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Les personnes fragilisées avec des problèmes cardiaques ou digestifs peuvent développer des gastroentérites en buvant de l’eau de la Seine.
Les personnes fragilisées avec des problèmes cardiaques ou digestifs peuvent développer des gastroentérites en buvant de l’eau de la Seine.
©Reuters

Beurk

L'eau de la Seine en Ile-de-France contiendrait des produits chimiques potentiellement dangereux mais serait pauvre microbiologiquement grâce aux stations d'épuration. Ainsi, d'un point de vue microbiologique, vous ne risquez pas grand-chose à en boire en petite quantité.

Christopher Payan

Christopher Payan

Christopher Payan est virologue au CHU de Brest et professeur à la faculté de médecine de l'université de Bretagne Occidentale (Brest).

Il est l'un des auteurs de Mini manuel de microbiologie (Editions Dunod)

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Atlantico : Les analyses s’accordent sur la qualité de l’eau de la Seine en Ile-de-France, qui contient des produits chimiques potentiellement dangereux et des déchets en tout genre. Que se passerait-il si l’on buvait un verre d’eau de la Seine ? Quelles maladies infectieuses pourrait-on contracter ?

Christopher Payan : Je pense que le risque est surtout dû aux produits toxiques que contient l’eau de la Seine. Le risque microbiologique est lié aux infections par les matières fécales. Il faut qu’il y ait une pollution de l’eau par les eaux d’élimination des toilettes ou à partir des champs avec les selles d’animaux. C’est ce qui va alimenter en micro-organisme la rivière. En général, les eaux usées sont décontaminées avant d’être reversées dans les rivières. Dans la Seine, on trouvera plutôt des produits toxiques provenant des industries, il s’agit davantage d’un problème toxicologique que microbiologique. Ainsi, d'un point de vue microbiologique, vous ne risquez pas grand-chose à boire de l’eau de la Seine s'il s'agit d'une faible quantité.

Cependant, les personnes fragilisées avec des problèmes cardiaques ou digestifs peuvent développer des gastroentérites en buvant de l’eau de la Seine.

Quels virus, bactéries, parasites l’eau du canal véhicule-t-elle ? Y a-t-il un élément contaminant en particulier ou est-ce un ensemble de contaminants ? Lesquels ?

Si l’eau est bien épurée, on doit trouver peu de bactéries. Les virus passent plus facilement les filtres. Les stations d’épuration ont des systèmes de boue censés précipiter toutes les matières organiques présentes dans l’eau. Celles-ci piègent les virus qui tombent dans les boues. L’eau épurée est rejetée vers la rivière, elle est donc presque indemne de micro-organismes. Les produits toxiques en solution dans l’eau, eux, ne sont pas éliminés par les boues et peuvent rester dans l’eau.

Dans un canal ou dans la Seine on peut trouver toutes sortes de bactéries de l’environnement qui n’ont pas de conséquences pour l’homme. J’aurais tendance à dire que c’est un ensemble de contaminants, il n’y a pas de raison qu’on se retrouve dans une situation épidémique où, à cause d’un contaminant, une maladie se propagerait.

Le colibacille (Echerichia coli) est la bactérie la plus courante. C’est un marqueur fécal, il vient des selles des animaux et des humains et se retrouve dans l’eau. Les analyses que l’on fait en bord de mer permettent de voir si une plage est polluée ou non par des matières fécales provenant de l’environnement.  

La situation est-elle comparable pour un verre d’eau de mer à Marseille ? Pourquoi ?

L’effet du sel dans la mer empêche les micro-organismes de survivre. Cependant, l’eau à Marseille dans les évacuations près des Calanques ne doit pas être très bonne. Mais loin de ces zones d’évacuation, il n’y a pas de pollution.

Ces eaux sont-elles vraiment usées ?  

Microbiologiquement parlant, je ne pense pas qu’elles soient si usées. En réalisant plusieurs prélèvements en bordure d’étang, même quand l’eau parait visuellement sale, on s’est aperçu que l’eau était pauvre microbiologiquement, donc plutôt saine.  Quand l’eau est verte ou marron, c’est qu’il y a des algues et que des micro-organismes marins sans incidence sur la santé humaine cohabitent.

Quels tests peut-on réaliser pour connaître la composition de l’eau ?

Le test de nitrate donne un avis sur les produits organiques qui circulent et les polluants qui se retrouvent dans l’eau donnent un niveau de pollution. Il y a aussi tous les autres contaminants.

D’un point de vue microbiologique, on isole les bactéries sur une boîte de Petri. Chaque point correspond à une bactérie multipliée en plusieurs exemplaires. Avec un coton-tige plongé dans l’eau, on peut voir s’il y a ou non des bactéries.

Les traitements d’assainissement peuvent-ils éliminer les germes bactériologiques ?

Oui. Les stations d’épuration précipitent les matières organiques présentes dans l’eau. De petites particules sédimentent et tombent toutes seules. Cela fait une sorte de boue qui peut servir d’engrais. L’eau à la surface est rejetée, il peut y avoir encore quelques bactéries dedans mais de façon très minime sans conséquences particulières. On trouve ces stations d’épuration partout en bord de mer ou le long des rivières. Ce système est bien maîtrisé et permet d’expliquer qu’il n’y ait pas d’épidémies en France comme dans certains pays en développement.

Propos recueillis par Karen Holcman

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