François Hollande, le nouveau Chirac<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
François Hollande en route vers les primaires.
François Hollande en route vers les primaires.
©

Manger des pommes roses

François Hollande a annoncé officiellement ce jeudi 31 mars qu'il était candidat aux primaires socialistes. Professeur de science politique, Frédéric Sawicki analyse pour Atlantico les chances de l'ancien Premier Secrétaire du PS, dont l'image a quelque peu évolué ces derniers mois.

Frédéric Sawicki

Frédéric Sawicki

Frédéric Sawicki est professeur agrégé de science politique à l'université Paris I-Panthéon-Sorbonne.

Spécialiste de l’étude des partis politiques, notamment du parti socialiste français, du militantisme et de la politique locale, il a publié : La société des socialistes : Le PS aujourd'hui (Éditions du Croquant, 2006 avec Rémi Lefèbvre).

Voir la bio »

Quelles sont les chances de François Hollande aux primaires socialistes ? Son passé de Premier secrétaire du parti peut-il jouer en sa faveur ?

Je pense qu’aujourd’hui c’est difficile de faire des pronostics. Ca dépendra de qui seront ses adversaires. Sans doute aura-t-il davantage de chances face à DSK que face à Aubry.

En effet, il a été Premier secrétaire du PS de 1997 à 2008. Il passe donc pour celui qui respectera le programme défini par le parti. Martine Aubry est maintenant un peu sur le même créneau du fait de ses fonctions de Premier secrétaire : l’un et l’autre incarnent la même logique partisane, face à un DSK qui incarne lui une légitimité d’État, de compétence, de sérieux économique, mais qui peut être perçu comme trop autonome par rapport à la ligne du parti.

Par ailleurs, la longue période de François Hollande à la tête du PS lui a permis de nouer des relations privilégiées avec les responsables des fédérations socialistes. Il a ainsi eu un rôle important dans l’arbitrage du choix des candidats des listes socialistes pour toutes les élections proportionnelles ; les régionales et les européennes en particulier. Il est donc intervenu positivement sur la carrière d’un certain nombre de gens.

Enfin, François Hollande a été très réticent à ce que le parti adopte des mesures trop strictes en matière de non-cumul des mandats. Il a pris position à plusieurs reprises sur ce sujet pour essayer justement de se mettre dans la poche les élus socialistes.

Mais cela aura-t-il un impact sur le résultat des primaires ? Après tout ce sont les militants qui votent.

Cela ne garantit pas qu’il fasse un tabac et il y a l’inconnu des sympathisants (non militants) qui peuvent voter lors des primaires. Mais ça lui donne du crédit. Un certain nombre de parlementaires le soutient, des élus important également, les militants ne trouvent pas incongrus qu’il se présente, il n’apparaît pas comme un outsider… tout cela peut favoriser  sa crédibilité auprès d’un public plus large de sympathisants.

Son parcours est-il différent de celui des autres candidats aux primaires socialistes ?

Non. Sa trajectoire est similaire à celles de Laurent Fabius, Ségolène Royal, Michel Sapin ou Elisabeth Guigou. C’est une génération qui a d’abord exercé son activité dans les cabinets ministériels et qui seulement dans un deuxième temps a cherché à se faire élire dans une circonscription.

François Hollande s’est engagé au Parti socialiste en 1979, à une époque où un certain nombre de jeunes haut fonctionnaires sortis de l’ENA, critiques vis-à-vis de la politique de droite de l’époque, ont investi un Parti socialiste qui avait besoin d’experts à la fois pour l’entourage du Premier secrétaire François Mitterrand, puis très vite dans les cabinets ministériels.

Son parcours correspond donc plutôt à la norme de celui des dirigeants actuels du PS. Il se distingue toutefois des autres principaux cadres socialistes qui ont joué les premiers rôles ces quinze dernières années, par son absence d’expérience gouvernementale. Il n'a jamais été ministre : voilà ce qui le différencie principalement de Strauss Kahn, Aubry ou Royal qui sont de la même génération.

Politiquement, François Hollande suit une ligne réformiste…

Ecoutez, objectivement, les distinctions de positionnement politique entre DSK, Martine Aubry ou François Hollande sont quand même microscopiques ! Il faut vraiment aller chercher très loin pour voir les différences.

François Hollande a certes pris des positions sur la fiscalité qui étaient beaucoup plus à gauche que celle reprises par Ségolène Royal lors de la campagne présidentielle de 2007, mais on ne peut pas dire qu’il se situe plus à droite que Martine Aubry, par exemple.

Et comment analysez-vous les différences qui le séparent de Ségolène Royal, son ex-compagne, dernière candidate socialiste à la présidentielle ?

Leurs trajectoires politiques fut au départ assez proches mais elles se sont ensuite éloignées. Ségolène Royal n’a jamais occupé de position importante à la tête du PS. Elle a évolué en marge du parti. Cela lui a été bénéfique dans un premier temps : c’est en grande partie la raison pour laquelle elle a été élue lors des précédentes primaires, parce qu’elle n’apparaissait pas comme un « éléphant ».

Mais cela lui a été préjudiciable par la suite lors de la campagne présidentielle où elle a eu du mal à entrainer les cadres et les militants du parti derrière sa candidature. Hollande c’est plus l'homme du parti.

L'homme de parti au charisme peut-être moins évident que Ségolène Royal…

Certes, mais ce n’est pas forcément indispensable d'avoir du charisme pour être élu président de la République aujourd’hui. On peut penser, notamment après 2007, que les Français cherchent plutôt quelqu’un qui incarne une figure de compromis et de compétence. Selon le contexte, ce ne sont pas toujours les mêmes qualités qui comptent.

Vous voulez dire que son image est l'inverse de celle de Nicolas Sarkozy ?

Ce n’est pas pour rien qu’il cultive sa proximité avec Jacques Chirac ! Cet enracinement corrézien, cette façon de se présenter comme un homme de consensus, d’écoute, qui entretient une sorte de proximité avec la France profonde. C’est clairement une stratégie consciente de sa part, de démarcation à la fois de Nicolas Sarkozy et de Dominique Strauss-Kahn.

Il évoque un Chirac qui lui-aussi était à l’origine un technocrate distant et qui a réussi finalement à apparaitre comme un homme politique à l’aise en toute circonstances, dans tous les milieux sociaux, avec les grands de ce monde comme avec les ouvriers, les chefs d’entreprise, les commerçants… Son modèle aujourd’hui, en terme d’image, c’est Chirac.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !