Troisième bulle du bitcoin : la monnaie électronique va-t-elle monter jusqu'au ciel ? Peut-être bien !<!-- --> | Atlantico.fr
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La première bulle du Bitcoin est survenue en juin 2011.
La première bulle du Bitcoin est survenue en juin 2011.
©Reuters

Crever le plafond

Le cours du Bitcoin est passé de 150 à 650 euros entre le début du mois et le 19 novembre. La troisième bulle, nous y sommes ! Et ce n'est pas terminé.

Philippe Herlin

Philippe Herlin

Philippe Herlin est chercheur en finance, chargé de cours au CNAM.

Il est l'auteur de L'or, un placement d'avenir (Eyrolles, 2012), de Repenser l'économie (Eyrolles, 2012) et de France, la faillite ? : Après la perte du AAA (Eyrolles 2012) et de La révolution du Bitcoin et des monnaies complémentaires : une solution pour échapper au système bancaire et à l'euro ? chez Atlantico Editions.

Il tient le site www.philippeherlin.com

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Jusqu'où va aller le bitcoin ? Sommes-nous face à une gigantesque bulle ? Mercredi dernier, le 20 novembre, nous pensions avoir vécu la troisième bulle de l'histoire mouvementée de cette monnaie : après une progression régulière durant tout le mois de novembre, partant de 150 euros et atteignant un plus haut à 650 euros le 19, le cours s'écroule à 350 euros le 20. Fallait-il s'attendre à une accalmie ? Pas du tout, le cours a immédiatement recommencé à grimper pour revenir à 600 euros le samedi 23 novembre ! Ce n'était donc qu'un décrochage... Jusqu'où cela va-t-il continuer ?

Rappelons les causes de ces bulles, qui permettent par là même de mieux comprendre cette monnaie.

La première bulle survient en juin 2011. Cette jeune monnaie numérique (elle est née en janvier 2009), qui vaut alors quelques cents, fait l'objet d'articles dans la presse américaine (Forbes notamment) et d'attaques de la part de membres du Congrès au motif que son anonymat permet à ses détenteurs d'acheter de la drogue sans se faire repérer. Cette première mise sous les projecteurs fait exploser son cours à 30 dollars, avant qu'il ne retombe au plus bas à 3 dollars. Le bitcoin sort du milieu des "geeks" pour susciter l'intérêt des médias.

La deuxième bulle date de mois d'avril de cette année et met en lumière les avantages intrinsèques de cette monnaie. Car oui, il ne s'agit d'une nouvelle bulle des tulipes, il existe de vrais arguments rationnels, compétitifs en faveur de cette monnaie. En ce mois d'avril Chypre tombe en faillite et décide de ponctionner directement les gros comptes bancaires pour se renflouer. Et l'Union européenne approuve, encourage même. Coup de tonnerre chez tous les détenteurs d'une épargne financière importante à travers l'Europe : un compte bancaire ne présente pas une sécurité absolue. Alors qu'un compte bitcoin... personne ne peut vous le prendre, vous êtes en dehors du circuit bancaire, à l'abri de la mainmise étatique ! L'idée fait vite son chemin. Au même moment en Espagne, où le secteur bancaire est mal en point, on note un pic de téléchargement d'applications smartphones permettant de d'acheter des bitcoins.

En même temps en Argentine, l'inflation dépasse les 10% et le gouvernement met en place un contrôle des changes. Mais le bitcoin, lui, s'affranchit des frontières et permet donc à des Argentins de commercer aisément avec les pays limitrophes. Le contrôle des changes n'est d'aucune efficacité contre le bitcoin ! Ces événements font que le bitcoin passe de 10 euros, fin 2012, à plus de 200 en avril avant de chuter à 50 puis de se stabiliser à 100 euros durant l'été.

La troisième bulle, nous y sommes ! Il y a tout d'abord un autre avantage intrinsèque du bitcoin qui est mis en lumière par plusieurs levées de fond : le paiement via bitcoin. Une transaction, ou un virement, qui passe par des bitcoins (les euros du client sont changés en bitcoins, envoyés au destinataire, puis rechangés en euros). Quel intérêt ? C'est nettement moins cher que de passer par une carte bancaire, ou Paypal, ou Western Union. Le bitcoin est une plateforme monétaire low cost qui concurrence tous les moyens de paiement existants, et plusieurs startups se lancent sur ce créneaux (le leader américain, BitPay, a déjà référencé 100.000 marchands). Les enjeux financiers sont gigantesques.

Mais la bulle actuelle marque surtout l'amorce de l'institutionnalisation de cette monnaie. Le 3 octobre, le FBI ferme Silk Road, le principal site de vente de drogue acceptant le bitcoin. Le cours, autour de 100 euros, ne bouge aucunement, prouvant ainsi que les trafics illicites comptent pour quantité négligeable dans la croissance du bitcoin, et cela rassure évidemment tous ceux qui s'interrogeaient sur cette monnaie. Peu de temps après, l'un des plus importants sites mondiaux, eBay (propriétaire de Paypal), déclare qu'il s'intéresse au bitcoin. Impossible de l'ignorer désormais dans le monde de l'Internet !

Mais le bitcoin s'institutionnalise aussi en Chine. Baidu, le premier moteur de recherche du pays, annonce qu'il accepte les paiements en bitcoins. Ce fait traduit le subit intérêt des Chinois pour cette monnaie (et donc des autorités, sans qui rien ne peut se faire). On peut d'ailleurs rapprocher cet engouement de celui pour l'or, puisque l'on sait que la banque centrale acquière de grandes quantités d'or et que les autorités encouragent les Chinois à faire de même. Justement, le bitcoin c'est un peu de "l'or numérique" car - autre avantage intrinsèque fondamental - son algorithme fait qu'il n'y en aura jamais plus de 21 millions en circulation (actuellement 12 millions ont été créés). Il n'y aura donc jamais de planche à billets, jamais d'inflation monétaire, un sacré avantage par rapport au dollar, au yen ou à l'euro !

Aujourd'hui, en prenant un cours de 600 euros, les 12 millions de bitcoins en circulation pèsent 7,2 milliards d'euros. C'est beaucoup pour une monnaie aussi jeune, mais infime à l'échelle des flux financiers mondiaux. Cela reste, à notre avis, très faible compte tenu de ses qualités intrinsèques. Alors jusqu'où peut aller le bitcoin ? Prenons un élément de comparaison : Skype c'est de la "voix sur Internet" (notre voix passe sur Internet et non pas sur les réseaux télécoms), de la même façon que le bitcoin est de la "monnaie sur Internet" (au lieu de passer par les réseaux bancaires). Aujourd'hui on estime que Skype représente un tiers des communications internationales. Si le bitcoin assure un jour un tiers des virements internationaux, il ne pèsera pas 7,2 milliards d'euros mais sans doute 100 fois plus. Et cela sans envisager toutes ses autres utilisations (paiement, moyen d'épargne, etc.). Alors oui, les "bulles du bitcoin", nous n'avons pas fini d'en parler !

A lire de l'auteur de cet article : La révolution du Bitcoin et des monnaies complémentaires : une solution pour échapper au système bancaire et à l'euro ?, Philippe Herlin (Atlantico Editions). Pour acheter ce livre, cliquez ici.









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