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Martine Aubry prépare son retour... mais pour quoi faire ?
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Impossible retour ?

Martine Aubry a déclaré récemment être très proche du gouvernement et déjeuner régulièrement avec les différents ministres, pas certain pour autant que son retour soit si proche.

Antonin  André

Antonin André

Antonin André est journaliste politique. Il est l' auteur de "l'homme qui ne devait pas être président" chez Albin Michel (2012) et "Hold-uPS, arnaques et trahisons" éditions du Moment (2009).

 

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Atlantico : Au-delà des rumeurs journalistiques à propos d’une éventuelle nomination de Martine Aubry au poste de Premier ministre, cette dernière a confirmé il y a quelques jours être très impliquée dans la vie politique du gouvernement. Le Président Hollande excluant régulièrement un remaniement dans son discours officiel, quel genre de retour peut-elle espérer ?

Antonin André : C’est là toute la complexité de la logique et de la démarche actuelle de Martine Aubry car il n’y a en fait aucun poste, aucune opportunité, et donc aucun moyen pour elle de revenir à une fonction exécutive au gouvernement ou plus largement dans l’entourage de l’Elysée. On lui a malgré tout confié une mission politique et économique autour de la Chine comme une marque de respect par rapport à son statut. Elle reste également très écoutée et elle conserve de nombreux fidèles au sein de la majorité. Elle suit, par exemple, de très près la négociation de l’accord sur l’emploi puisqu’il s’agit d’un projet dont elle est à l’origine et en rencontre tous les acteurs. Elle est probablement consciente de cette impossibilité de retour à court terme et son objectif consiste donc à montrer qu’elle n’est pas déprimée et qu’elle est toujours potentiellement dans le jeu politique national. Elle maintient sa stature de personnage d’Etat.

Martine Aubry est-elle devenue de fait l’éminence grise du Parti socialiste ? Sa conscience de gauche?

A n’en pas douter, si Martine Aubry prenait la parole publiquement elle aurait de nombreuses critiques à formuler sur la politique et l’action du gouvernement. Et c’est cela qui explique qu’elle soit aussi discrète, aussi réservée, sur le commentaire quotidien de l’action du gouvernement que ce soit sur le non-cumul des mandats ou sur le droit de vote des étrangers aux élections locales. Elle ne veut pas entrer en guerre avec le gouvernement. Dans son dernier grand discours politique au congrès de Toulouse, elle proposait également des solutions économiques qui ne sont pas suivies par le gouvernement notamment sur la TVA. Martine Aubry reste donc une autorité, une sorte de gardienne d’une ligne à la gauche du gouvernement qui correspond au PS qu’elle a dirigé jusque récemment. Elle est effectivement une conscience de gauche avec des relais parlementaires qui permet d’apporter une sorte d’équilibre avec la politique d’Hollande.

La mission internationale qui lui a été confiée est-elle une manière de la maintenir dans le pouvoir ou de l’en tenir à distance ?

Cette mission est surtout une manière de la valoriser en lui donnant une mission prestigieuse mais il est tout de même très clair qu’il ne s’agit aucunement d’un rôle de premier plan. Disons qu’il s’agit de la part du président et du premier ministre d’une sorte de reconnaissance de son rang, une marque de respect due à ce qu’elle représente idéologiquement et historiquement au sein du Parti socialiste. Il ne faut donc pas se raconter d’histoire, la seule véritable échéance pour Martine Aubry pour l’instant c’est la mairie de Lille l’année prochaine et rien d’autre. Rappelons-nous que Martine Aubry a refusé de participer au gouvernement de François Hollande si elle n’avait pas Matignon et il est donc peu probable qu’elle change d’avis aujourd’hui ou demain pour autre chose que la place de premier ministre. Or, il me semble que le président de la République ne lui proposera jamais ce poste, mais en situation de crise, tant leur incompatibilité caractérielle est grande et rendrait la gouvernance impossible.

Sa position extérieure au gouvernement et sa capacité à le condamner – par exemple sur le non-cumul des mandats – peuvent-elles lui permettre d’apparaître, à l’horizon 2017, comme une bonne alternative aux échecs de François Hollande ?

A l’aube d’une élection présidentielle, le président sortant est toujours le candidat naturel de son camp et cela même dans les situations difficiles. Je ne vois donc pas comment Martine Aubry, qui a été battue aux primaires, pourrait constituer une alternative séduisante à François Hollande si celui-ci se présente pour un deuxième mandat. Et il est bien évidemment très probable qu’il brigue ce second mandat. Madame Aubry n’a donc aucun moyen d’être une alternative, ni même une épine dans le pied du président, même avec un éventuel soutien de la partie la plus à gauche des parlementaires. Soutien qu’elle n’aura pas puisque cette aile gauche de la majorité est le produit de l’élection de François Hollande qui, bien qu’elle se plaigne, vote les mesures du président et lui restera fidèle.

Propos recueillis par Jean-Baptiste Bonaventure

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