PDG de Titan, Berlusconi, Grillo : et si ces incontestables "affreux" n'étaient pas ceux qui bafouent le plus la démocratie ?<!-- --> | Atlantico.fr
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On ne peut bafouer la démocratie puis se plaindre que les électeurs ne la prennent plus au sérieux.
On ne peut bafouer la démocratie puis se plaindre que les électeurs ne la prennent plus au sérieux.
©Reuters

Chroniques du pot aux roses

Cette semaine, Serge Federbusch revient sur la surprise électorale italienne et l'échange musclé entre le ministre français et l'homme d'affaires américain.

Serge  Federbusch

Serge Federbusch

Serge Federbusch est président du Parti des Libertés, élu conseiller du 10 ème arrondissement de Paris en 2008 et fondateur de Delanopolis, premier site indépendant d'informations en ligne sur l'actualité politique parisienne.

Il est l'auteur du livre L'Enfumeur, (Ixelles Editions, 2013) et de Français, prêts pour votre prochaine révolution ?, (Ixelles Editions, 2014).

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1- PDG de Titan, Berlusconi, Grillo : vive les affreux

Arnaud Montebourg aurait dû remercier Taylor, le patron de Titan, pour le soutien qu'il a apporté à ses théories semi-protectionnistes, plutôt que le conspuer. Car, au fond, qu'a dit cet américain brut de décoffrage ? Qu'il ne sert à rien pour les politiciens français de pleurer sans réagir face à la destruction de nos emplois du fait de la concurrence déloyale des industriels et du gouvernement chinois. Si, en plus, les salariés français sont peu productifs, comme c'est le cas chez Goodyear à Amiens, le problème de notre compétitivité est sans solution. Taylor et Montebourg : ces deux là se détestent d'autant plus qu'ils se ressemblent.

Prendre dans ces colonnes la défense de Taylor est délicat, mais ce n'est rien à côté de vanter les qualités de Berlusconi ou Beppe Grillo ! Ne reculant devant aucun péril, nous le ferons sans pour autant oublier les pitreries innombrables du « Cavaliere des jupettes ». C'est vrai qu'il est grossier, qu'il a trusté les médias audiovisuels, eu la main baladeuse, fricoté avec des organisations douteuses et souvent atteint des sommets de démagogie. Pourtant, les bien-pensants français qui s'apprêtaient à envoyer DSK à l'Elysée n'ont pas beaucoup de leçons à donner à ce drille transalpin qui a eu au moins le mérite de gagner de l'argent hors de la politique stricto sensu.

Alors qu'il tentait un énième come-back, sans doute pour y chercher un asile judiciaire, Berlusconi a abandonné toute inhibition européiste, est allé droit au but et a dit tout haut ce que beaucoup d'Italiens et de plus en plus de Français ressentent confusément : le régime de change et les principes politiques et économiques arrêtés en 2002, au moment de l'entrée dans l'euro, jouent au bénéfice quasi-exclusif de l'Allemagne. Ils ne permettent à l'Europe du Sud de garder la tête hors de l'eau qu'en s'endettant de plus en plus. C'est la route de la servitude, comme le disait Hayek, mais sur fond d'euro surévalué. Et les arguments de ceux qui nient les effets dévastateurs de cette situation au prétexte que, justement, l'Allemagne s'en tire mieux, ignorent qu'elle le fait en cannibalisant ce qui reste de croissance en Europe.

La France, comme toute l'Europe du Sud, a certes besoin de réformes drastiques pour libérer son économie de multiples pesanteurs bureaucratiques et de l'hypertrophie du secteur public, mais il est impossible d'entreprendre cet ajustement structurel dans un contexte de récession aggravé par la politique de change. En soulignant cette incohérence, le trublion Berlusconi a accompli une œuvre utile. Le fait qu'il ait limité la casse électorale grâce à ces prises de position témoigne davantage du bon sens populaire que d'un accès de populisme.

Comme le disait naguère malicieusement Jean Yanne : "Il est plus facile de manipuler les élites que le peuple", si tant est que la notion d'élite ait un sens. Le peuple souffre très directement de la dureté des temps et cela le rend plus sensible et sensé que les salonnards thinktankés qui prétendent réfléchir à sa place.

