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Face à une droite divisée, ce que veut la droite forte
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Bonnes feuilles

L'auteur Marika Mathieu enquête sur la droite forte, ses adversaires sous-marins - Droite populaire, Droite sociale, Droite humaniste - et sur le destin de la droite tout entière. Extrait de "La Droite forte année zéro : Enquête sur les courants d'une droite sans chef", extrait (2/2).

Marika Mathieu

Marika Mathieu

Marika Mathieu est journaliste indépendante, diplômée d'un master en journalisme international à la City University de Londres. Elle est l'auteur du livre La Droite Forte : Année Zéro - Enquête sur les courants d'une droite sans chef paru le 2 mai 2013 aux éditions de La Martinière.

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"Nous sommes fiers d’être français, nous sommes fiers d’être de droite, nous sommes fiers d’être sarkozystes", martèle la Droite forte. Au nom de leur très grande fierté à être ce qu’ils sont, Guillaume Peltier et Geoffroy Didier déroulent tout un programme. Quels en sont les points forts ? Interdiction du droit de grève pour les enseignants ! Des journalistes de droite ! Une Charte pour les musulmans ! Et la fête au Trocadéro. Des idées résumées, et résumables, en quelques "coups" médiatiques et un joyeux accent national- populiste ? Voilà en tout cas des jeunes qui ne manquent pas d’air (sur leur droite) et rendent le²urs aînés très mécontents, du moins en apparence. Leur motion est tantôt réac’, tantôt moderniste, tantôt libérale, tantôt protectionniste, souvent très proche du Front national quand il s’agit de frapper "fort". Car la Droite forte insiste : il est de leur "devoir" de parler aux électeurs "perdus" du FN.

"Les idées mènent le monde"

"La première chose, c’est d’ailleurs ce que nous a enseigné Sarko, c’est que ce sont les idées qui mènent le monde. Les idées d’abord", insiste Guillaume Peltier, qui n’a pas la main sur le cœur car il tient son Coca autant que son portable. Alain Carignon, le bon parrain, a des mots semblables : "Avec eux, il n’y a pas de limite. Mais ce sont les idées qui passent en premier." Sur le même thème, Camille Bedin, assise quelques jours plus tôt à la place de Guillaume Peltier, complète : "On s’est dit avant de partir en campagne qu’on voulait faire une campagne à la Sarko. Dans le même état d’esprit, quitte à choquer. On préfère susciter le débat. Même entre nous, on a eu des débats, mais au moins on parle des sujets. On préfère balancer des pavés dans la mare." Les idées fortes, c’est donc, selon Guillaume Peltier : "Briser les codes, et les tabous du microcosme, du politiquement correct, de ce qui arrange tout le monde, parce qu’il y a plein de choses à faire et plein de choses qui ne fonctionnent pas, et qu’on n’ose pas le dire ni apporter des solutions. C’est ce qu’a si bien incarné Nicolas Sarkozy en 2007 et en 2012." La Droite forte se revendique d’une filiation directe avec le président déchu. Perpétuer et amplifier son oeuvre, tel est son dessein.

Refonder la culture de droite

La Droite forte se présente résolument inscrite dans le siècle ouvert à la modernité par Nicolas Sarkozy. "C’est dans la lignée de la “France forte” que nous avons créé “La Droite forte”", lit- on dans la motion. Avec l’ambition de "refonder la droite de demain. La véritable valeur ajoutée du sarkozysme, c’est d’avoir rassemblé les droites, d’avoir réconcilié la droite avec le peuple. Nous souhaitons poursuivre la “révolution culturelle” du sarkozysme en faisant émerger une nouvelle société."

Au chapitre des valeurs, la motion indique donc d’un bloc "le patriotisme, la récompense du travail et du mérite, l’autorité républicaine, le soutien aux PME, la lutte contre les fraudes et l’assistanat, la souveraineté et la maîtrise de notre destin". Et il s’agit pour affirmer ces "valeurs" de "refuser le prêt- à- penser idéologique de la gauche qui veut nous imposer une société de facilités, d’assistanat et de laxisme. Nous refusons la pensée unique, le politiquement correct, la culture de l’excuse et de la déresponsabilisation." Dans une "Lettre au peuple de droite", parue le 30 octobre 2012 dans Le Figaro, Guillaume Peltier affirme : "C’est la crise d’un monde qui meurt et l’émergence d’un monde qui naît, avec une nouvelle hiérarchie des valeurs, moins individualistes, moins consuméristes, moins mondialistes. Il faudra pour en sortir plus de modernes que d’anciens, plus de courage que de verbiage, plus de renouveau que de conservatisme. Il n’est plus temps de prolonger la social- démocratie à la française, il faut tourner la page du réformisme faible et engager la révolution des idées. Nous voulons changer le monde ? Alors changeons de logiciel intellectuel en allant beaucoup plus loin, plus vite, plus fort."

