Quand les biomécanoïdes re-sculptent les heures et quand les morts viennent relancer les vivants : c’est l’actualité des montres avant la fête des morts…<!-- --> | Atlantico.fr
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Le bon artiste avec la bonne montre au bon prix sur le bon canal de distribution : un futur best-seller horloger ?
Le bon artiste avec la bonne montre au bon prix sur le bon canal de distribution : un futur best-seller horloger ?
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Mais aussi les grapheurs qui revisitent les cadrans horlogers, les diamants nunuches de la rétro-nostalgie, le panda qui digère ses bambous et les souvenirs de la grande crise des années 1930…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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STROM : L’art bizarre de la sculpt’heure horlogère…

« HR » Giger (1940-2014), qui détestait son prénom Hans Rüdi, est un des plus fameux artistes contemporains de la Suisse. S’il est célèbre pour avoir inventé la terrifiante créature dd la série des films Alien de Ridley Scott[ce qui lui vaudra un Oscar à Hollywood], il s’impose par une œuvre graphique dominée par d’hallucinantes créatures biomécanoïdes, hanté par les grandes légendes de l’imaginaire européen, à l’interface précise entre la chair, la mécanique et la métaphysique. Il était qu’une montre suisse rende hommage à ce maître et c’est son admirateur et ami l’horloger Daniel Strom qui s’en est chargé, avec la montre « In Memoriam HR Giger » de sa collection Agonium – des montres qu’on a déjà repérées au poignet de Johnny Hallyday. Une montre mécanique un peu bizarre, avec son boîtier en argent coulé, poli et sculpté comme un fétiche fantastique, sa couronne de remontage en tête de mort et son cadran inspiré par la couverture imaginée par Giger pour un des plus célèbres albums de la pop culture musicale (Brain Salad Surgery, d’Emerson Lake & Palmer, 1973). On retrouve sur les sculptures de la carrure les créatures biomécanoïdes chères à l’artiste, dans le respect de son esthétique teintée de style steampunk. Les bikers quiquagénaires qui enfourchent tous les week-ends leur Harley-Davidson vont adorer ce lingot d’argent massif, qui est tout de même facturé dans les 16 000 euros et dont il ne sera réalisé qu’une centaine d’exemplaires…

RJ-ROMAIN JEROME : Les diamants d’une icône rétro-nostalgique…

Un peu de tendresse dans un monde de brutes biomécanoïdes (voir ci-dessus) : alors qu’il nous avait habitué à un style plus techno-industriel, renforcé par la rouille de ses montres Titanic et soumis au sable de la poussière rapportée de la Lune, l’horloger suisse RJ-Romain Jerome s’intéresse soudain à un univers plus féminin, celui d’Hello Kitty, la petite héroïne pop culturelle, véritable icône du lifestyle contemporain, qui accompagne tant de petites filles et aujourd’hui de femmes depuis les années 1970. Cette friandise rétro-nostalgique est une vraie montre de haute horlogerie suisse, par sa mécanique comme par ses finitions : elle s’offre même un précieux « collier » de diamants puisque, comme l’indique la devise d’Hello Kitty, « on n’a jamais trop d’amis » – et chacun sait depuis Marilyn Monroe que les diamants sont « les meilleurs amis des filles ». Pas si nunuche que ça, cette chère hello Kitty ! Il n’y aura que 76 montres (Hello Kitty est née en 1976) dans cette série, dont le prix frôlera tout de même les 13 000 euros (10 000 euros sans les diamants de l’amitié intergénérationnelle)…

HUBLOT : Un apport des Mexicains à la Suisse comme à la France…

« Calavera », c’est le crâne en espagnol. C’est aussi le symbole de la fête des Morts (« El Dia de los muertos ») chère au cœur des cultures hispano-américaines, qui l’ont empruntée aux traditions aztèques, dans un joyeux melting-pot de thématiques chrétiennes et païennes. Au Mexique, qui a fait inscrire cette fête quasi-nationale au patrimoine culture de l’humanité protégé par l’UNESCO, les crânes colorés célèbrent à la fois la vie et la mort, le tragique de l’existence et les joies d’en profiter en toute liberté. La manufacture Hublot dédie à l’univers de ces crânes une Big Bang Calaveras gravée jusque sur le bracelet de ces symboles si parlants (en trois versions : céramique, acier et or rouge), dont on ignore généralement qu’ils figurent aussi, comme « traditions du Jour des morts », à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel (PCI) de la France, au même titre que le fest noz breton, la porcelaine de Limoges, les bandas basques ou la pétanque. Cette Big Bang suisse de 44 mm est donc une montre beaucoup plus multiculturelle qu’extravagante…

