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Quand deux lunes orbitent et quand trois aiguilles préfèrent reculer : c’est l’actualité des montres en mode pluviôse
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Atlantic-Tac

Mais aussi, après les salons horlogers de Genève, quelques concepts qui vont vous épater, comme le bruit des codes qu’on casse, les heures qu’on écoute et l’esthétique décalée qui éclate les compteurs…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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H. MOSER & CIE. : Pour écouter le temps qui passe…

Au premier regard, avec son boîtier rectangulaire et son « écran » noir, c’est une sorte d’Apple Watch. Sauf que c’est une montre de haute horlogerie on ne peut plus mécanique, comme en témoigne le « tourbillon » en rotation dans le bas du cadran sans aiguilles, sombre et « muet » comme celui d’un Apple Watch en mode économie de batterie. L’idée d’une parodie de l’Apple Watch n’en est pas moins présente, puisque cette montre signée H. Moser & Cie. (une maison suisse dont les racines remontent au XIXe siècle) a été rebaptisée Swiss Alp Watch – « Alp-Apple » pour ceux qui n’auraient pas compris l’allusion. À quoi bon une montre mécanique sans aiguilles pour indiquer le temps ? En regardant plus attentivement, on repère une sorte de poussoir sur le flanc gauche de la montre : il permet d’activer un mécanisme de « répétition minutes » qui fait sonner les heures, les quarts d’heure et les minutes de la montre, qu’on peut mettre à l’heure exacte, à une ou deux minutes près, par sa couronne de remontage très spéciale. L’idée n’est donc plus de « lire » le temps, mais de l’« entendre » en faisant tinter les heures à la demande. Avant l’invention de l’électricité, ces heures qu’on fait sonner dans la pénombre étaient le seul moyen de connaître l’heure la nuit ou dans l’obscurité d’une diligence. Plus besoin d’aiguilles : la frappe des marteaux sur les timbres internes de la montre suffit à induire un autre rapport au temps qui passe, en l’écoutant plutôt qu’en décodant l’angle géométrique des aiguilles ou en regardant une série de chiffres. S’il y a bien une alternative originale et crédible aux montres connectées, c’est cette Swiss Alp Watch Concept Black qui l’a inventée. Épatant, non ?

HERMÈS : Deux disques à découper les lunes.

Le millésime horloger 2019 s’annonce très « cosmique », puisqu’on fêtera, entre autres, le débarquement sur la Lune de la première montre suisse (il y aura cinquante ans cet été, Neil Armstrong marchait dans la poussière lunaire avec une Omega au poignet), le bicentenaire du visionnaire Autour de la Lune de Jules Verne ou les 65 ans de l’arrivée de Tintin sur la Lune (On a marché sur la Lune). Hermès souffle toutes ces bougies avec l’esprit Hermès qui anime la maison : la montre Arceau s’est mise à « L’Heure de la Lune », avec une mécanique aussi élégante qu’imaginative. Sur le cadran en météorite, figurent deux pleines lunes : celle qu’on voit dans l’hémisphère sud à douze heures, celle de l’hémisphère nord à six heures. Tout autour du cadran, orbitent en permanence deux disques opposés : l’un pour les heures (qu’une astuce mécanique maintient toujours dans le bon sens de lecture), l’autre pour la date. Jour après jour, tout au long du mois lunaire (29,5 jours), ces disques découpent dans les pleines lunes différentes phases (quartiers croissants ou décroissants, gibbosités, etc.). Au poignet, c’est magique, c’est chic, c’est Hermès – en plus d’être mécaniquement très ingénieux. Épatant, non ?

CODE41 : Un peu d’audace mécanique pour casser les codes…

La nouvelle génération suisse a pris la relève de ses jeunes et moins jeunes anciens : en lacs et Alpes, sur le fertile terreau helvétique, semez des idées et vous récolterez des montres et des concepts de nouvelles marques horlogères. Après quelques exploits sociofinancés sur les réseaux sociaux, les jeunes indépendants lausannois de Code41 relèvent le défi d’une horlogerie mécanique originale avec leur projet X41, qui devrait être lancé dans quelques semaines, avec un mouvement « manufacture » et à un prix certes coûteux, mais raisonnable pour une proposition aussi forte (comptez dans les 3 500 euros). Code41 a fait le choix d’un remontage automatique par masse « périphérique » (le classique rotor fait le tour du mouvement mécanique au lieu de pivoter en son centre). Mécaniquement, c’est aussi audacieux que prometteur, ne serait-ce que parce que le cœur du mouvement se trouve ainsi dégagé et qu’on peut mettre en valeur son architecture ou son esthétique. Le tout est intégralement et même intégristement Swiss Made garanti pur helvète, avec une politique de transparence qui permet de comprendre que la marge de Code41 est raisonnable, ce qui oblige à se poser des questions sur la marge réelle des « grandes marques » suisses (la souscription pour cette montre sera ouverte dans quelques jours). Épatant, non ?

GREUBEL FORSEY : Une esthétique éclatée qui affole les compteurs…

Pour casser les codes (voir ci-dessus), il faut les connaître avant de les transgresser : créée voici une quinzaine d’années par le Français Robert Greubel (un Vosgien) et le Britannique Stephen Forsey, la manufacture qui porte leurs deux noms a su imposer sa vision contemporaine de la tradition horlogère. La nouvelle montre Balancier contemporain récapitule tout ou presque des apports de Greubel Forsey à cette tradition, à commencer par un soin maniaque apporté à la finition du moindre composant, vis comprises. Le boîtier a été ramené sous les 40 mm, ce qui rend la montre encore plus portable et son balancier encore plus spectaculaire. Appréciez en connaisseurs le cadran finement grainé, l’esthétique « éclatée » de l’architecture mécanique : les heures et les minutes décentrées à droite, la petite seconde déportée à gauche, la réserve de marche à onze heures et les battements élégants d’un balancier protégé par la finesse de son long pont. Le nom de la marque est presque subliminal, mais, à part Greubel Forsey, qui aurait pu proposer une telle montre avec une telle somme de détails hauts horlogers ? Le meilleur (ou le pire, c’est selon !) pour la fin : le prix relativement « accessible » de cette montre Balancier contemporain ! Tout dépend du curseur, mais l’équivalent de 190 000 euros pour cette compilation inégalée de bienfacture horlogère dans tous les compartiments du jeu, c’est un bel effort de la part de la marque ! Ceci relève de la collection et de l’investissement patrimonial, pas de la consommation mass market. Épatant, non ?

FRANCK MULLER : l’élégance formelle d’un temps qu’on inverse…

Mieux que Proust et sa Recherche du temps perdu, la maison Franck Muller nous propose un temps retrouvé, parce que… retourné ! Les aiguilles préfèrent aller en sens inverse (de gauche à droite) et tourner le dos à leur marche traditionnelle. C’est une réinvention radicale et ultra-conceptuelle de la lecture du temps qui passe : atypique dans son esprit, mais pas dans sa réalisation, cette montre automatique Remember est parfaitement digne de ses sœurs des autres collections de haute horlogerie Franck Muller. On nous explique le nom de cette Remember par le fait qu’une telle lecture du temps oblige à mémoriser les rendez-vous qu’on se donne, mais la fascination hypnotique que provoque la lecture de l’heure sur ce cadran ne relève-t-elle pas plutôt d’une victoire sur le temps, qu’on a enfin réussi à faire reculer ? Dans sa simplicité avant-gardiste, d’une grande élégance formelle, c’est tout de même une grande… complication mécanique. Épatant, non ?

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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