L’adversaire "culturel" est à gauche, étendard du "politiquement correct", mais aussi à droite. C’est la droite « d’avant » qui ne passe plus. « Moi, je pense que la droite a changé à partir de 2002 sous l’influence de Nicolas Sarkozy, analyse Camille Bedin. Avant, on était dans une droite qui ne s’affirmait pas. Il y a une phrase de Maurice Druon 1 que je cite souvent, c’est : “En France, il y a deux partis de gauche, dont un qu’on appelle la droite”. » Elle poursuit : « Avant 2002, c’était ça, pour moi, la droite : une antigauche qui ne se disait pas vraiment de droite, langue de bois un peu réac’, un peu molle. Chirac, pour moi, n’est pas un homme de droite et n’a jamais réformé la France. À partir de 2002, on a évolué vers autre chose. Le constat, c’est que l’UMP ne peut pas redevenir ce que la droite était avant 2002. C’est pour ça que je me suis engagée, pour que l’UMP ne retombe jamais dans le passé et reste dans cette fierté d’être de droite, de faire des choses. »

"Moi, je ne veux pas de la droite molle", indique de son côté Guillaume Peltier, qui se commande un verre de brouilly (ce n’est pas le même jour que le coca et c’est l’heure de l’apéro, il doit patienter jusqu’à 23 heures pour rejoindre le plateau de BFM TV)."C’est une droite vieille, bourgeoise, giscardienne. C’est le XXe siècle. Elle n’a pas compris les enjeux de la société. Elle se soumet aux codes et aux tabous de la société française. Il y a des codes et des tabous. Il y a des sujets dont on ne peut pas parler. Ça m’insupporte. Je veux parler de tous les sujets. C’est une droite qui considère à tort, comme le dénonçait Pasqua - et c’est une très bonne formule - que l’UDF apporte les élus et le RPR les électeurs. C’est une droite qui, à force d’oublier profondément ce que pensent les électeurs et le peuple de droite, finit par s’affadir et fait le jeu du Front national."

Refonder la droite en l’affirmant "décomplexée". Sortir définitivement de la division interne UDF/RPR. Et rassembler les droites. Le mouvement, tel que pensé par la Droite forte, doit perpétuer "une révolution". "Idéologiquement, je reconnais que j’ai des choses à voir avec les électeurs du Front national, concède Guillaume Peltier. Mais je ne veux plus de ce truc agité comme un réflexe de Pavlov, de manière très facile, par des gens chez nous ou des gens à gauche, et qui offre un boulevard à cette imposture. Parce que c’est une imposture." Pour lui, le cap reste "clair" : "Refus de tout accord avec les dirigeants du Front national." Mais il ajoute tout de suite : "C’est aussi la revendication absolue, comme devoir, pas seulement comme droit, de m’adresser régulièrement aux électeurs du Front national." Position très exactement respectée par Geoffroy Didier, depuis le bureau de Brice Hortefeux, où le portrait de l’ancien président n’a pas été décroché : "Nicolas Sarkozy a exploré des sujets jusque- là interdits – des débats interdits, comme disait Jean- Paul Fitoussi. Année après année, passivité après passivité, lâcheté après lâcheté, négligence après négligence, on a laissé au FN le monopole de certaines valeurs qui, en fait, sont républicaines. Vouloir maîtriser les flux migratoires, c’est par exemple servir la cause des immigrés légaux, qui respectent les règles. Quand vous voulez faire en sorte que les Français se retrouvent, il faut faire en sorte qu’ils se retrouvent autour de symboles, le drapeau français notamment, et je ne vois pas pourquoi Marine Le Pen devrait avoir le monopole du drapeau français. Le patriotisme, c’est une valeur. Pourquoi a- t-on laissé au FN le monopole de cette valeur- là ?" Et Geoffroy Didier de conclure : "C’est pas qu’on n’a pas peur de reprendre des thématiques au FN, c’est qu’on en a le devoir. Moi, je suis un opposant au FN et j’assume complètement."

À l’aune de ces principes, voici la liste des "idées fortes" de la Droite forte, telles qu’elles sont présentées sur le site Internet officiel de la motion.

Extrait de "La Droite forte année zéro : Enquête sur les courants d'une droite sans chef" (Editions de la Martinière), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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