Diversion... François Hollande est-il en train d'essayer de convaincre que la droite ne pense qu'à défendre les riches et l'argent ? <!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande a demandé à ses ministres de déclarer leur patrimoine.
François Hollande a demandé à ses ministres de déclarer leur patrimoine.
©Reuters

Subterfuges

Les ministres ont déclaré leur patrimoine cette semaine. Stéphane Le Foll a ainsi précisé qu'"être riche et être de gauche [...] est tout à fait compatible". Comme si cela était en quelque sorte contre-nature...

Bruno de la Palme

Bruno de la Palme

Bruno de la Palme est journaliste économique et politique. Après la direction du service économique de RFI, il a participé au lancement de l’émission Capital sur M6. Il est aujourd’hui réalisateur indépendant de documentaires pour la télévision. Il a publié 100 ans d'erreurs de la gauche française (la Boite à Pandore 2012).

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Atlantico : Certains ministres ont déclaré un patrimoine dont ils se sont sentis obligés de se justifier. Stéphane Le Foll a ainsi précisé qu'"être riche et être de gauche [...] est tout à fait compatible". Comme si cela était en quelque sorte contre-nature. En creux, cela revient-il à dire que c'est normalement dans la nature de la droite de défendre les riches ?

Bruno de la Palme : Bien sûr, car c’est le catéchisme de la gauche. Cela fait des décennies qu’elle tape sur les riches , sur ceux qui réussissent et sur la droite censée les représenter. Arrivé au pouvoir, Hollande s’est enferré avec ce symbole de la mesure emblématique des 75% officiellement présenté comme un impôt punitif. C’est réussi : ils ont poussé massivement à l’exil les  talents et les jeunes diplômés, à un rythme jamais atteint en France !  

Malgré tout, leur opération « mains propres » s’est déjà retournée contre eux : le rideau de fumée s’est dissipé , la gauche caviar existe toujours, elle est même installée au gouvernement. On voit bien cette gêne de ministres obligés de nous dire, l’air peu convaincu « qu’être riche et de gauche est tout à fait compatible ».

Un frisson nous parcourt devant cet aveu incroyable ! Mais alors pourquoi M Hollande  a-t-il asséné en 2007 devant des millions de Français, en direct sur un plateau de télévision, qu’il « n’aimait pas les riches et qu’on l’était à partir de 4000 € par mois »  

Pourquoi cette hypocrisie et cette haine affichée de la réussite quand l’édile de la Corrèze gagnait lui-même alors environ 7 fois cette somme en cumulant tous ses postes  publics ? L’adage de Nicolas Sarkozy se vérifie : « La gauche déteste l’argent quand ce n’est pas le sien ! » Mais le voilà qui s’étale. On n’a pas oublié la  démonstration de la gauche Porsche avec DSK..

A force de renforcer les Français dans leurs plus bas instincts, la jalousie et la suspicion, les socialistes vont maintenant en pâtir eux-mêmes , tel l’arroseur arrosé.En attendant que des journalistes un peu curieux aillent regarder plus en avant du côté du patrimoine de celui qui lave plus blanc .Mais il n’y a pas de quoi rire. Les valeurs traditionnelles de la réussite, du travail et de l’effort qu’incarne la droite ont été mises à mal trop longtemps.

En faisant dériver l'affaire Cahuzac sur la question du patrimoine des élus, François Hollande a-t-il fait preuve d'une habile stratégie de diversion ?

Tout le monde a compris la raison  de l’opération de moralisation-diversion après le choc Cahusac. Ce séisme est d’autant plus redoutable pour la gauche- camp du bien- qu’il ravage son propre terrain qu’elle s’est auto approprié, celui de la morale.

Tout droit sortie d’esprits formés à la dialectique marxiste, la Moralisation est donc un contre feu  destiné à  renvoyer la faute  sur l’ensemble de la classe politique et d’abord sur la droite. Est-ce habile ? Si la ficelle est vraiment grosse, elle occupe en tous cas largement les médias et amuse la galerie. Les journalistes  épluchent les patrimoines, font des classements et dressent des listes. Tel Ministre a plus de patrimoine qu’un autre ? Ah bon ? Mais pourquoi et d’où lui vient cet argent ? Une véritable inquisition publique s’en empare, et c’est à celui qui se parera de la vertu d’être le plus pauvre. Outre-Atlantique, cela paraitrait plutôt comme une tare, ici ce sera vu comme un critère de dignité. A l’avenir est on sûr qu’avec cette absurde grille de lecture, les plus capables sortent des urnes ? Quand transparence rime avec incompétence...

