Discours sur l'état de l'Union : l'Amérique d'Obama va-t-elle vraiment mieux ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Dans son traditionnel discours sur l'état de l'Union, Barack Obama a affirmé que l'Amérique "va mieux" et se "renforce".
Dans son traditionnel discours sur l'état de l'Union, Barack Obama a affirmé que l'Amérique "va mieux" et se "renforce".
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Trans-Amérique Express

Dans son traditionnel discours sur l'état de l'Union, Barack Obama a affirmé que l'Amérique "va mieux" et se "renforce". Pourtant les Américains ne voient toujours pas la fin de la crise.

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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Pour la cinquième fois, le président Obama, a rendu compte devant le Congrès et la nation américaine de "l’état de l’Union". Pour la cinquième fois son discours a été dominé par trois questions : l’économie,  l’emploi et le déficit. Parce que l’Amérique n’arrive toujours pas à émerger de sa "grande récession".

C’est une obligation et une tradition. Chaque année le président américain se doit de présenter au Congrès "l’état de l’Union". De dresser le bilan de santé du pays, accompagné si possible, d’une ordonnance de soins pour qu’il aille encore mieux…

En vérité, la Constitution n’impose au président de ne faire ce rapport que "de temps en temps". Mais depuis le premier discours de George Washington en 1790, ce rendez-vous a toujours été annuel. Thomas Jefferson (président de 1800 à 1808) trouvait la démarche trop "monarchique" et se contenta d’envoyer un courrier. Depuis 1913 et Woodrow Wilson, le président se déplace à nouveau au Capitol pour y délivrer son discours en personne. Washington avait fait court, avec 1 000 mots. Jimmy Carter fit très long en 1980, avec 30 000 mots (est-ce pour cette raison qu’il fut battu pour sa réélection huit mois plus tard ?).

Il est de tradition que le président glisse dans son discours la phrase symbolique "l’état de notre Union est fort". Gérald Ford avait fait exception en 1975 en disant d’emblée "l’état de notre Union n’est pas bon", avant d’énumérer les difficultés d’alors, inflation, chômage, criminalité, corruption, déficit…. En 2002 George W. Bush avait marqué les esprits. C’était quelques mois après le 11 septembre. "Ce soir, notre pays est en guerre, notre économie est en récession, le monde civilisé affronte une menace sans précédent, mais l’état de notre Union n’a jamais été aussi fort !" Allusion à l’unité spirituelle du pays soudée par la tragédie et la guerre.

Depuis son élection en 2008 Barack Obama a eu bien du mal à justifier une telle phrase. Car le pays reste sous le coup d’une "grande récession" qui n’en finit pas de ne pas finir. Cette fois il a donc trouvé une parade. Plutôt que de dire que l’état de l’Union est "fort" ("strong" en anglais), le président a dit qu’il "se renforce" ("stronger" en anglais). Certes face à la perspective de faillites bancaires et à l’effondrement des marchés automobile et immobilier, qui était le lot de 2009, l’Amérique va mieux. Un peu comme un patient dont l’état s’est amélioré en passant de "désespéré" à "grave"…

Selon un sondage du Wall Street Journal et de la chaine NBC le souci numéro un des Américains reste "l’emploi". Ils souhaitent  que leur président "répare l’économie". Mais s’attendent-ils à ce que 2013 soit l’année du redémarrage ? 60% répondent "non". C’est ce dépit, cette résignation presque,  qui inquiète les observateurs.

Car comme le gouvernement les ménages américains sont endettés. Une dette accumulée depuis des décennies à laquelle il ne prêtait guère attention jusqu’à récemment, car elle était toujours couverte par de nouveaux revenus. Depuis quatre ans les mauvaises perspectives économiques font que les Américains ont cessé de dépenser et au contraire réduisent leur dette. Un comportement qui freine la reprise car la consommation était le moteur de la croissance.

Résultat l’économie américaine fait du sur place, malgré quelques signes encourageants à long terme.

Le taux de croissance en 2012 s’est finalement établi à 1,5%. Au lieu de 2,7 envisagé en début d’année. Le net ralentissement observé au dernier trimestre 2012 a refroidi l’enthousiasme. Pour 2013 le CBO (Congressional Budget Office, équivalent de notre Bercy) prévoit une croissance de 1,4%. C’est-à-dire presque rien. Le chômage se rapproche à nouveau de la barre des 8% (7,9% en janvier). C’est exactement son niveau de janvier 2009. Et au rythme de croissance actuel il ne baissera pas, ou très peu.

L’économie américaine génère entre 150 000 et 200 000 emplois par mois. A ce rythme le chômage retombera sous la barre des 7% en… 2015. Dans 24 mois.  

Le marché immobilier s’est stabilisé après un recul de 30% (une moyenne nationale qui masque des écarts plus importants encore dans certaines régions), entre 2007 et 2011. Mais il n’est pas encore reparti à la hausse. La nette progression du nombre des constructions de maison individuelles observée à l’automne, s’est interrompue avec l’hiver.  

Les ventes de voitures sont le seul vrai point positif du moment. Elles ont fait un bond de 15% entre janvier 2012 et janvier 2013. Et les trois grands de Detroit (GM, Ford et Chrysler) en ont été les principaux bénéficiaires. Mais le marché avait considérablement reculé. Ainsi en 2012 il s’est vendu quinze millions de véhicules aux Etats-Unis, moins qu’en 2008.

"Il est de notre devoir de faire redémarrer  le moteur de la croissance économique américaine", a répété le président Obama dans son discours. Plus facile à dire qu’à faire. Et force est de constater que pour le moment son administration n’y pas parvenu.

Le renouveau pourrait venir des aléas de la mondialisation. Après avoir délocalisé massivement dans les années 1990-2000, les industriels américains commencent à revenir au bercail. Parce que l’écart des salaires s’est réduit, parce que la réévaluation progressive du yuan chinois réduit l’écart des monnaies, parce que le coût des transports a augmenté, parce que les industriels souhaitent rapprocher les activités de R&D (Recherche et Développement) de celles de production… Mais surtout parce que les consommateurs commencent à faire preuve sinon de patriotisme économique, du moins d’un désir de proximité. Très critiqué pour avoir délocalisé ses opérations en Chine, notamment pour son iPhone,  Apple vient d’ajouter sur ses emballages le label "assemblé aux U.S.A". La marque à la pomme projette d’ouvrir une nouvelle usine d’assemblage aux Etats-Unis.

D’autres grandes marques ont fait de même. Obama a cité Carterpillar, Ford et Intel. La nouveauté est que pendant une décennie les économistes et industriels avaient avancé l’idée que les "emplois partis à l’étranger ne reviendraient pas".

Or certains sont bien en train de revenir. Le produire local l’emporte pour l’énergie, avec le boom du gaz de schiste, comme que pour l’agriculture, avec le boom du bio. Le meilleur atout  économique des Etats-Unis, reste le peuple américain.

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