se dissoudre dans la démocratie"?

En revanche, s'agissant de la France et des Français, la gauche a moins la crainte des amalgames. Ceux qui manifestent contre le mariage unisexe seraient des homophobes dangereux, en lien avec l'extrême droite violente et factieuse. En réalité la gauche n'arrive pas à se faire à l'idée, il est vrai assez désagréable pour elle, que la droite puisse désormais s'accorder cette liberté extravagante d'imiter ses extravagances. Qu'ainsi, elle puisse organiser des manifestations de rue pour impressionner le pouvoir en place, parfois pas forcément en galante compagnie, en prenant le risque d'être quelquefois débordée par des provocateurs violents. Je le dis franchement, l'idée de voir la représentation nationale, quelle qu'elle soit, empêchée d'exercer le pouvoir qu'elle tient des urnes ne correspond pas à l'idée que je me fais de la démocratie et du pouvoir d'État. Mais il y a trop longtemps que je préconise ici et ailleurs le combat culturel en imitant le succès de l'idéologie gauchisante pour que je fasse la fine bouche en rêvant d’une démocratie idéale que cette idéologie a enterrée depuis un certain mois de mai, à coups, précisément, de manifestations de rue. Car l'une des nouveautés lumineuses de la situation, c'est qu'une grande partie des Français ne sont plus ni impressionnés ni terrorisés par les vieilles recettes d'amalgames de la gauche dé-moralisée. Le chantage à l'homophobie, instrumentalisé par deux affaires mal éclaircies est sans effet. Il est retourné à son envoyeur, responsable d'avoir proposé un débat délibérément fait pour cliver, tout en chantant les louanges d'une société apaisée. La grosse ficelle de la mauvaise compagnie de l'extrême droite, encore utilisée par M. Assouline ce dimanche, est usée jusqu'au bout. Elle ligotera désormais les socialistes, empêtrés dans des liens autrement plus charnels avec les robespierristes de M. Mélenchon et les post-staliniens du PCF.

Surtout, ces français qui défilent savent bien qu'ils n’arriveront jamais aux extravagances que la gauche s'est octroyée impunément. Cette gauche qui en appelle religieusement au vote de la représentation nationale a-t-elle oublié que c'est elle qui aura obligé Chirac, en faisant descendre les très jeunes dans la rue, à reculer -suprême indignité- sur le CPE, la loi pourtant votée ? Cette gauche socialiste qui somme impérieusement l'opposition démocratique de condamner les violences-limitées-constatées jusqu'alors, a-t-elle condamné les nervis de la CGT, lorsque, comme à Amiens le mois dernier, 19 CRS sont restés sur le carreau ? Cette gauche socialiste a-t-elle sommé son allié Vert de condamner les violences, autrement plus graves, commises par les écolos et les fascistes rouges des Black Blocs à Notre-Dame-des-Landes ? Le 1er mai prochain, les socialistes descendront-ils dans la rue en compagnie des partis trotskistes qui considèrent toujours que l'élection est un piège à cons et que le pouvoir est à prendre par la rue et les conflits ?

Ce dimanche sur BFM TV, 17h. La Bastille. Manif des partisans du mariage pour tous. Bertrand Delanoë, très digne, dénonce les "violences verbales et les intolérances" des opposants à la loi unisexe. Quelques secondes et quelques mètres plus loin, gros plan sur une pancarte : "Frigide Barjo : ton cul est jaloux de la merde qui sort de ta bouche"… On le voit, la manif pour tous, qui a prévu d'exclure les trublions ou de les dénoncer aux forces de l'ordre est encore très loin des extravagances de cette gauche de l'amalgame.

Certes, celle-ci peut encore compter, mais pour combien de temps, sur l'assistance de ses relais médiatiques dociles. C'est ainsi, par exemple, que le syndicat des journalistes SNJ a publié un communiqué intitulé "stop à la chasse aux journalistes !" dont j'ai plaisir à citer quelques extraits mettant en cause les opposants au mariage pour tous et la droite politique, à propos des harcèlements que des extrémistes ont organisés contre Caroline Fourest le 13 avril. : "Cette nouvelle forme d'atteinte grave à la liberté d'information n'a pas été condamnée par les organisateurs des manifestations -à peine "désapprouvée"- ni par les politiques qui les soutiennent. (…) Il adresse aux opposants à la loi, en débat au Parlement, et aux politiques qui les encouragent une mise en garde solennelle."

Le 17 avril, un journaliste de BFM TV était agressé alors qu'il réalisait un reportage près d'une école primaire à Sevran où des enfants s'étaient piqués en jouant avec une seringue la veille. Trois individus l’ont roué de coups, volé sa caméra et celui-ci a dû être hospitalisé, contrairement et c'est heureux, à la talentueuse Caroline Fourest. J'attends toujours un communiqué du SNJ. Il est vrai qu'il est possible que les agresseurs de leur confrère ne soient pas des opposants au mariage pour tous. Dans ce cadre, on le voit, impartial et bienveillant, je finirai avec l'extrait de cet article du Monde, également du 13 avril, signé par Mme Florence Dupont, professeur de latin à Paris Diderot et intitulé "papa bleu, maman rose".

Je suis reconnaissant à Mme Dupont, qui a voulu décrypté par son logo le fond réactionnaire de la manif pour tous, car son propre décryptage est l'illustration caricaturale du caractère anti hétéro et anti blanc d'une partie extrême de la gauche intellectuelle française, et que j'ai décrit dans ma "Question Blanche" : "le drapeau français brandi dans la manif n'est plus bleu, blanc, rouge mais bleu ciel, blanc et rose " (…) Bleu, blanc, rose, le drapeau national infantilisé est (ndlr au contraire des Blacks Blancs Beurs qui reconnaissent le drapeau tricolore) l'emblème d'un peuple de "Blancs" que ne distingue entre eux que le genre attribué à la naissance. (…) Homme, femme : le principe d'identification du genre est emprunté aux pictogrammes des toilettes publiques. Chacun sa façon de faire pipi, debout ou assis. La famille nucléaire dessinée sur le logo et présentée comme naturelle n'est que le mariage catholique bourgeois du XIXe siècle, adopté au XXe siècle par les classes moyennes et désormais obsolète. C'est une famille étouffante et répressive, la famille haïssable de Gide, de Brasse Bouillon et de Poil de Carotte, nœud de vipères de Mauriac. (…) Papa bleu et maman rose ne sont pas un couple hétérosexuel, mais une paire de reproducteurs blancs."

Une paire de reproducteurs blancs… Il ne s'est pas trouvé un seul intellectuel de gauche pour dire un seul mot sur cette animalisation qui, si elle avait été coloriée en noir ou brun aurait inspiré une pétition indignée ou le procès d'une association "antiraciste". Quand je vous dis que les Dupont - la- joie ont changé de crèmerie.

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