Le monde entier nous plaint ou ironise !C’est  du temps de gagné pour l’immobilisme du gouvernement socialiste. Pas pour le pays dont l’économie continue de s’enfoncer et la marée du chômage monter.

En quoi la droite pourra-t-elle paradoxalement pâtir de la gestion de cette affaire et de la confusion qu'elle entretient ?

La droite est directement visée ne serait-ce que parce que la gauche veut désormais interdire dans sa réforme certains métiers de pouvoir prétendre à la députation. Or les députés issus du privé sont bien plus nombreux à droite qu’à gauche. On tend donc vers une Assemblée composée uniquement de fonctionnaires.

Ca tombe bien, c’est à priori ceux qui ont peu de patrimoine. Avec leurs modestes indemnités, ils n’ont jamais connu les « horreurs du privé », et n’ont donc pas la moindre idée dont fonctionne l’économie. Vive la République des professeurs ! Vive la non réforme garantie ! 

Le rapport à la richesse continue-t-il de marquer dans l'opinion le clivage droite/gauche ?

Si l’affaire Cahuzac a eu au moins une vertu c’est de démonter qu’au-delà des étiquettes, les hommes ne sont que des hommes. Mais les moralisateurs de la gauche en ont pris durablement pour leur grade : ils n’ont plus aucune leçon à donner ! En ce sens ce clivage ne représente plus grand-chose. C’est même l’inverse, à trop vouloir prouver, la charge se retourne contre eux.

Il est symptomatique de regarder l’origine de la plupart des leaders politiques de gauche . Beaucoup sont issus de la bonne  bourgeoisie et pas du prolétariat : Fabius, Cahuzac, Hollande. Et la majorité des ouvriers –ou ce qu’il en reste- a depuis longtemps déserté la gauche pour rallier le Front National, parti certes populiste mais aussi et surtout objectivement  populaire. Ne pourrait on pas cesser une fois pour toutes à gauche d’entretenir ces haines recuites de classe ?

Dans un tel contexte de crise économique aggravée, on voit bien à quels extrêmes des deux bords ce climat délétère peut profiter : Mélenchon et Marine au balcon !

En dépit de "cette stratégie de diversion", la gauche va-t-elle pouvoir conserver le même rapport moralisateur à l'argent ?

Cette page semble tournée.  L’affaire Cahuzac a enterré la gauche morale. Cependant tel un canard à la tête coupée qui continue sa course  quelques mètres sur sa lancée, nul doute que la gauche va vouloir nous resservir son antienne contre les riches comme un disque rayé. Faisons un vœu : Si au moins ce triste épisode permettait aux socialistes de jeter à la rivière leurs vieux démons ! De considérer que c’est l’argent , ceux qui en ont et qui l’investissent,  comme ceux qui veulent réussir pour en gagner qui créent la croissance et la richesse.

Le vrai choc de compétitivité, il est là pour la gauche : aimer les riches et leur faire savoir,  la France en a tant besoin. Créez les conditions pour qu’ils restent , qu’ils aient envie d’investir,  de créer et développer leurs entreprises. Renoncez à vos folies d’impôts punitifs, obsolètes et contre productifs !

Au fait, combien les 75%, chers à nos petits Robespierre qui ne le paieront jamais, ont-t-il déjà fait perdre en fuite de capitaux et campagne d’image désastreuse pour le pays, avant même d’être promulgués ? Ce sera plus efficace pour résorber le chômage que les litanies sur un hypothétique  crédit d’impôt que ne verront jamais les entreprises. Hélas pour nos idéologues socialistes la  compétitivité, mot qui ne faisait pas partie de leur vocabulaire il y a encore quelques mois,  passe  par la bureaucratie et par la loi.

Ils n’ont rien compris ni rien appris de leurs échecs économiques continus, comme je l’ai démontré dans mon livre  « 100 ans d’erreurs de la gauche française » : 1924, 1936, 1983, Jospin et les 35 heures et maintenant Hollande. Les mêmes causes produisent les mêmes effets. A ceci près qu’avec plus de 94% de dette publique annoncée pour 2014 par rapport à notre PIB , la sortie de route est désormais mortelle. 

Rassurons-nous. Les exégètes de la gauche ont déjà dû préparer leur discours : c’est un complot international de la finance mondiale et du grand capital, hostiles à Hollande, qui a provoqué  la grande catastrophe économique.

Si l’Allemagne de Madame Merkel finissait par prendre le large et qu’il n’y avait plus que le FMI pour voler au secours de la France, la gauche nous donnerait  encore des leçons.

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