Quand le bleu s’enfume et quand le rouge se patine : c’est l’actualité des montres en pleine coronapocalypse

MB&F : Une colonne mécanique couronnée d’un diamant…

Si la Legacy Machine FlyingT imaginée par l’équipe de Maximilian Büsser était, de l’avis unanime, la montre féminine la plus novatrice de 2019, elle n’entend pas se laisser détrôner en 2020. Ce remuant « laboratoire créatif » de l’horlogerie suisse nous propose rien de moins qu’une montre de femme qui ne ressemble pas à une classique montre de femme, ni surtout à une montre d’homme : c’est une « machine » horlogère qui érige, sous globe, un mouvement mécanique construit en colonne. L’effet tridimensionnel est d’autant plus spectaculaire que les heures se lisent sur un petit cadran déporté à sept heures. La colonne est couronnée d’un petit diamant qui est le soleil de cette montre, dont le « cadran » bleu – appelons-le ainsi – est magnifiquement guilloché à l’ancienne. Dans cette montre, le mariage de la tradition et de l’avant-garde est aussi évident que spectaculaire. On préfère ne pas vous dire le prix, mais il va chercher dans les six chiffres : c’est la rançon de l’exclusivité, de l’originalité et de la créativité (il n’y en aura que 18 pour toutes les princesses de cette planète)…

DODANE 1857 : La montre des pompiers de l’air…

La maison familiale indépendante française Dodane 1857 (sixième génération) annonce une série limitée dédiée aux pilotes de Canadair – les avions pompiers de la Sécurité civile française. La difficulté était de concevoir une montre très résistante aux chocs, en raison de la violence de l’impact quand le Canadair fait le plein à la surface d’un plan d’eau. C’est pourquoi on a préféré une montre électronique à une montre mécanique : les fonctions numériques utiles aux pilotes sont activées par la couronne de remontage et lisibles sur des écrans LCD (chronographe au centième de seconde, alarme, compte à rebours, etc.). Le cadran reprend les trois couleurs de la section Canadair de la base de Nîmes-Garon, dans le Midi (rouge, jaune, orange, comme sur l’indicateur de vitesse du Canadair). Chaque montre Type 23 de cette série sera accompagnée d’une plaque rivetée provenant d’un Canadair et numérotée sur 35 puisqu’il n’y aura que 35 montres dans cette série limitée (environ 1 800 euros)… 

UNIMATIC x Massena Lab : Le chic d’une « collab » de choc…

Rien de plus furieusement tendance que les « collaborations » – « collab » pour les initiés – entre marques et créateurs pour imaginer de nouvelles montres. Rien de plus chic qu’un « lab » (pour laboratoire) pour signaler aux amateurs qu’on entend rester dans la légèreté expérimentale, l’exploration esthétique et la fluidité statutaire. Le nouvelle marque indépendante italienne (« Made in Italy », nous dit fièrement le cadran) a donc collaboré avec le label Massena Lab, projet théoriquement new-yorkais, mais néanmoins très français puisqu’animé par William Rohr, qui a grandi à Nice (d’où le côté « Massena » de l’opération). L’idée est de proposer aux amateurs des « montres d’amateurs », saturées de ces petits détails que les collectionneurs adorent retrouver sur leurs montres vintage préférées : notez ici le triangle rouge sur la lunette tournante de cette plongeuse, le rouge merveilleusement patiné du cadran, les index ivoirés qui semblent avoir déjà subi l’épreuve des ans, la couronne surdimensionné et jusqu’au 6 du cadran, remplacé par un très coquet index horizontal. Rien qui ne soit juste et qui ne prouve une grande culture des montres de collection. À ne pas répéter : les « artistes » qui ont créé ce cadran sont également certains de ces « sorciers » du vintage qui sont capables de recréer, pour les amateurs un peu naïfs, de fabuleuses Rolex de collection dont les cadrans « tropicalisés », tous plus rares les uns que les autres [normal, ils n’existaient pas voici quelques semaines !] suscitent des enchères vertigineuses. Avec ce Modello Uno de Unimatic x Massena Lab, on ne prend aucun risque, surtout à 850 dollars et avec une série limitée à 99 exemplaires : pas sûr qu’il en reste à l’heure où nous mettons cette chronique en ligne, mais vous pourrez toujours souscrire aux prochaines montres lancées par ce génial Massena Lab – si cette « plongeuse » s’annonce comme un Modello Uno, c’est qu’il y en aura d’autres…

