Pas trop malhonnêtes, pauvres et peureux, nos élus sont comme nous<!-- --> | Atlantico.fr
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La révélation du patrimoine des hommes politiques montre que les élus sont comme tout le monde.
La révélation du patrimoine des hommes politiques montre que les élus sont comme tout le monde.
©Reuters

Le Nettoyeur

La révélation du patrimoine de nombreux hommes politiques après l'Affaire Cahuzac montre que nos hommes politiques ne font pas ça pour l'argent et qu'on peut en finir avec le "tous pourris".

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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La révélation du patrimoine de nombreux hommes politiques après l'Affaire Cahuzac peut nous rassurer sur un point : nos hommes politiques ne font pas ça pour l'argent. Laurent Wauquiez, normalien et major de l'ENA, aurait pu très facilement pantoufler dans une banque d'affaires qui l'aurait très grassement payé pour activer son réseau, ou une grande entreprise (semi-)publique. Au lieu de ça, le voilà avec 2500 euros sur son compte courant et de gros emprunts à rembourser sur ses petits logements. Parce qu'il aime la chose publique.

Ca étonne, de découvrir que nos élus ne sont pas des milliardaires. Pour un Cahuzac, il y a des dizaines voire des centaines de routards de la politique qui certes ont un meilleur niveau de vie que la plupart des français, mais ne croulent certainement pas sous l'or. J'ai déjà écrit qu'il faudrait augmenter beaucoup la rémunération des politiques. Les Français ne se rendent pas compte à quel point être élu est un métier ingrat. Être député, c'est ne presque jamais avoir une soirée ou un week-end pour soi : il faut soit les passer dans des événements dans sa circonscription (ou être battu), soit en séances à l'Assemblée, à occuper un siège et lever le bras au bon moment. C'est être une assistante sociale pour tous les pauvres hères de sa circonscription (admirable, mais pas la jet set). C'est devoir flatter tous ceux qu'on rencontre pour, au final, pas tant de pouvoir ni de prestige. Les 7 100 euros bruts mensuels de traitement d'un député, à raison de 70 heures de travail par semaine, reviennent à 25 € bruts de l'heure… Pour gagner de l'argent, il vaut mieux être plombier.

Nos élus ne sont pas pourris, ou en tous les cas pas beaucoup plus que nous. On pense à la phrase si révélatrice de Dany Cohn-Bendit sur la vie privée de François Hollande: “Il est divorcé, comme tout le monde.”

Mais leur patrimoine nous révèle bien d'autres choses qui montrent à quel point nos élus sont comme nous.

D'abord, nos élus sont dans ce qu'on pourrait appeler une pauvreté confortable. Ils ne sont pas dans la vraie pauvreté, bien sûr. Mais leurs dépenses font que, financièrement, ils sont contraints. Rembourser des emprunts immobiliers, avoir des frais, une voiture, des enfants, les impôts surtout, tout ça engage des dépenses nécessaires qui font que, même si on vit bien, les fins de mois sont tendues, on n'arrive pas à épargner assez, on sent une vague insécurité économique. C'est le cas de beaucoup de français, qu'ils soient employés, entrepreneurs ou cadres supérieurs. On n'est pas pauvres-pauvres, au contraire, mais il y a quand même un malaise. Ce malaise peut prêter à rire comparé à la vraie précarité qui existe certainement en France, mais il crée un cercle vicieux au niveau macroéconomique : puisque personne n'a assez d'argent ou se sent sûr économiquement, nous consommons et investissons moins, ce qui fait qu'il n'y a pas assez d'activité économique, ce qui fait qu'on a ce malaise... On se retrouve bloqué en 3ème vitesse. Oui, la France n'est pas la Grèce, mais il y a ce malaise, cette vague sensation d'une main sur la gorge, d'un ciel bas et lourd qui pèse comme un couvercle. Nos élus sont comme nous.

Ils sont comme nous d'un autre point de vue : leur aversion au risque. L'élu lambda, comme le Français lambda, épargne comme un personnage de Balzac, dans la pierre. On achète son appartement ou sa maison à crédit. Peut-être un livret, une assurance-vie. On n'achète pas d'actions, ou très peu, c'est risqué les actions. On ne crée certainement pas d'entreprise. Notre fiscalité l'encourage, mais ça ne serait pas le cas si notre culture n'était pas maladivement averse au risque et à la nouveauté, et les députés ont la cohérence de faire dans le privé comme dans les lois qu'ils votent.

Très révélateurs, ces patrimoines. Nos élus, en somme, sont à peu près honnêtes, n'ont pas assez d'argent, et ont peur. Comme nous.

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