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Le marathon de Paris a lieu ce dimanche.
Le marathon de Paris a lieu ce dimanche.
©REUTERS/Jacky Naegelen

Marathon de Paris

Ce dimanche, 50 000 coureurs s'aligneront au départ du marathon de Paris, un record pour cette course. Le course à pied est un sport populaire, mais sa pratique peut-elle générer une addiction ?

Hubert Ripoll

Hubert Ripoll

Hubert Ripoll est psychologue du sport et essayiste. Il a travaillé auprès de plusieurs équipes de France et avec de nombreux champions olympiques et champions du monde. Il est aussi l'auteur de plusieurs ouvrages sur la psychologie des champions et des coachs sportifs. Il a publié Le mental des champions (Payot, 2008), Le mental des coachs (Payot, 2012), La résilience par le sport (Odile Jacob, 2016).

On peut retrouver l’ensemble de son travail et de ses analyses sur les blogs Le mental des champions, Le mental des coachs, La résilience par le sport.

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Atlantico : La course à pied est l’un des sports les plus populaires. Pour preuve, ce dimanche, 50 000 personnes courront le marathon de Paris. On a tendance à dire que la course rend accro, mais est-ce que cette activité peut être considérée comme une drogue ?

Hubert Ripoll : On peut être accro à la course à pied mais il ne faut surtout pas la considérer comme une drogue. La prise de drogue est une activité passive, qui entraîne une perte de contrôle de soi. Elle est associée à un échec qui engendre une inadaptation psychologique, cognitive et sociale. Alors que pratiquer la course est une action qui augmente le contrôle de soi. C’est une activité reliée à la réussite, à une recherche d’accomplissement. Même un coureur du dimanche à ce sentiment. Cette motivation d’accomplissement, de recherche de dépassement, est exactement le contraire d’une drogue.

Enfin la course est fortement adaptative : on a les idées plus claires, on évacue le stress, les tensions. Les coureurs vont prendre goût à l’effort et ce goût peut se développer dans d’autres domaines d’activité de la vie comme travail. Le sport en général, et la course à pied en particulier, s’opposent radicalement à la drogue.

Quelles sont les substances sécrétées par le corps humain qui nous rendent accro à la course ?

Il a été démontré que lorsqu’on pratique un effort prolongé, le corps produit des endosubstances qui sont de type endorphine. Elles ont les propriétés d’inhiber la douleur et d’augmenter le plaisir. Ces endorphines sont des dérivés de la morphine.

Si le corps peut créer une réelle addiction à la course, cette addiction peut-elle être néfaste comme les autres addictions ?

L’addiction est un sentiment que l’on ressent lorsqu’on est privé de quelque chose. Il y a des addictions qui sont désocialistantes. La nécessité de courir peut être désocialisante, notamment par rapport milieu familial ou au travail.

Le besoin de courir est là car il permet d'éprouver du plaisir, et d’une certaine façon de s’accomplir. Face à ces sensations, on peut ignorer les signaux d’alertes de notre corps. L’impression d’euphorie due à la sécrétion d’endorphines présente un risque : on ne sent pas que nos tendons sont en souffrance et les courbatures n’apparaissent que le lendemain. Pour les champions, les « addicts », cela va jusqu’à des traumatismes fonctionnels graves : ruptures ligamentaires, problème rachidiens… Ce besoin de pratiquer de façon régulière une activité de longue durée peut être traumatisant.

Il faut savoir pourquoi on pratique : pour se dépasser et pour dépasser les autres. Si ces deux raisons sont exacerbées vous risquez de ne pas ressentir les signaux de votre organisme. Il est donc essentiel d’être à l’écoute de son corps.

Est-ce que d'autres activités sportives peuvent générer une forme d'addiction ?

La pratique d'une épreuve de longue durée, quelle qu'elle soit (course, nage, ski…) force le corps a produire des endosubstances. Cependant l’addiction peut aussi être exogène, comme la recherche constante de victoire, la volonté d'être reconnu socialement. Les personnes qui exercent une activité à très haut niveau et pendant une longue période sont accro au plaisir que cela génère.

Propos recueillis par Manon Hombourger

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