H. MOSER & CIE. : Un radicalisme minimaliste…

Il faut être très sûr de sa force pour oser un cadran de montre qui ne porte aucune marque. Pas le moindre logo, ni le moindre index. Trois aiguilles, sinon rien ! C’est précisément cette pureté qui est la signature de la jeune marque suisse H. Moser & Cie., qu’on reconnaît également à ces cadrans aux couleurs « fumées » dont elle a lancé la mode il y a exactement cinq ans – un style souvent imité par les plus grandes marques, mais très rarement égalé. Avec son mouvement automatique de qualité « manufacture », cette Endeavour Centre Seconds Concept (40 mm) est magistrale en or rose, avec son cadran Funky Blue – demandez à voir le cadran Burgundy, disponible pour les femmes en 38 mm. Ces montres poussent l’art du néo-classicisme dans ses derniers retranchements, avec cette non-signature radicale qui emporte l’adhésion : abandonnons aux grippés asiatiques la fièvre du logo et retrouvons le goût des identités qui s’imposent d’elles-mêmes. On reconnaît au premier regard un tableau de Mondrian, pas besoin d’aller en vérifier la signature avec une loupe…

RALF TECH : Une « plongeuse » discrète et virile…

Le monde de l’économie étant un milieu au moins aussi hostile qu’un champ de bataille, on comprend mieux pourquoi certains jeunes gens pleins d’ambition préfèrent s’équiper d’une montre de nageur de combat pour évoluer dans les eaux troubles des zones urbaines. La jeune maison indépendante française leur propose une nouvelle WRB développée à l’origine pour les « plongeurs offensifs » de l’Armée de Terre : cette montre en acier (39 mm) est assez discrète pour passer sous la manche d’un costume, mais elle est tout de même étanche à 200 m et munie d’un mouvement automatique réputé pour sa fiabilité. Le style de cette série limitée (200 pièces) est assez vintage pour rester dans les codes de ces dernières années et le prix assez raisonnable pour ce niveau de qualité (à partir de 1 200 euros). Disponible en deux finitions, cette WRB est la « montre-outil » par excellence, virile, discrète et très efficace. Qualités qui sont celles de nos nageurs de combat…

BON À SAVOIR : En vrac, en bref et en toute liberté…

Les traditionnels salons horlogers de Genève (ex-SIHH devenu Watches & Wonders) et de Bâle (Baselworld) étaient à peine annulés pour cause de risque coronaviral, qu’un nouveau « rendez-vous de secours » était programmé à Genève, aux dates prévus pour l’ex-SIHH (fin avril), dans un format très fluide qui permettra à une cinquantaine de marques d’être présentes. Le problème reste que le concept de ces salons professionnels a terriblement vieilli. Faute d’un reformatage intégral et compte tenu de la très grave crise horlogère déclenchée par le virus chinois, il n’est pas sûr que ces salons puissent se relancer en 2021… ••• Déjà deux marques horlogères suisses au tapis depuis le début de l’année, mais le coronavirus n’y est sans doute pour rien : le joaillier horloger De Grisogono a jeté l’éponge (un centaine d’emplois sacrifiés), tandis que l’actionnaire de la manufacture horlogère RJ Watches décidait de tirer la prise et mettait l’entreprise en faillite (trente-trois personnes licenciées). Ce n’est sans doute qu’un début tellement le coronavirus a mis tout le monde à genoux… ••• L’esprit vient parfois aux horlogers suisses, qui ne manquent pas d’humour « à la gauloise » : la vidéo promotionnelle de la maison Formex (ci-dessous) va vous démontrer que, dans un sauna, mieux vaut avoir une taille respectable…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...