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De l’héroïne à l'alcoolisme, la vie torturée de Guillaume Depardieu
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Bonnes feuilles

Guillaume Depardieu n'était pas seulement un grand acteur, un poète moderne ou un provocateur brillant. Il était aussi, et surtout, un chanteur et un parolier stupéfiant. Peu le savaient, un seul lui a permis de trouver la musique pour porter ses mots, son ami de toujours et parrain musical, François Bernheim. Cinq ans après sa mort, l'album sort, François raconte. Extrait de "Guillaume Depardieu, bande originale" (1/2).

Dans son plus jeune âge, Guillaume fut un enfant hyperactif ne dormant que quatre heures par nuit, épuisant pour ses parents, perpétuellement en demande d’attention et d’action, débordant de tendresse et d’agressivité. Pas étonnant que ce qu’il chante ici soit sa liberté totale d’user de son corps comme il le souhaite, de lui faire vivre tout ce qu’il désire connaître, pour mieux s’y reconnaître, expérimenter « le dérèglement de tous les sens » telle une initiation, pour se construire et, dit-il, apprivoiser le transport vers le ciel. Ce ne sont pas les enfers et l’ultime descente qu’il recherche, mais son ciel personnel, comme il le chante, dans un cri jubilatoire. De nouveau, ce qu’il clame, c’est sa liberté sans entrave, sa capacité à s’approprier son existence pleinement, y compris dans ce qu’il n’aurait pas choisi, y compris dans les prises de risques qu’il s’accorde. « Quand on veut vraiment savoir qui on est, il faut tout essayer », dit-il. Après la colle de l’enfance, le shit de l’adolescence et les champignons hallucinogènes à 14 ans, il goûtera à tout : héroïne, speedball, crack, ecstasy… Avant de conclure, en 2004 dans "Tout donner", que « la came c’est de la non-vie ».

De ses années d’héroïne, il regrette surtout le temps perdu, « six ans de ma vie là-dedans ». Mais il en revendique la quête, puis le sevrage, physiquement douloureux, qui a accompagné sa construction, le rendant « plus fort ». On entend Nietzsche derrière lui, et sa trop fameuse (et reprise) formule, « ce qui ne me tue pas me rend plus fort » dont on oublie souvent qu’elle succède à la non moins lapidaire : « appris à l’Ecole de guerre de la vie ». Philosophe ironique, torturé et trop exclusivement jugé pour cela, Guillaume l’était tout autant que le rêveur du Surhomme ; comme lui, il cherchait à vivre la vie plus fort, à se dépasser, et employait pour cela son humour, son intelligence aiguë et ses mots. Mais l’on entend aussi, dans ce Je fais ce que je veux, un Guillaume enfantin et provocateur, conscient de l’infaillible réalité et s’en amusant parfois. Il le fit sa vie durant, en parlant de ses addictions devant les caméras : celle à l’alcool notamment.

Ainsi devant l’œil de Céline Hue, la réalisatrice du "Combat de Guillaume Depardieu", qui l’a suivi avant et après l’amputation, Guillaume boit du vin dès le matin, un vin provenant des vignobles de son père, « le vin de Gérard ». Il assume : « C’est comme dans Le Petit Prince, je bois pour oublier que je bois. (…) J’ai la chance d’être réfractaire à toute idée d’assujettissement. Donc, je bois en grosse quantité, mais je ne suis pas alcoolique, je suis excessif. » Après l’amputation de sa jambe, dans le centre de rééducation de Valenton, las, Guillaume revient sur ses paroles et admet, en gros plan : « Quand on a un problème, il faut l’affronter. Moi mon problème c’est l’alcool (…) Il faut que je me méfie de tout, et surtout de moi-même. » Ainsi, le corps peut-il se rebeller et, à tant être manipulé par l’esprit, devenir à son tour manipulateur. Guillaume n’en était pas dupe. L’affirmer est quasiment une plaisanterie, une bravade ; son corps n’ayant pas succombé à des overdoses ou à des comas éthyliques, c’est bien un bras d’honneur qu’il ose ici : j’apprivoise les transports vers le ciel… Qu’il compense par l’aveu poétique : A mon tort dépendant, à mon corps défendant.

Extrait de "Guillaume Depardieu, bande originale", François Bernheim, Sylvie Matton, (Editions Grasset), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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