Comment (et avec quelles conséquences) François Hollande est devenu le président le plus décevant de l'histoire de la Ve République<!-- --> | Atlantico.fr
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Contrairement à Nicolas Sarkozy, François Hollande n'a pas bénéficié d'un état de grâce après son élection.
Contrairement à Nicolas Sarkozy, François Hollande n'a pas bénéficié d'un état de grâce après son élection.
©Reuters

Dure réalité

La fin de l'été suivant l'année de l'élection présidentielle est un tournant politique qui permet d'évaluer les premiers effets d'un an effectif de mandat.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Atlantico : En tant que président de la République, François Hollande connait une baisse de popularité historique particulièrement précoce sur les quatorze premiers mois de son mandat, c'est-à-dire à la sortie de l'été de l'année suivant l'élection. Comment expliquer qu’il ait déçu plus tôt que Nicolas Sarkozy ?

Jérôme Fourquet : Si onreprend les chiffres, on constate qu’en 2007 Nicolas Sarkozy a bénéficié d’un véritable état de grâce, le bashing n’ayant pas encore été totalement mis en place. Ainsi, une série d’événements, aussi « bling-bling » soient-ils comme les infirmières bulgares, et malgré ses vacances sur le yacht de Boloré, lui avaient permis de maintenir sa côte de popularité assez haute. Les Français pensaient que c’était le prix à payer pour avoir un président qui « mouillait la chemise » et qui obtiendrait des résultats. Le décrochage plus tardif, à l’automne 2007- début 2008, fut très violent quand l’opinion eut dans l’idée que le président Sarkozy avait passé plus de temps à se préoccuper de sa vie privée que de l’état du pays et que les résultats ne viendraient peut-être pas. Ce délai de latence faisait de plus suite à une campagne électorale avec beaucoup d’engouement et de vrais espoirs de changement.

En 2012, nous étions dans une situation différente. François Hollande partait de moins haut que Nicolas Sarkozy, les attentes étaient plus faibles mais la déception fut grande. Il s’est de plus passé des choses à l’été 2012 qui ont renforcé la réalité de la crise dans la perception des Français comme les fermetures d’usines, notamment celle de PSA à Aulnay, la hausse des prix des carburants, de fortes tensions sur la zone euro, etc. Enfin, ce sentiment des Français est télescopé par les images du couple présidentiel en vacances à Brégançon qui provoque un effet catastrophique sur la vision de l’exécutif. Pour parachever cette impopularité, il y a eu un ratage de tempo entre la volonté de « ralentir » la communication présidentielle de François Hollande et l’emballement de la crise.

La popularité des présidents de la Vème République quatorze mois après leur élection:

Évolution comparée de la popularité de Nicolas Sarkozy et de François Hollande:

François Hollande peut-il espérer un « rebond chiraquien » ? Est-ce ce qu'il espère en multipliant les annonces comme l'inversion de la courbe du chômage ? 

Jacques Chirac avait fortement dévissé en 1995 suite au mouvement social des cheminots mais lorsque celui-ci fut digéré, le président put récupérer quelques points de popularité. La situation d’impopularité de François Hollande est bien plus structurelle et il serait plus juste de la comparer à la seconde partie mandat de Nicolas Sarkozy où ce dernier était cantonné à des chiffres très bas. Il y a de plus de très forts doutes des Français quant à la capacité de l’exécutif à inverser la courbe du chômage, et même si cela venait à arriver, le délai de latence caractéristique de l’opinion ralentirait l’effet de cette nouvelle dans les chiffres de la popularité. Peu d’espace donc pour une remontée significative et rapide.

Évolution comparée de la popularité de Jacques Chirac et de François Hollande:

Les Français les plus déçus par François Hollande sont les sympathisants des partis qui ont soutenu sa candidature au second tour de l’élection présidentielle, le Front de gauche et le Modem. Comment expliquer que les deux groupes puissent être déçus "en même temps" alors qu'ils se trouvent respectivement à gauche et à droite du PS ?

Pendant de nombreux mois, François Hollande n’a pas tranché et a donné des signes contradictoires : des hausses d’impôt d’une part et le crédit compétitivité d’autre part. Ainsi, il a perdu sur les deux tableaux. Clairement l’électorat du Front de gauche juge sa politique comme similaire à celle de la droite, ce qui devrait être renforcé par la future réforme des retraites. Au Modem, l’électorat centriste, en rupture avec Sarkozy, qui considérait Hollande comme un allié potentiel, est assez déçu sur deux sujets corollaires qui sont sensibles à leurs yeux : la bonne gestion des comptes publics et l’augmentation des impôts. Or, cette dernière est, sans reprendre la vulgate de l’UMP, est jugé comme très lourde voire comme du matraquage. 

Évolution de la popularité de François Hollande en fonction des sensibilités politiques :

Comment se traduit électoralement l’importante déception des Français quant à l’action de François Hollande ? Vers quel bord politique les voix semblent-elles se déporter ?

Il y a eu peu d’élections mais les enseignements sont clairs. Le PS a perdu toutes ses élections sans exception. Cela est probablement dû à une forte abstention de cet électorat socialiste. Contrairement à ce qu’espéraient Mélenchon, ces voix ne se reportent pas vers eux, aucun frémissement à signaler du côté du Front de gauche ni d’EELV. Les voix du Front national grossissent mais il faut garder à l’idée qu’il y a la France qui peut entrer dans l’abstention et celle qui peut voter Front national. Elles peuvent se croiser mais ne sont pas nécessairement les mêmes.

Intentions de vote pour les élections européennes de 2014

Évolution de la popularité de Marine Le Pen

Comportement électoral au second tour des électeurs de gauche et des abstentionnistes du premier tour dans l'Oise et le Lot-et-Garonne

Propos recueillis par Jean-Baptiste Bonaventure

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