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Comment faire de nouveau respecter l'école ?
©Flickr/Sharon Drummond

Têtes à claques

Nouvelle agression ce mardi dans un collège de Grenoble. Un parent d'élève ivre s'en est prit violemment à la directrice ainsi qu'à l'un des professeurs. Une violence qui semble se banaliser.

Jean-Rémi Girard

Jean-Rémi Girard

Jean-Rémi Girard est vice-président du SNALC-FGAF (Syndicat National des Lycées et Collèges). 

Il tient le blog sur l'Education nationale "Je Suis en retard" : http://celeblog.over-blog.com

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Atlantico : La principale d'un collège de Grenoble a été agressée ce mardi par un parent d'élève ivre. L'objet de sa colère : l'exclusion de son fils de 15 ans, quelques jours plus tôt. Les agressions entre parents et professeurs se multiplient dangereusement. Pourquoi les parents s'en prennent-ils ainsi aux membres de l'Education nationale qui pourtant sont là afin d'éduquer leurs enfants ? D'où viennent ces tensions ?

Jean-Rémy Girard : Les tensions augmentent depuis que le statut de professeur est de moins en moins considéré dans la société. C’est un phénomène assez automatique, systématique. La profession n’est plus très appréciée par une part de l’opinion publique. En cause, des vacances dites trop longues et un travail qui se limiterait aux heures de cours affichées. Mais ceux-là, n’imaginent pas les recherches que nous effectuons en amont que demande l’enseignement. Le salaire est en chute libre par rapport à d’autres et à la durée d’études qui s’est allongée, en effet les enseignants sont des cadres de catégories A avec un salaire, en début de carrière, qui ne correspond pas à ce statut. Aussi, les parents prennent de plus en plus de place dans l’institution que ce soit dans les conseils de classe, d’administration, dans toutes les commissions. On constate que les parents nous considèrent parfois comme des domestiques, des prestataires de services. Ils veulent imposer leur vision et ainsi mettent à mal l’autorité des professeurs et des chefs d’établissement. Ce phénomène s’est inscrit dans la durée. La loi Jospin de 1989 y est sans doute pour quelque chose dans le sens que l’élève est au centre du système et le parent de plus en plus impliqué dans la vie de l’école et le suivi de l’enfant.

Faut-il en déduire que l'école, en tant qu'institution, n'est aujourd'hui plus respectée ?

Il ne faut pas oublier qu’un parent n’est pas tous les parents ! Cela dit, on constate une nette détérioration du respect en général parce qu’on a l’impression – à raison - qu’elle ne parvient pas à résorber des problèmes sociaux, ou de politique de la ville. L’école est considérée comme une garderie…et si on apprend quelque chose aux enfants, tant mieux. Ce n’est finalement plus pour beaucoup un lieu de Savoir mais un système pratique pour occuper ses enfants. Aussi, nous dénonçons qu’un nombre bien trop élevé d’élèves arrivent au collège ne maîtrisant pas correctement le français que ce soir à l’oral ou à l’écrit mais aussi en calcul. Ce ne sont pas les enseignants qu’il faut mettre en cause mais leur recrutement et leur formation. Le mythe du glandeur qui attend les prochaines vacances est à bannir. Ce sont des gens volontaires mais à qui l’on n’a pas appris les bonnes méthodes dans les IUFM (Institut universitaire de formation des maîtres).

Comment inverser la tendance ? Comment rétablir la confiance entre élèves et enseignants et entre parents et enseignants ?

L’enseignant doit tout d’abord être perçu comme un professionnel. Les professeurs des écoles doivent maîtriser impeccablement le français et les mathématiques. En secondaire, on est en droit de leur demander un haut niveau de connaissances, quel que soit le domaine qu’il enseigne. Ils ne peuvent se contenter de bases mais doivent être bien plus performant que ce qui est nécessaire. Cela passe par une revalorisation salariale, d’ailleurs les métiers les plus considérés sont ceux où l’on gagne de l’argent. De ce point de vue, le métier a beaucoup souffert. La formation également doit être revue pour les raisons énoncées précédemment. Enfin, la présence des associations de parents doit être limitée. Il est nécessaire que parents et enseignants puissent dialoguer notamment lors des réunions trimestrielles prévues à cet effet, mais les représentants n’ont pas à s’immiscer sans cesse dans cette relation. Ils sont porteurs d’une idéologie politique qui n’a rien à faire dans le cadre de l’école. Ils mettent les enseignants en position de faiblesse puisqu’ils parviennent dans certains établissements à semer la zizanie entraînant une nette dégradation de la notion « respect » de la part des enfants et adolescents.

Faut-il imaginer la généralisation de solutions plus radicales ?

Les élèves sont très souvent amener à présenter leur carnet dès l’entrée dans l’établissement. Il faudrait que les établissements ne soient plus ouverts sur la rue. Cela rend l’endroit accessible à tous. Il faut qu’il y ait une grille et un interphone, avec éventuellement un gardien dont la mission sera de gérer l’entrée et la sortie de personnes avec un bref contrôle d’identité. A l’inverse, il ne faut surtout pas de portique. Cela peut créer un engorgement et surtout inciter à la méfiance. La crise de confiance atteindrait alors son paroxysme.

Malheureusement, nous manquons cruellement de personnels surveillants. D’autant plus que de nombreux établissements ont été construits avec des plans architecturaux dénués de bon sens, puisque trop d’espaces sont à l’abri des regards et donc de la surveillance. Sur un établissement de 600 élèves environ, on compte en général 6 surveillants… Si aucun n’est malade. Des personnes qui sont également là pour favoriser le contact avec les élèves, la confidence, un lien qu’ils n’entretiennent pas avec leurs professeurs dont le statut rend difficilement accessibles.

Propos recueillis par Mathilde Cambour

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