Quant à Beppe Grillo, il est vrai qu'il raconte n'importe quoi, en particulier dès qu'il parle de politique économique. Mais ses provocations virales, outre qu'elles inaugurent une nouvelle manière de faire de la politique grâce à Internet, ont le mérite de souligner le ridicule qui touche les technocrates qui, autour de Monti, espéraient corriger les "affreux, sales et méchants" formant à leurs yeux le peuple italien. Les 25 % de Grillo sont la monnaie de la pièce qui fut payée lorsque la technostructure européenne déposa de facto le gouvernement précédent pour imposer Monti. On ne peut bafouer la démocratie puis se plaindre que les électeurs ne la prennent plus au sérieux.

Et la France dans tout ça ? Ses institutions sont malades et l'alternance des partis de gouvernement ne les fait plus bouger d'un iota. Peut-être, comme en Italie, seront elles bousculées un jour par un clown qui saura tirer parti de l’écœurement généralisé contre les hommes de pouvoir ? La figure de Coluche symbolisera-t-elle l'avenir de l'homme politique français ? Cela replace en tout cas certaines petites blagues élyséennes dans leur contexte. En s'appliquant, Hollande pourrait devenir le Beppe Grillo français.

2 – Les conseilleurs sont les payés

Au pouvoir depuis dix mois, Mou-Président a déjà un an de retard sur ses objectifs ! C'est donc désormais pour 2014 que sa boule de cristal lui indique la "reprise" et le redressement budgétaire. Evidemment, il n'y croit plus lui-même. Où trouverait-il les 70 milliards d'euros d'économies dont il a désormais besoin d'ici 2017 pour respecter ses promesses ? Tout au plus peut-il se réjouir d'avoir obtenu un bref sursis avant que, sur le fondement des traités qu'il a approuvés, on ne lui tire l'oreille à Francfort et que les bureaucrates bruxellois ne tentent d'infliger à la France des amendes d'autant plus absurdes que nous n'aurons pas un euro vaillant pour les payer. De toute façon, nul ne respectera jamais ces engagements incohérents. La seule question qui compte désormais est la suivante : qui prendra la responsabilité de faire chavirer le bateau de l'Union ?

Dans cette fuite en avant, Super-Normal a trouvé des alliés inattendus : les agences de notation et certains analystes de marchés qui l'encouragent à persévérer dans sa politique de rigueur postiche. Serait-ce parce qu'ils ont intérêt à ce que la machine folle continue de tourner et génère les juteuses commissions et contrats qui les font vivre ? Dansons sur le volcan .

3 – L'homme qui décide de votre temps libre

Après avoir réduit la semaine de travail à 35 heures en 1998, les socialistes ont entrepris d'allonger celle de présence des enfants à l'école et annoncent désormais un raccourcissement des vacances d'été. Pour eux, le temps, comme les promesses électorales, est relatif et sujet aux coups d'accordéon. A la manœuvre, Peillon, qui s'improvise maître des horloges et des instituteurs tout à la fois. Qu'un système politique puisse produire un ministre en roue libre, multipliant inconsidérément les annonces et plongeant des millions de familles dans la perplexité, en dit long sur l'égarement des bureaucrates qui tentent de nous gouverner. N'ayant plus d'argent à distribuer, les socialistes avaient perdu leur raison d'être et y avaient substitué du temps libre. Mais aujourd'hui, même le temps leur manque.

4 – Pourquoi tant de Ségolène ?

La vice-présidence de la Banque publique d'investissement, fer de lance supposé du redressement des PME françaises, échoit donc à Ségolène. Le risque de clientélisme dans l'attribution des financements sera-il endigué par un Jouyet jouant les garde-chiourmes ? Il aura fort à faire. Objectif de "mise en œuvre de la transition écologique", instances paritaires à tous les niveaux, poids renforcé des régions dans la gouvernance de l'établissement, etc : la fée Clochette de la gauche française va se pencher avec plusieurs baguettes magiques sur ce berceau offert en lot de consolation après que tant d'autres présidences lui aient échappé. Trente milliards d'euros sont en péril.

 5 – Carence

Les fonctionnaires feraient bien de se méfier de la suppression du jour de carence en cas de maladie. Dans le bonneteau "hollandais", ce genre de satisfactions symboliques s'accompagne toujours de restrictions plus importantes par la suite. Il suffit de se souvenir du prétendu rétablissement de la retraite à 60 ans pour les carrières longues, qui a surtout bénéficié aux enseignants ayant fréquenté les instituts de formation avant de prendre leurs fonctions. Huit mois plus tard, tous les autres salariés, au prétexte de l'ouverture d'une grande concertation, peuvent s'attendre à travailler plus longtemps.

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