KUDOKE : Les heures qui portent bonheur…

N’est-il pas mignon, ce panda niché dans ses bambous et vautré sur le cadran de de cette montre mécanique Kudoke, maison allemande spécialisée dans le « squelettage figuratif », effectué à la main, des mouvements horlogers ? Il n’en faut pas plus pour faire chavirer le cœur des amateurs, qui ne débourseront guère que 8 500 euros pour ce chef-d’œuvre animalier, dont les sculptures en forme de tiges de bambou se prolongent au dos de la montre. En Asie, et tout particulièrement en Chine, le panda est un puissant porte-bonheur[jusqu’en 2010, tuer un panda était passible de la peine de mort !], mais, dans le monde entier, ce panda est un symbole de la lutte pour la préservation de la faune. Au poignet, ce sera en tout cas un excellent sujet de conversation…

PATEK PHILIPPE : Aux sources du mythe Calatrava…

Les Parisiens ont en ce moment la chance de pouvoir découvrir, avec une sorte d’exclusivité mondiale, une magnifique collection de montres Calatrava – la montre qui a sauvé la célèbre manufacture Patek Philppe au début des années 1930. L’Europe subissait alors de plein fouet la « crise de 1929 » et les riches clients de cette manufacture n’achetaient plus une seule des montres « compliquées » qui fait la réputation internationale de la maison. La bonne idée de la famille Stern, qui venait de racheter cette manufacture genevoise, aura été de relancer une montre relativement simple, facile à fabriquer, séduisante et profitable : ce sera la collection Calatrava, lancée en 1932 et toujours au catalogue en 2017 [son nom est inspiré par le logo de Patek Philippe, qui a repris comme emblème la croix de Calatrava, celles du plus fameux ordre militaire né pendant les Croisades]. On parlerait aujourd’hui de « changement de modèle économique » : c’était très audacieux pour l’époque et les horlogers suisses, eux aussi en crise, d’aujourd’hui devraient méditer cette initiative de Patek Philippe en pleine crise des années 1930. On peut voir à Paris une des seules montres connues de la première série de ces Calatrava : ce sera une des vedettes de la vente aux enchères « The Art of Calatrava », en novembre prochain à Genève. Une vingtaine de ces montres « historiques » – avec lesquelles tout a commencé – sont exposées pour quelques jours à la boutique Romain Réa des Champs-Élysées (25, rue Marbeuf, 75008 Paris) : elles disparaîtront du marché dès qu’elles auront été adjugées aux collectionneurs en lice pour les enchères…

TAG HEUER : Le néo-capitalisme expliqué aux jeunes générations…

La réussite d’une montre se joue sur la synthèse qu’elle peut opérer, en un clin d’œil, de multiples demandes générationnelles. C’est le cas de cette Formula 1 développée par TAG Heuer en collaboration avec le champion américain du street art Alec Monopoly, qui a bâti sa réputation, son style personnel (image en haut de l’article) et même son nom sur le petit personnage emblématique du Monopoly – un jeu de société qui exprime à l’état chimiquement pur les lois de l’offre et de la demande. L’artiste est suffisamment générationnel pour qu’on lui dédie un cadran, où se retrouvent ses graffiti et son personnage en mode comics. Il n’est pas indifférent que la manufacture suisse TAG Heuer ait choisi la collection Formula 1 [la montre sportive décontractée de ceux « qui vivent à 100 à l’heure »]pour cet hommage à l’art populaire contemporain : pas pour la vitesse, mais pour le prix public, qui ne dépassera les 1 200 euros. Avantage générationnel supplémentaire : cette montre à quartz « graphée » Alec Monopoly – désormais promu « ambassadeur de la montre » – ne sera vendue qu’en ligne, sur la plateforme de e-commerce mise en place par TAG Heuer. Le bon artiste avec la montre au bon prix sur le bon canal de distribution : ça commence à ressembler à un futur best-seller horloger…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

Lien : https://businessmontres.com/

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