Tunisie : le jasmin a fané mais la Révolution du 14 janvier n’est pas morte<!-- --> | Atlantico.fr
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Plus de deux ans après la "Révolution du jasmin, la Tunisie s'enfonce encore un peu plus dans un chaos.
Plus de deux ans après la "Révolution du jasmin, la Tunisie s'enfonce encore un peu plus dans un chaos.
©Reuters

Editorial

L’assassinat de Chokri Belaïd, militant progressiste en Tunisie déjà actif sous Ben Ali, fait écho à l’immolation de Mohamed Bouazizi qui avait déclenché la Révolution de jasmin du 14 janvier 2011.

Yves Derai

Yves Derai

Yves Derai est éditorialiste à Atlantico. Chaque semaine, il écarte les lourds rideaux de velours des palais de la République pour nous en révéler les secrets.

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L’assassinat de Chokri Belaïd, militant progressiste en Tunisie déjà actif sous Ben Ali, fait écho à l’immolation de Mohamed Bouazizi qui avait déclenché le soulèvement de décembre 2010.

Un peu plus de deux ans après la révolution du 14 janvier 2011, le jasmin a fané. Il y a seize mois, le processus démocratique a porté au pouvoir le parti islamiste Ennahda qui n’a de modéré que l’apparence. Cette formation qui cherche à imposer progressivement la charia en costume/cravate laisse les groupes salafistes faire « le sale boulot », autrement dit, terroriser les opposants et même, depuis la mort de l’avocat Belaïd, les éliminer purement et simplement.

Ce qui se joue actuellement à Tunis ne concerne pas seulement le pays où coulent l’huile d’olive et le miel. La révolution du 14 janvier fut le premier domino des printemps arabes qui se sont étendus, on le sait, à l’Egypte, la Libye, le Yémen et la Syrie où la guerre civile reste incertaine. Deux hypothèses : soit la société civile, laïque et ouverte, se rebelle une nouvelle fois et parvient à obtenir de nouvelles élections afin de former une coalition à son image ; soit les islamistes arrivent à juguler le mouvement par la violence, entrainant un second effet domino beaucoup moins réjouissant qui risque de propager le fascisme vert dans tous les pays des printemps arabes.

Pressentaient-ils la tournure des événements ? Toujours est-il que la semaine dernière, les principaux responsables du tourisme en Tunisie étaient à Paris pour rencontrer quelques journalistes et tenter de rassurer les Français sur la stabilité de leur pays ! Présent à ce petit déjeuner complètement surréaliste a posteriori, j’ai été cependant surpris par la liberté de ton de nos interlocuteurs. L’ambassadeur de Tunisie à Paris, Adel Fekih, appelait les hommes d’Ennahda « les barbus ». Mohamed Toumi, président de la Fédération Tunisienne des Agences de Voyages, lançait : « le Tourisme représente 400 000 emplois directs et indirects. Qui pourra gouverner la Tunisie avec 400 000 chômeurs de plus ? Personne ! »

Malgré leur caractère autocratique, les régimes Bourguiba et Ben Ali ont installé durablement quelques fondamentaux qui, je l’espère, sauveront peut-être la Tunisie de la tragédie annoncée : l’égalité homme/femme via le code du statut personnel voté dés 1956 (il y a quelques semaines, le gouvernement a tenté en vain de remplacer dans la loi tunisienne cette égalité par la « complémentarité de la femme pour l’homme »), l’ouverture aux visiteurs étrangers, la liberté de création, le respect des religions minoritaires… Je sais qu’écrire cela me vaudra les foudres de quelques intellectuels français bien pensants que l’on voyait fréquemment -parfois invités par Ben Ali !- se prélasser au bord de la piscine des palaces de Hammamet et Djerba. Qu’importe. La Tunisie et le Printemps arabe valent bien quelques quolibets.

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