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77 % des Égyptiens votent pour le changement, mais lequel ?
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Zone franche

Si les Français taquinent le goujon, les Égyptiens s'entassent dans les bureaux de vote. Frères musulmans et pro-Moubarak restent toutefois en embuscade…

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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En politique, les Français sont un peuple étrangement post-moderne : ils adorent s’étriper sur Internet au nom de leurs idéaux républicains mais ne votent plus que chez les sondeurs

Les Égyptiens sont moins compliqués : s’ils obtiennent la démocratie en se bagarrant pour de vrai, ils s’empressent de s’en servir. C’est ainsi que 77,2% d’entre eux, pas moins, se sont retrouvés dans les bureaux de vote ce dimanche pour le tout premier scrutin de l’après-Moubarak.

Le mandat présidentiel, d’une durée de six ans et renouvelable à l’infini jusqu’à présent, a donc été ramené à quatre ans (renouvelable une seule fois ). Huit autres réformes institutionnelles mineures,  ouvrant la voix à des élections rapides, ont également été adoptées dans l’attente de la rédaction d’une nouvelle constitution.

Mais si tout le monde se félicite du succès de ce référendum à entrées multiples pour le niveau de participation comme pour l’affaiblissement symbolique du statut présidentiel , des voix s'élèvent pour critiquer la précocité du calendrier électoral proposé par le Conseil Militaire Suprême qui gouverne le pays par intérim (législatives en juin, présidentielle en août).

Et pour cause : encore peu structurés, les nouveaux partis susceptibles de concourir seront loin d'être en ordre de bataille cet été. De fait, seuls les Frères musulmans et le Parti National Démocrate (soit le mouvement de Hosni Moubarak himself ) sont réellement capables de préparer une campagne dans des délais aussi brefs.

Mohamed El Baradei empêché de voter, opposition fragilisée...

Mohamed El Baradei, prix Nobel de la Paix et ancien président de l’AIEA, régulièrement présenté comme l’un des candidats les plus sérieux à une présidentielle, n’a d’ailleurs pas pu voter : caillassé et molesté, il a été empêché de se rendre aux urnes par « un groupe d'individus » (des Frères musulmans, croit savoir le quotidien algérien Liberté).

La presse égyptienne souligne justement l’émergence de deux camps antagonistes : les religieux et les militaires d’une part, qui militent pour des élections immédiates « permettant d’éviter un futur incertain » et les leaders des principales formations d’opposition (Kifaya, Wafd…) d'autre part, qui se méfient et exigent des garanties.

George Ishak, l’un des fondateurs de Kifaya, demande ainsi qu’un « conseil présidentiel soit d'abord mis en place et fonctionne en coordination avec le pouvoir intérimaire ». Mais Essam El-Erian, l’un des principaux responsables des Frères musulmans, ne l'entend pas de cette oreille. Pour lui, l’Egypte « fait face à de sérieuses menaces à ses frontières » et refuse une période de transition trop longue.

On le voit, le moment où les manifestants de la place Tahrir pourront se permettre d’imiter l’apathie à la française les jours de scrutin est loin d’être arrivé. Le post-modernisme démocratique, c’est comme la pêche à la ligne, il faut un peu d’expérience.

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