Ces facteurs qui font que la Grèce finira par s’en sortir tôt... ou tard<!-- --> | Atlantico.fr
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En 2010, la Grèce a sollicité une aide économique internationale.
En 2010, la Grèce a sollicité une aide économique internationale.
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Le bout du tunnel

Selon un édito du journaliste de Reuters Hugo Dixon, si la Grèce n'est pas encore tirée d'affaire, des signaux positifs laissent penser que le pays est en voie de rétablissement et pourrait bientôt voir le bout du tunnel.

Jésus Castillo

Jésus Castillo

Jésus Castillo est économiste, spécialiste de l'Europe du sud chez Natixis.

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Atlantico : Selon un édito du journaliste de Reuters, Hugo Dixon, si la Grèce n’est pas tirée d’affaire, il se pourrait bien que le pays soit en voie de rétablissement (voir l'article ici). Partagez-vous l’optimisme de l’éditorialiste ?

Jésus Castillo : Oui et non. Oui, on voit bien que des choses ont évolué depuis 2010, moment où la Grèce a sollicité l’aide internationale. Néanmoins, je trouve cet éditorial beaucoup trop optimiste quant au temps que va prendre le rétablissement de la Grèce. L’éditorialiste en question voit une sortie de crise rapide mais à nos yeux, une sortie de crise semble peu probable. Même si certaines choses s’améliorent (la consommation des ménages, le coût de la demande intérieure,etc.) il reste encore beaucoup d’ajustements à faire. Dans ce contexte, nous ne voyons pas comment le pays retrouvera de la croissance avant 2015. Nous sommes plus pessimistes que le FMI et l’Europe qui voient une croissance positive dès 2014.

Effectivement, on observe que la compétitivité s’améliore et que les prix s’ajustent à la baisse. Alors que, jusqu’à maintenant, on constatait des salaires à la baisse mais les prix, eux, ne baissaient pas. Idem pour le prix des exportations qui commencent à refléter les coûts salariaux, ce qui va améliorer la compétitivité du pays. 

Néanmoins, l’industrie est toute petite, de l’ordre de 8% de la valeur ajoutée, comparée à 12% en France. Deux conséquences : il n’y a pas grand-chose à exporter d’une part et d’autre part, il n’y a pas grand chose à consommer sur place. Le pays est fortement dépendant de ses importations. Cette demande intérieure très forte a creusé le déficit de la balance commerciale. Si cette dernière atteindra bientôt l’équilibre en Grèce comme le souligne l’article, c’est grâce à la compression de la demande intérieure. Il n’y a pas de processus de ré-industrialisation et nous avons des doutes sévères sur une potentielle ré-industrialisation de la Grèce.

Pour Hugo Dixon, la coalition d’Antonis Samara demeure populaire malgré les mesures d’austérité mises en place, qui devraient causer à l’économie une chute de 5% et un taux de chômage qui devrait atteindre 30 % de la population active. Pensez-vous que malgré ces chiffres, la Grèce puisse atteindre l’équilibre primaire (c'est-à-dire arriver à l'équilibre budgétaire avant le paiement des intérêts) ?

Du fait d’un scénario de croissance plus pessimiste que celui de la Troïka, nous estimons que le retour à l’équilibre primaire ne se fera pas avant 2014. Il y a effectivement un redressement du déficit public mais pas comme il faudrait. En clair, une partie du rééquilibrage devrait venir de l’accroissement des recettes mais la fraude fiscale étant, les Grecs n’arrivent toujours pas à s’en sortir. De ce fait, la Grèce doit compenser par l’augmentation des dépenses publiques qui demeurent le seul levier d’action. Cela est récessif. Régler ce problème nécessitera un certain temps.

La Grèce devra-t-elle implémenter de nouvelles mesures d’austérité ?

Le FMI est déjà en partie revenu sur ses politiques d’austérité, reconnaissant qu'elles avaient des effets plus récessifs qu’anticipé. D’où les délais supplémentaires accordés à l’Espagne et au Portugal pour réduire leur déficit budgétaire. A trop serrer la vis, on ne favorise pas la croissance.

Les 50 milliards d’euros destinés à recapitaliser les banques considérées comme viables et fermer les autres permettront-ils de sauver le système bancaire grec ?

C’est forcément une bonne nouvelle, mais il aurait fallu prendre cette dimension en compte plus tôt. Si les banques étaient en difficulté à cause de la récession, il fallait  réinjecter du capital pour qu’elles soient viables.

Les 8,2 milliards de liquidités destinées à éponger les dettes du gouvernement, ainsi que des prêts à faible taux vont-ils finir par profiter au secteur privé ?

On retrouve cette problématique en Espagne, où les administrations publiques sont à court de liquidités et ne payent plus leurs fournisseurs, ce qui les met en difficulté. Donc, oui c’est un soutien à l’activité économique.

En Espagne, il y a eu un fonds dédié aux arriérés de factures des administrations publiques. Certains fournisseurs avaient même décidé d’arrêter de travailler, il n’y avait plus de service de nettoyage dans certaines écoles. Idem dans le système de santé. Cela peut créer des dysfonctionnements dans toute l’économie.

Quelles sont les chances pour que la zone euro s’accorde sur le fait d’alléger la dette grecque en diminuant ses taux d’intérêt, ce qui permettrait de baisser les coupes budgétaires ?

Les conditions ont été clairement énoncées. Les taux d’intérêts seront diminués lorsque l’équilibre primaire sera atteint. En somme, quand le pays aura prouvé qu’il est capable de financer, par ses propres moyens, ses dépenses publiques. Ce n’est pas improbable mais certainement pas à l’horizon 2013, plutôt 2014.

Quelles sont les menaces qui planent encore sur le pays et qui risquent de l’empêcher de s’en sortir ?

Toute aggravation de la récession en zone euro serait néfaste. Aujourd’hui on voit que le secteur du tourisme continue de fonctionner en Grèce. Une récession en zone euro affecterait ce secteur ; tout comme des extensions sur les taux d’intérêts ou encore un dérapage des finances publiques. Oui, un jour ils vont s’en sortir… mais pas tout de suite.

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